Les rayons gamma à ultra hautes énergies semblent se déplacer plus facilement que prévu sur des distances cosmologiques. Cette énigme suggère à certains théoriciens l’existence de particules analogues à l’axion, bien connu en QCD. Couplées aux champs magnétiques des galaxies, ces hypothétiques particules rendraient compte de la surprenante transparence de l’Univers pour les photons gamma.

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    Deux géants du modèle standard de la physique des particules, les prix Nobel Franck Wilczek (à gauche) et Yoichiro Nambu (à droite). Crédit : Betsy Devine

    Deux géants du modèle standard de la physique des particules, les prix Nobel Franck Wilczek (à gauche) et Yoichiro Nambu (à droite). Crédit : Betsy Devine

    Les équations de la physique des particules sont dictées par des principes de symétries si puissants qu'ils imposent presque leur existence dans le monde réel. C'est en particulier le cas des équations de la chromodynamique quantique, la QCD, la théorie des interactions nucléaires fortes. La grandeur fondamentale qui définit une théorie quantique des champs relativistes possibles s'appelle un lagrangien. Dans le cas des interactions fortes entre quarksquarks transmises par l'analogue des photonsphotons, les gluonsgluons, deux termes devraient y être présents. Cependant, si le premier terme est bien constaté expérimentalement, le second ne l'est pas. Il conduit en effet à l'existence d'un moment dipolairemoment dipolaire électrique pour le neutronneutron... jamais observé.

    Pour éliminer l'influence de ce second terme, un autre champ de particules fut postulé. Remarquablement, il pouvait servir à expliquer la présence de la matière noire. Parce que l'introduction de cette nouvelle particule résolvait le problème dont était entachée la théorie de la QCD, le prix Nobel de physique Franck Wilczek la baptisa du nom d'une marque de lessive, axionaxion...

    Cette particule, que même le SoleilSoleil doit produire, doit être très légère et interagir très faiblement avec la matièrematière pour être passée inaperçue dans les expériences en accélérateurs. Toutefois, elle se manifesterait, si elle existait, par un phénomène remarquable. En envoyant un faisceau laserlaser en direction d'une paroi opaque devant laquelle règne un puissant champ magnétiquechamp magnétique, une partie des photons du laser se transformeraient en axions capables de traverser aisément la paroi pour ensuite être retransformés en photons éclairant un écran derrière la paroi. Des expériences de ce genre sont d'ailleurs en cours et la plus célèbre est PVLAS en Italie.

     
    Cliquez pour agrandir. Schéma illustrant le principe de l'expérience de PVLAS (voir les explications dans le texte). Crédit : universe-review

    La matière noirematière noire pourrait être constituée, au moins en partie, d'axions produits en grandes quantités dans les températures infernales du début de l'UniversUnivers observable. Mais l'axion pourrait servir à résoudre une autre énigme astrophysiqueastrophysique et cosmologique. En effet, on constate que des rayons gammarayons gamma à ultra hautes énergiesénergies ne sont pas rares dans les rayons cosmiquesrayons cosmiques.

    De tels rayons devraient être produits par des noyaux actifs de galaxiesnoyaux actifs de galaxies ou des sursautssursauts gamma à des distances cosmologiques. Le problème est que la QED, l'électrodynamique quantiqueélectrodynamique quantique, prédit que des photons gamma de si grandes énergies peuvent donner lieu, avec des photons du fond infrarougeinfrarouge ou à d'autres longueurs d'ondeslongueurs d'ondes, à la création de paire d'électronsélectrons et de positronspositrons.

    Les photons gamma traversent-ils les galaxies sous forme d'axions ?

    Le cosmoscosmos devrait donc plutôt être opaque pour les photons gamma à très hautes énergies, ce qui ne cadre pas avec les observations. En voyageant sur de longues distances cosmologiques, la probabilité d'une création de paires n'est pas négligeable et devrait conduire sur Terre à un faible flux de ces photons, plus faible que ce que l'on observe.

    Pour expliquer cette transparencetransparence trop élevée, deux groupes de physiciensphysiciens ont eu l'idée de faire intervenir la conversion des photons gamma en axions dans les champs magnétiques galactiques. Cela semble de prime abord résoudre le problème.

    De plus, des observations effectuées depuis le sol de gerbes de particules qui ont dues être produites par une particule neutre entrant en contact avec les atomesatomes de l'atmosphèreatmosphère, montrent des corrélations surprenantes avec les noyaux actifs de galaxie (NAG) et le champ magnétique de la Voie lactéeVoie lactée. Ces corrélations pointent clairement en faveur de l'influence de l'axion.

    En effet, les photons gamma seraient transformés une première fois en axions par leur passage dans le champ magnétique d'un NAG, lesquels seraient ensuite reconvertis en photons dans le champ magnétique de notre Voie lactée.

    L'idée et ces données expérimentales sont très intéressantes mais l'enthousiasme que l'on peut avoir est vite refroidi lorsque l'on prolonge les calculs. En effet, la massemasse de cet axion doit être inférieur à 10-7 eV et son couplage avec les photons si faible qu'il est lié à une échelle d'énergie inversement proportionnelle à 1010 GeVGeV. Ce qui est énorme...

    En clair, cet axion :

    - est trop léger pour expliquer à lui seul la matière noire,
    - se couple trop faiblement pour résoudre le problème de la QCD.

    Si elle résout le problème des photons gamma et si elle existe bien, alors la particule des articles de Malcolm Fairbairn, Dan Hooper et de leur collègues est à l'axion de Wilczek ce que le Canada Dry est au whisky...

    On ne devrait pas tarder à en savoir plus. En effet, le dispositif CastCast du CernCern doit atteindre bientôt la sensibilité lui permettant de détecter une particule ressemblant à l'axion mais expliquant uniquement l'énigme des photons gamma à ultra hautes énergies.