La Deep Space Atomic Clock sera la première horloge atomique indépendante des mesures terrestres embarquée à bord de missions spatiales. Cet appareil miniaturisé offrira une précision et une stabilité inégalées. Son secret ? Des ions mercure plutôt que des atomes.
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« Une technologie qui va révolutionner l'exploration spatiale » : voilà comment la Nasa qualifie son nouveau bijou, la Deep Space Atomic Clock (DSAC), qui sera lancée le 24 juin 2019 depuis le Kennedy Space Center, en Floride. Cette horloge atomique miniaturisée, développée par le Jet Propulsion Laboratory à Pasadena, en California, sera « 50 fois plus précise » que les systèmes actuellement utilisés par les GPSGPS qui doivent se synchroniser deux fois par jour sur des horloges plus précises basées sur Terre. Ces dernières, de la taille d'un réfrigérateur, sont bien trop volumineuses et pas assez résistantes pour être envoyées dans l'espace. La DSAC n'est, pour sa part, « pas plus grosse qu'un grille-pain ».
Petit décalage, gros crash !
Ce sont aujourd'hui des horloges atomiques terrestres qui déterminent la position des sondes spatiales en mesurant le temps que met l'aller-retour du signal envoyé -- c'est le principe de fonctionnement du GPS. Or, plus la distance s'allonge, plus la marge d'erreur augmente. Même une erreur minime prend des proportions incroyables lorsqu'on parle de longues distances : un écart d'une nanoseconde (un milliardième de seconde) se transforme au bout de six semaines en une milliseconde, ce qui équivaut à une distance de 300 kilomètres ! De quoi provoquer un gros crash lors de l'atterrissage d'un rover. La nouvelle horloge atomique DSAC accusera, quant à elle, un décalage de moins d'une nanoseconde tous les 10 jours, soit une seconde tous les 10 millions d'années.
Horloge atomique : comment ça marche ?
Mais comment réussit-elle exactement à afficher de telles performances ? Pour faire simple, disons que les horloges atomiques reposent sur la différence d'énergieénergie (mesurée par la fréquencefréquence de la longueur d'ondelongueur d'onde) nécessaire à un électronélectron pour passer d'une couche de l'atomeatome à la couche supérieure. Cette fréquence est spécifique à chaque atome et invariable dans tout l'universunivers. La seconde est par exemple définie par la fréquence pour qu'un électron d'un atome de césiumcésium passe d'une couche à une autre.
Le problème est que la mesure de cette fréquence varie en fonction des chocs entre les atomes. Pour éviter ce phénomène et ralentir les atomes, il faut abaisser la température et la pressionpression au maximum ; c'est pourquoi les meilleures horloges atomiques actuelles sont constituées d'atomes refroidis à une température proche du zéro absoluzéro absolu (lire notre article ci-dessous). Mais cela ne résout pas pour autant le problème des chocs avec les parois du contenant des atomes. C'est donc ici que réside la principale innovation de la DSAC : plutôt que d'utiliser des atomes de mercuremercure, celle-ci contient des ionsions chargés positivement. Si la paroi est chargée positivement, les ions sont donc repoussés et sont confinés à l'intérieur. Cela évite aussi que les ions ne s'entrechoquent entre eux, et améliore la stabilité du système.
Vers des voyages de plus en plus lointains
La DSAC sera d'abord testée durant un an à bord du satellite OTB-1, qui sera lancé le 24 juin par la fusée Falcon Heavy de SpaceXSpaceX en compagnie d'une douzaine d'autres satellites gouvernementaux pour la Défense ou la Recherche. Si tout se passe bien, cette horloge révolutionnaire pourra ensuite être embarquée à bord des missions spatiales pour améliorer le calcul de distances... et envisager des voyages toujours plus lointains au-delà de notre Système solaireSystème solaire.
L’horloge atomique la plus précise du monde
Article de Nathalie MayerNathalie Mayer publié le 30/11/2018
L'horloge atomique est le moyen le plus précis que nous ayons de mesurer le temps qui passe. Aujourd'hui, des physiciensphysiciens annoncent avoir encore repoussé les limites de cette précision. Une prouesse qui devrait surtout servir à la science.
Dans la course à la précision, aujourd'hui, ce sont des physiciens du National Institute of Standards and Technology (NISTNIST - États-Unis) qui arrivent une fois de plus en tête. « L'incertitude, la stabilité et la reproductibilité peuvent être vues comme le flush royal -- la meilleure des mains au poker -- de la performance des horloges atomiques », explique Andrew Ludlow, le chef de projet. Et c'est bien simultanément dans ces trois domaines que les physiciens du NIST ont établi de nouveaux records.
1.000 atomes d’ytterbium refroidis à une température proche du zéro absolu et piégés dans des grilles optiques à une dimension créent par des faisceaux laserlaser pour une horloge atomique d'une précision inégalée :
- une incertitude de l'ordre de 10-18 ;
- une stabilité de l'ordre 10-19 ;
- une reproductibilité de l'ordre de 10-18.
