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Crédit : Marek Pfutzner
Ce n'est pas la première fois que les chercheurs observent la désintégration radioactive d'un isotope rare de fer 45Fe sous la forme exotiqueexotique de l'émission de deux protons. Déjà au début des années 2000 et là aussi en collaboration avec des chercheurs polonais, des expériences conduites au laboratoire français Ganil avaient démontré que ce noyau de fer particulier, composé de 26 protons et 19 neutrons, pouvait bien se désintégrer en émettant des protons.Toutefois, le processus exact n'était pas encore clairement élucidé. S'agissait-il de l'émission de protons isolés ou d'une forme liée, mais instable, appelée diproton ?
Pour le savoir, Marek Pfutzner et ses collègues de l'Université de Varsovie ont donc décidé de construire une caméra CCDCCD performante pour imager les produits de désintégration du 45Fe .
Il faut savoir que, contrairement au fer que l'on rencontre habituellement sur Terre, et qui est composé de 26 protons et 30 neutrons, cet isotope est instable. Ce qui veut dire que la caméra doit être associée à une chambre dans laquelle on envoie un faisceau de noyaux de 45Fe produit artificiellement avec le cyclotroncyclotron du NSCL.
Les caméras CCD sont bien connues des astronomesastronomes amateurs et sont d'un emploi courant en astronomie. Le satellite Corot, par exemple, en est équipé. Ce faisant, son utilisation en physiquephysique nucléaire est presque un retour aux sources, car les pionniers de cette discipline prenaient eux-aussi des images des trajectoires de particules, ou des impacts des désintégrations radioactives, mais sur des plaques photographiques.
La confirmation d'une théorie des années 1960
Lors des expériences, les noyaux de fer ont donc pénétré à la moitié de la vitesse de la lumièrevitesse de la lumière dans une chambre occupée par du gazgaz et au bout de laquelle était fixée la caméra CCD. L'ensemble a été baptisé le canon, en raison de sa ressemblance avec une pièce d'artillerie. Suite aux collisions, les noyaux étaient suffisamment ralentis pour qu'ils se désintègrent dans la chambre et que la caméra puisse prendre des images comme celle que l'on voit ci-dessous.
Les résultats obtenus confirment les théories de V.I. Goldansky et surtout de Leonid Grigorenko, deux chercheurs russes. Il s'agit bien d'émissions de protons isolés décrites par ce qu'on appelle une désintégration à trois corps. Les chercheurs sont enthousiastes car, en plus de donner de nouveaux renseignements sur la structure des noyaux et les forces nucléaires entre nucléonsnucléons dans ces conditions, cela permettrait aussi de mieux comprendre ce qui se passe à l'intérieur des étoiles à neutronsétoiles à neutrons.
Il est intéressant de mentionner que la technique utilisée ici n'est pas sans rappeler celle de la chambre proportionnelle multi-fils de Georges CharpakGeorges Charpak, équipant les détecteurs en physique des particules élémentairesphysique des particules élémentaires. Cependant, comme le dit Andreas Stol du NSCL : « C'est peut-être la première fois, en physique nucléaire moderne, qu'une information fondamentalement nouvelle au sujet des désintégrations radioactives est obtenue à partir d'une caméra numériquenumérique. Généralement, dans une expérience de physique nucléaire, on a juste des données numérisées provenant de différents équipements électroniques, mais jamais d'images. »
Enfin, la même technique a permis de mettre en évidence une autre radioactivitéradioactivité exotique, mais avec émission de 3 protons, comme le montre l'image ci-dessous.