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Détecteur en germanium Edelweiss II
La matière ordinaire, constituée d'atomes, qu'ils soient terrestres, stellaires ou galactiques, ne contribue que pour environ 4 % à la densité totale de l'Univers. Une partie des 96 % restants serait formée de matière cachée (25 %), dite aussi matière noirematière noire, le reste étant de "l'énergie noire". La matière noire tire son nom du fait qu'elle interagit faiblement avec la matière ordinaire et qu'elle est notamment insensible aux interactions électromagnétiques qui pourraient donner lieu à un rayonnement lumineux. Son éventuelle existence, prédite pour la première fois dans les années trente par l'astronomeastronome Fred Zwicky, est une des énigmes majeures de la physique léguées par le XXe siècle. Plusieurs théories de physique subatomique, en particulier les théories de supersymétriesupersymétrie, prédisent qu'elle pourrait être constituée d'un nouveau type de particules, les WimpsWimps (acronyme anglo-saxon de particule massive interagissant très faiblement).
De nombreuses équipes dans le monde cherchent à observer les Wimps. Mais ces particules sont très difficiles à détecter compte tenu de leur très faible interaction avec la matière ordinaire (et donc avec un détecteur), d'où la nécessité de se protéger des parasitesparasites que constituent d'une part le rayonnement cosmique et la radioactivitéradioactivité qu'il induit, et d'autre part la radioactivité naturelle (corps humain, roches, matériaux). Pour cela, les physiciensphysiciens travaillent dans des laboratoires souterrains avec des matériaux d'une pureté radioactive extrême et leurs détecteurs sont protégés par de multiples blindages. L'objectif est de détecter les infimes "chocs" entre des Wimps et les noyaux atomiques du germaniumgermanium des détecteurs, notamment par la mesure de la très faible élévation de température qu'ils produisent (un millionième de degré environ).
Installés dans le hall du LSM au milieu du tunnel routier du Fréjus, les détecteurs ultra-sensibles d'Edelweiss sont protégés des rayons cosmiquesrayons cosmiques par 1 700 m de roche. Edelweiss I, qui rassemblait 3 détecteurs de 320 grammes de germanium pur, avait déjà tenté d'observer des Wimps sans y parvenir. Pourtant, elle avait en 2002 la meilleure sensibilité mondiale, par rapport à ses concurrents installés dans d'autres laboratoires souterrains en Italie, en Angleterre, aux États-Unis et au Japon. Cette sensibilité n'a été égalée et surpassée (par un facteur 4) que deux ans plus tard par une expérience similaire aux États-Unis appelée CDMS.
Pour augmenter la sensibilité de la recherche, il a donc été décidé de construire une nouvelle installation, Edelweiss II. Placée dans un nouvel environnement, elle comprendra dans un premier temps 28 détecteurs (soit une massemasse totale d'environ 9 kg) et devrait atteindre dans les années à venir environ 120 détecteurs (soit une masse totale d'environ 40 kg) abrités par un blindage de 100 tonnes de plombplomb et polyéthylènepolyéthylène. Unique au monde par la taille de son cryostat, d'un volumevolume de 100 litres, capable de refroidir la quarantaine de kilogrammeskilogrammes de détecteurs en germanium à une température proche du zéro absoluzéro absolu, Edelweiss II aura alors une sensibilité environ 100 fois plus grande que celle d'Edelweiss I. En leur permettant d'explorer de nouveaux modèles dans le cadre des théories de supersymétrie, elle constituera, pour les équipes françaises, allemandes et russes d'Edelweiss, un outil décisif dans la course à la recherche de ces particules évanescentes, les Wimps.
En janvier 2006, Edelweiss II a accompli avec succès la première mise à froid de son nouveau cryostat et a enregistré les premières impulsions des détecteurs. Ces impulsions, induites pour l'instant par la radioactivité ambiante, manifestent le bon fonctionnement des détecteurs dans le tout nouvel environnement. Elles seront éliminées après la phase de mise au point, par la mise en place des différents blindages de l'expérience qui ne laisseront alors passer que les Wimps.
Note :
1 La collaboration Edelweiss est constituée de six laboratoires français CEA/DSM (Dapnia, Drecam), CNRS/IN2P3 (Institut de physique nucléaire de Lyon, Centre de spectrométriespectrométrie nucléaire et de spectrométrie de massespectrométrie de masse), CNRS/MIPPU (Centre de recherche sur les très basses températures), CNRS/INSU (Institut d'astrophysiqueastrophysique de Paris, Institut d'astrophysique spatiale), deux laboratoires allemands (FZ Karlsruhe, université de Karlsruhe) et un laboratoire russe (Dubna/DLNP)