Pourquoi une telle précision ?
Une précision difficile à appréhender, mais qui devrait servir, au moins à faire avancer la science. Car une telle horloge pourrait être à même de cartographier la distorsion de l'espace-tempsespace-temps comme jamais auparavant. Les chercheurs se mettent à rêver à une mesure ultra-précise -- à un centimètre près, contre plusieurs centimètres aujourd'hui -- de la forme de la Terre grâce aux effets de la gravitationgravitation sur le tic-tac de leur horloge.
Cette horloge atomique pourrait également servir à mettre en œuvre, plus largement, des tests de la théorie de la relativité généralerelativité générale. Selon les physiciens du NIST, le système pourrait aussi être suffisamment précis pour détecter des ondes gravitationnelles, voire même, un petit peu de cette matière noire qui continue d'échapper aux autres instruments.
En vidéo : l'horloge à atomes neutres la plus précise du monde !
Des physiciens viennent de réaliser l'horloge atomique basée sur des atomes neutres la plus précise du monde. Ils se rapprochent du record mondial détenu par une horloge basée sur des ions. La physiquephysique fondamentale pourrait en profiter mais aussi le GPS ou d'autres applicationsapplications.
Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 21/02/2008
Les chercheurs du JILA viennent de construire une horloge atomique qui ne prend qu'une seconde de retard en plus de 200 millions d'années. Elle est basée sur le piégeage par une série de faisceaux laser de plusieurs milliers d'atomes neutres de strontiumstrontium. La technique utilisée repose sur la formation d'un réseau optique. On utilise la même méthode lors de certaines expériences avec de la mélasse optique pour refroidir des atomes.
L'institut JILA appartient au National Institute of Standards and Technology (NIST) de Boulder qui possédait déjà une horloge atomique très précise mais qui fait appel à des atomes de césium dans une fontaine atomique. La nouvelle horloge réalisée est deux fois plus précise que celle au césium, qui reste stable pendant plus de 80 millions d'années avec une précision d'une seconde.
Pour mesurer les performances de l'horloge au strontium, on a utilisé une autre horloge atomique ultra-précise du NIST, mais basée sur des atomes neutres de calciumcalcium. Bien que moins précise, elle est suffisamment stable sur une échelle de temps courte pour mener à bien l'opération. En fait, le NIST dispose de différents types d'horloge atomique comme celles utilisant des atomes d'aluminiumaluminium, d'ytterbiumytterbium, de mercure, de calcium et de strontium.
L'horloge atomique la plus précise du monde est quant à elle basée sur l'usage d'un seul ion de mercure. C'est un physicien de NIST, Jim Bergquist, qui l'a construite et elle dévie de moins d'une seconde en 400 millions d'années.
Comme le montre la vidéo, pour construire leur horloge, les physiciens du JILA ont d'abord piégé et refroidi quelques milliers d'atomes neutres de strontium avec des lasers bleus puis les ont refroidis encore plus avec des lasers rouges pour former ensuite un réseau optique. Les atomes y ont été rassemblés pour former une série de « crêpes » (pancakes en anglais) à l'aide d'un laser en proche infrarougeinfrarouge. Des impulsions lasers sont alors envoyées pour provoquer des transitions périodiques entre deux niveaux d'énergies électroniques dans les atomes de strontium.
L'horloge obtenue devrait pouvoir être rendue aussi précise que celle basée sur un atome de mercure et, à terme, elle devrait être portable et donc d'un usage plus commun.
Disposant ainsi d'un formidable étalon de temps, les scientifiques pourront entreprendre de nouvelles recherches à la frontière des théories de la relativité et de la mécanique quantiquemécanique quantique. Des violations de l’invariance de Lorentz ou du principe d’équivalence seraient des découvertes majeures nous conduisant au-delà de la physique du modèle standardmodèle standard. On pourra poser de nouvelles bornes aux possibles variations dans le temps des constantes fondamentales comme la constante de structure fineconstante de structure fine, celle de la gravitation ou encore le rapport de la masse du proton à celle de l'électron. Des questions en rapport avec la décohérence, la non séparabilité et l'information quantique pourront aussi, peut-être, recevoir des réponses en utilisant cet outil.
En attendant ces avancées, plusieurs laboratoires font la course pour obtenir de nouvelles horloges atomiques plus performantes et plus pratiques.
Ce qu’il faut
retenir
- La nouvelle horloge atomique du Jet Propulsion Laboratory offrira une stabilité sans précédent aux missions spatiales, avec un décalage d’à peine une seconde tous les 10 millions d’années.
- Aujourd’hui, la mesure des distances dans l’espace s’effectue toujours avec des horloges atomiques basées à terre.
- Les scientifiques de la Nasa ont réussi à miniaturiser le système et à le rendre plus stable en utilisant des cations mercure qui n’interagissent pas avec les parois et entre eux.