Dans certaines conditions, un isolant peut devenir «métallique» et donc conducteur. Ce phénomène, la transition de Mott, reste mal compris. Une équipe dirigée par Warren Pickett vient de l’expliquer un peu mieux grâce à une simulation informatique. Le résultat pourrait aussi intéresser les géologues car de telles transitions sont sans doute à l'œuvre à grande profondeur.
La transition de Mott étudiée en fonction de la pression. Les lettres indiquent différentes stuctures cristallines et insulator veut dire isolant en anglais. Crédit : Warren Pickett/Nature Material

La transition de Mott étudiée en fonction de la pression. Les lettres indiquent différentes stuctures cristallines et insulator veut dire isolant en anglais. Crédit : Warren Pickett/Nature Material

La transition de Mott est un célèbre et important phénomène en physique du solide qui a commencé à être compris à partir de 1949 par le prix Nobel de physique Nevil Mott. On sait que des matériaux tels que le cuivre métallique, l'aluminium ou l'argent sont de bons conducteurs parce que les électrons y circulent librement. En revanche, dans les oxydes métalliques plus complexes, tels que le dioxyde de vanadium ou l'oxyde de manganèse, le mouvement des électrons est moins facile car limité par les charges positives et négatives des atomes. On parle alors de « matériaux fortement corrélés » et, de façon intéressante, les supraconducteurs et les semi-conducteurs font partie de ce groupe.

Une transition de Mott peut se produire dans certains de ces matériaux et ils peuvent passer ainsi de l'état de matériau isolant à celui de conducteur lorsqu'ils sont chauffés ou mis sous pression. C'est le cas du  dioxyde de vanadium  qui devient conducteur à une température de 68 °.

De même, dans les conditions de températures et de pressions ordinaires, l'oxyde de manganèse (MnO) est magnétique et non conducteur, du fait des fortes interactions électroniques autour du cristal. Sous une pression d'un mégabar (un million d'atmosphères), cet oxyde se transforme et devient conducteur.

Une similitude avec le manteau terrestre

C'est ce qui se passe dans l'exemple que l'équipe du professeur Pickett, de l'Université de Californie à Davis, a étudié à l'aide d'une simulation numérique. Les résultats de cette étude sont aujourd'hui publiés dans le journal Nature Material. L'équipe retrouve précisément les propriétés jusque-là décrites par des équations approximatives ou incertaines. On dispose ainsi, désormais, d'un outillage efficace pour comprendre ces phénomènes de tranistion.

Or, ceux-ci ne concernent pas que les matériaux étudiés au laboratoire. Comme le fait remarquer le professeur Pickett, l'oxyde de manganèse ressemble aux oxydes de fer et de silicium qui composent le manteau terrestre. En particulier, le manteau inférieur (670 - 2.900 km) est constitué principalement de pérovskites, de même composition que les péridotites mais avec une autre combinaison des trois mêmes minéraux, l'olivine, le pyroxène et le grenat. Or, certaines pérovskites sont connues pour présenter le phénomène de transition de Mott. Il pense donc que des implications pour la physique de l'intérieur de la Terre pourraient découler de ce travail.