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Pour découvrir des processus rares dans le monde de la physique des hautes énergies, il faut disposer de faisceaux de particules particulièrement intenses, donc avec une forte « luminositéluminosité », comme disent les physiciensphysiciens. En augmentant le nombre de collisions par seconde, ils permettent de découvrir plus rapidement de nouvelles particules. Ainsi, une augmentation d'un facteur dix de la luminosité des faisceaux de protons du LHC permettrait de découvrir en une année au lieu de dix certains événements rares issus d'une physique au-delà du modèle standard.
Mais augmenter la luminosité de ces faisceaux, c'est aussi augmenter les rayonnements auxquels sont soumises les alimentations électriques des aimants supraconducteurssupraconducteurs guidant les paquetspaquets de protons circulant dans le LHCLHC. Pour bien faire, il faudrait éloigner ces alimentations des aimants. Cela permettrait aussi aux techniciens de pouvoir intervenir sans risque sur ces alimentations en cas de problème.
Une vidéo de présentation du Cern.© Cern, YouTube
Le LHC va redémarrer l'année prochaine et devrait rapidement atteindre son énergie et sa luminosité nominale. Mais déjà il est prévu à l'horizon des années 2020 d'en faire un High Luminosity LHC (HL-LHCHL-LHC) avec une luminosité amélioré d'un facteur 10. Ce sera peut-être nécessaire pour découvrir des traces de la supersymétrie.
Des câbles supraconducteurs pour le HL-LHC
Le HL-LHC est à l'étude depuis un moment déjà et les ingénieurs savaient que pour éloigner les alimentations électriques des aimants supraconducteurs, il fallait développer des longs câbles reliant les deux dispositifs. La section Supraconducteurs et Dispositifs supraconducteurs, au sein du groupe Aimants, Supraconducteurs et Cryostats du département Technologie du CernCern, s'est alliée en 2008 avec le fabricant ColumbusColumbus Superconductors, à Gênes, pour relever le défi.
En effet, les aimants du LHC consomment jusqu'à 1,5 million d'ampèresampères et il était hors de question de les relier sur de longues distances à leurs alimentations électriques. Les câbles supraconducteurs au niobiumniobium-titanetitane (Nb-Ti), déjà utilisés pour transférer le courant aux aimants, posant de trop gros problèmes de cryogéniecryogénie avec de l'héliumhélium liquideliquide sur de longues distances, il a fallu innover.
La ligne de transmission électrique de 20 m contenant deux câbles constitués de MgB2. Ce matériau existe depuis les années 1950, mais ses propriétés supraconductrices n’ont été découvertes qu’en 2001. © Cern
Une solution a été trouvée : des câbles supraconducteurs en diborure de magnésiummagnésium (MgB2) ayant une température critiquetempérature critique de 39 K. Ils permettent d'utiliser de l'hélium gazeux et même de l'hydrogènehydrogène liquide à basses températures. En bonus, Le MgB2 est nettement moins coûteux que les supraconducteurs niobium-titane.
Des lignes électriques supraconductrices refroidies à l'hydrogène liquide
Le Cern vient d'annoncer qu'il avait obtenu une preuve de principe de la pertinence de ce concept en réalisant tout d'abord deux câbles de 20 m de longueur en MgB2. Refroidis de façon uniforme à 24 kelvinskelvins (environ -249 °C) avec un flux d'hélium gazeux, ces câbles ont transmis sans problème une intensité électrique de 20 kA. Il s'agit d'un record du monde pour un courant dans un supraconducteur.
La technologie mise au point par le Cern et la société Columbus Superconductors pourrait bien déborder le cadre de la recherche fondamentale. Selon le prix Nobel de physique Carlo Rubbia, avec ce genre de câbles, de longues lignes de transmission électrique souterraines refroidies à l'hydrogène liquide pourraient voir le jour.