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Le physicien Bill Lynch ajustant le détecteur utilisé pour étudier les collisions de noyaux d'étain. Crédit : Harley Seeley, MSU
Le concept d'étoile à neutrons a été proposé une première fois au début des années 1930 par Baade et Zwicky et il fut précisé quelques années plus tard par Oppenheimer et Volkoff. Toutefois, ce n'est vraiment que dans les années 1960 que l'on commença sérieusement à développer des modèles d'étoiles à neutrons. Plusieurs raisons expliquent ce décalage de trois décennies.
En premier lieu, l'astrophysique nucléaire avait connu des progrès spectaculaires. Ensuite, et surtout, l'astrophysique relativiste venait de naître et faisait l'objet de développements rapides après la découverte des quasars et du rayonnement fossile. Ces résultats accréditaient subitement la théorie du Big BangBig Bang de Lemaître, Gamow et Ralph Alpher. Avec sa densité énorme, son champ de gravitation cent milliards de fois plus intense que celui de la Terre, une étoile à neutrons était un excellent laboratoire pour tester la physiquephysique du Big Bang et des physiciensphysiciens comme John Wheeler ne s'y sont pas trompés.
Il faudra tout de même attendre 1968, avec l'observation d'un premier pulsarpulsar par Jocelyn Bell et son interprétation en tant qu'étoile à neutrons en rotation par Thomas Gold et Franco Pacini, pour que la communauté des astrophysiciensastrophysiciens soit convaincue de l'existence de ces astres fascinants aux propriétés étranges.
Aujourd'hui, beaucoup reste encore à découvrir, malgré des décennies d'analyses théoriques, concernant notamment les émissionsémissions d'ondes gravitationnellesondes gravitationnelles, et d'observations, comme la mesure des flux de rayons Xrayons X causé par l'accrétionaccrétion de matièrematière par les étoiles à neutrons associées en système binairesystème binaire.
En particulier, il reste encore beaucoup d'incertitudes sur les détails de la formation des étoiles à neutrons lors de l'explosion d'une supernovasupernova et sur l'état de la matièreétat de la matière entre la surface et le cœur. En effet, une étoile à neutrons peut se voir comme une sorte de noyau d'atomeatome gigantesque rassemblant environ une massemasse solaire dans une sphère de quelques dizaines de kilomètres de diamètre. La densité s'y élève lorsque l'on s'enfonce dans ses profondeurs et passe d'environ une tonne par cm3 en surface à plusieurs centaines de millions de tonnes par cm3 dans le coeur, dépassant celle des noyaux.
Le physicien et cosmologiste Thomas Gold exposant sa théorie de la poussièrre lunaire. Crédit : Cornell University
Après la théorie, l'expérience
Pour tester en laboratoire les modèles de l'intérieur des étoiles à neutrons, on recourt depuis des années à des collisions d'ionsions lourds.
Au National Superconducting CyclotronCyclotron Laboratory (NSCL), Betty Tsang et ses collègues font partie des chercheurs sondant les mystères de la matière nucléaire et donc des étoiles à neutrons. Ils se sont concentrés sur un problème lié à ce qu'on appelle l'énergieénergie de symétrie pour la matière nucléaire. Le problème était de comprendre et de modéliser correctement son équationéquation d'état. Comme pour le cas d'un gaz parfaitgaz parfait, celle-ci relie les variations de pressionpression, densité et température au sein de la matière nucléaire. On peut dériver cette équation à partir de modèles microscopiques faisant intervenir les interactions entre protonsprotons et neutrons.
Il se trouve que les forces nucléaires entre neutron et neutron ou entre proton et proton sont moins intenses qu'entre proton et neutron. Cela se traduit par des énergies de liaison différentes selon la proportion de neutrons dans les noyaux et l'on caractérise cette propriété par une quantité, l’énergie de symétrie.
Or, cette dernière doit varier avec la densité de la matière nucléaire parce que les interactions entre nucléonsnucléons elles-mêmes en dépendent. Si l'on veut comprendre les phénomènes à l'œuvre dans les entrailles des étoiles à neutrons, il faut connaître la loi de cette dépendance. C'est un redoutable problème théorique et le plus simple est encore d'en faire l'étude expérimentalement.
C'est pourquoi les chercheurs ont fait entrer en collisions différents isotopes de noyaux d’étain à un tiers de la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière grâce aux faisceaux d'ions lourds du NSCL. En fonction de l'énergie des faisceaux, des types d'isotopesisotopes et des collisions entre noyaux (frontales ou tangentielles), les produits de réactions ne sont pas les mêmes dans les détecteurs entourant la zone de collision et on mesure ainsi différentes conditions d'état de la matière nucléaire.
Les résultats de ces études ont été publiés dans un article de Physical Review Letters. Ils devraient permettre de mieux comprendre la croûtecroûte interne d'une étoile à neutrons, analogue du manteaumanteau pour une planète.