Les supraconducteurs non conventionnels exhibent une supraconductivité exotique. Appelés supraconducteurs à haute température critique, ils ne sont toujours pas vraiment compris. Un groupe de chercheurs du Laboratoire national des champs magnétiques intenses du CNRS vient d'apporter une nouvelle pièce à ce puzzle, qui contribuera peut-être à résoudre l’énigme.

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    Le découvreur de la supraconductivité, le prix Nobel de physique Heike Kamerlingh Onnes. © Museum Boerhaave

    Le découvreur de la supraconductivité, le prix Nobel de physique Heike Kamerlingh Onnes. © Museum Boerhaave

    La supraconductivité a 100 ans depuis le 8 avril 2011. Elle a fasciné bien des physiciensphysiciens, comme Vitaly Ginzburg et Pierre-Gilles de Gennes, et a donné lieu à l'attribution de plusieurs prix Nobel. Si l'on a fini par comprendre ce qui rendait supraconducteur des matériaux comme le mercure, le plomb et le nitrure de niobium, qui constituent ce qu'on appelle des supraconducteurs conventionnels, il n'en est pas de même pour d'autres matériaux exotiquesexotiques. Ainsi, on ne comprend toujours pas vraiment pourquoi les cupratescuprates peuvent rester supraconducteurs à des températures dépassant celle de l'azoteazote liquideliquide, qui est de 77 kelvinskelvins (K).

    Voilà qui est très frustrant car l'on aimerait bien avoir des indices pour créer des supraconducteurs non conventionnels à température ambiante. Certes, il est déjà très intéressant pour des applicationsapplications industrielles de rendre supraconducteur le YBa2Cu3O7 à 92 K, et donc de pouvoir utiliser l'azote liquide plutôt que l'héliumhélium, alors que le mercure et le plomb ne le deviennent qu'en dessous de 4,2 K et 7 K respectivement.

    Mais on aimerait faire beaucoup mieux... De la supraconductivitésupraconductivité à température ambiante révolutionnerait notre vie de tous les jours, comme on peut le voir dans les vidéos du site SupraDesign.


    Si la supraconductivité existe à température ambiante, imaginons-la sous forme de textiles dans des accessoires de sport. Et voici un sac à dos qui ne frotte plus, des semelles lévitantes ou des genouillères sans contact avec la peau... © ENSCI-SupraDesign/YouTube

    Une compétition entre plusieurs ordres électriques ?

    L'article publié dans Nature par des membres du Laboratoire national des champs magnétiqueschamps magnétiques intenses du CNRS (Grenoble), en compagnie de collègues canadiens, ne permet toujours pas de résoudre l'énigme des supraconducteurs à haute température critiquetempérature critique découverts en 1986 par Bednorz et Müller. Mais en soumettant un de ces cuprates, plus précisément du YBaCuO, à des champs magnétiques particulièrement intenses (des milliers de fois plus puissants que ceux des petits aimantsaimants qu'arborent les réfrigérateurs ménagers), les chercheurs ont bel et bien découvert une nouvelle pièce du puzzle qui contribuera peut-être à sa résolutionrésolution.

    D'après des mesures faites par résonance magnétique nucléairerésonance magnétique nucléaire, il semblerait que les électronsélectrons du cuprate soumis à ces forts champs magnétiques s'ordonnent pour former des sortes de filaments rectilignes ou « stripes ». De telles structures en bandes de charges, ou pour le moins analogues, ont déjà été observées dans des matériaux faiblement supraconducteurs mais jamais vraiment mis en évidence dans des matériaux qui le sont de façon « robuste ». On aurait donc là une preuve que ce type d'ordre apparaît chez tous les cuprates. Or, selon certains, plusieurs mécanismes produisant des structures dans les distributions de charges entreraient en compétition lors du changement de phase conduisant à l'apparition de la supraconductivité. On aurait donc identifié au moins un acteur du phénomène. Un pas de plus sur un long chemin...