Des physiciens japonais ont mis au point une diode qui bat le record absolu d'émission dans l'ultraviolet. 210 nanomètres : c'est la longueur d'onde la plus courte jamais atteinte avec un semi-conducteur comme source. Les applications pourraient être nombreuses. Explication et illustrations.
Le schéma de principe de la diole LED à l'AlN

Le schéma de principe de la diole LED à l'AlN

Une équipe des labos de recherche de la firme Nippon Telegraph and Telephone Corporation (NTT) vient de fabriquer la diode LED (« light emitting diode ») la plus « courte » : avec 210 nm (10-9 m), une diode au nitrure d'aluminium (AlN) a permis d'émettre de la lumière à la longueur d'onde la plus basse jamais observée de la part d'un semi-conducteur (1).

Ce résultat confirme les suppositions émises de longue date selon lesquelles l'AlN pourrait émettre dans l'ultraviolet profond (« deep ultraviolet », ou « DUV ») (Fig. 1).

La plus courte longueur d'onde émise par un semi-conducteur dans le spectre de l'ultraviolet.<br />Crédits : NTT- Basic Research Laboratories

La plus courte longueur d'onde émise par un semi-conducteur dans le spectre de l'ultraviolet.
Crédits : NTT- Basic Research Laboratories

Généralement ce type de composant électronique est fabriqué à partir de deux matériaux semi-conducteurs, de type « n » (le courant électrique est le fait du déplacement des électrons) et de type « p » (ce sont des charges positives constituées de « trous » qui transportent le courant). Leur jonction provoque l'émission de lumière par recombinaison des électrons et des trous. Les diodes LED à partir de nitrure d'aluminium, d'indium et de gallium sont très répandues, et utilisées comme sources lumineuses à basse tension. Elles émettent dans les couleurs primaires. Du matériau choisi dépend la longueur d'onde d'émission (entre autres).

Un sandwich de nitrure d'aluminium dopé

Certaines LED, à base de nitrure d'aluminium en particulier, peuvent émettre dans l'ultraviolet. La quantité d'aluminium présente dans l'alliage dicte la « couleur » émise. Mais il faut pour cela « doper » l'alliage, c'est-à-dire améliorer les propriétés électroniques du semi-conducteur en augmentant le nombre de charges (en l'occurrence électrons et trous). A cela s'ajoute une autre difficulté : la fabrication d'une LED AlN se heurte à une densité très élevée de défauts cristallins et à une concentration très importante de défauts.

« Les scientifiques ont résolu ces problèmes en développant de nouvelles technologies de fabrication et de dopage » explique NTT dans un communiqué paru en même temps que les résultats publiés dans Nature. Concrètement, l'équipe de Yoshitaka Taniyasu a mis au point une sorte de sandwich composé d'une couche de nitrure d'aluminium placée entre deux couches du même matériau dopé afin d'être un conducteur du type « p » ou « n » (Fig. 2).

« La lumière émise dans l'ultraviolet profond peut se montrer très efficace pour détruire les substances toxiques persistantes comme la dioxine et les PCB (les biphenyls polychlorés) qui sont des composés très stables » explique le laboratoire. On pourrait ainsi purifier l'eau. Par ailleurs un semi-conducteur comme l'AlN est inoffensif, contrairement à d'autres produits employés dans l'électronique. Enfin des techniques telle la photolithographie, qui est utilisée dans les industries de la miniaturisation, pourraient bénéficier de sources lumineuses à faible longueur d'onde pour augmenter la résolution.

(1) "An aluminium nitride light-emitting diode with a wavelength of 210 nanometres", Yoshitaka Taniyasu, Makoto Kasu, and Toshiki Makimoto, Nature 441 325.