Le graphène a maintenant un cousin, qui semble tout aussi prometteur pour la nanoélectronique. Son nom : le graphane. Prédit théoriquement, il vient d’être fabriqué par une équipe internationale comptant parmi ses membres les découvreurs du graphène. Selon certains chercheurs, il pourrait aussi servir à stocker efficacement de l’hydrogène.

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Un feuillet de graphane avec en rouge les atomes d'hydrogène. Crédit : Physicsworld

Un feuillet de graphane avec en rouge les atomes d'hydrogène. Crédit : Physicsworld

Nouveau venu en physique du solide, le graphène a été fabriqué une première fois en 2004 par deux physiciens de l'université de Manchester. A priori, il n'a rien d'extraordinaire puisque que le graphite de nos crayons n'est qu'un empilement de ces feuillets d'atomes de carbone organisés selon un réseau hexagonal. Toutefois, si l'on se rappelle que les nanotubes de carbone et les fullerènes ne sont que des feuillets de graphène enroulés, on commence à se douter de l'importance que ce dernier peut avoir.

Il a d'abord commencé par défier les théoriciens et le théorème de Mermin-Wagner, une forme rigoureuse d'un argument donné par le grand Landau et Rudolf Peierls, pour démontrer l'impossibilité d'un réseau cristallin à deux dimensions. Etroitement lié aux notions de symétries brisées, ce théorème d'impossibilité (« no go theorem » en anglais) semblait un obstacle insurmontable. Mais, là comme dans d'autres domaines, l'Univers n'en étant pas au courant il l'a fait avec le graphène ! En fait, si le feuillet est parcouru d'ondulations, il devient stable.

Andre Geim. Crédit : <em>Physicsworld</em>

Andre Geim. Crédit : Physicsworld

Les expérimentateurs ne tardèrent pas à lui trouver d'impressionnantes propriétés électroniques et de résistance mécanique à tel point qu'il est en train de devenir le remplaçant en puissance du silicium pour la nanoélectronique du futur. On devrait pouvoir réaliser grâce à lui des transistors plus petits et plus rapides.

Du graphène à hydrogène

Aujourd'hui, les deux co-découvreurs du graphène en 2004, Andre Geim et Kostya Novoselov, viennent d'étendre encore le champ des applications du graphène en trouvant le moyen de lui ajouter des atomes d'hydrogène. Par analogie avec les alcanes, les molécules de carbone hydrogénées comme le méthane ou le propane, on appelle ce nouveau matériau du graphane.

Kostya Novoselov Crédit : <em>Physicsworld</em>.

Kostya Novoselov Crédit : Physicsworld.

Ce matériau avait était prédit théoriquement il y a quelque temps par Jorge Sofo. La structure produite rappelle celle du diamant et comme on s'y attendait, le graphane est aussi un isolant. Les circuits électroniques sont des assemblages de conducteurs et d'isolants et il est intéressant de voir la perspective dans un avenir proche d'obtenir à volonté des composants de ce genre à partir d'un seul matériau de base. Les chercheurs pensent ainsi partir d'un feuillet de graphane qui pourrait être en quelque sorte gravé avec une pointe appropriée libérant les atomes d'hydrogène. On aurait ainsi de véritables circuits conducteurs en graphène tracés sur du graphane. Plus généralement, le graphane pourrait porter des zones conductrices, semi-conductrices et isolantes. On n'en est pas encore là...

En déposant des atomes d'hydrogène (blanc) sur un feuillet de graphène , on obtient, par leur fixation sur les atomes de carbone (noir), du graphane. Crédit : <em>Science</em>

En déposant des atomes d'hydrogène (blanc) sur un feuillet de graphène , on obtient, par leur fixation sur les atomes de carbone (noir), du graphane. Crédit : Science

Une autre application intéressante est que le processus de fixation des atomes d'hydrogène à l'aide d'un courant de gaz et de décharges électriques sur le graphène peut être inversé simplement en chauffant le graphane. En puissance, on aurait là un matériau permettant de stocker dans un faible volume de grandes quantités d'hydrogène facilement libérable. Ce serait donc une clé importante pour des voitures à hydrogène sûres et fiables.

Le problème est que si l'on peut fabriquer facilement de la poudre de graphène, des feuillets de quelques centimètres carrés coûtent des sommes astronomiques dépassant largement le million de dollars. On voit donc que de nombreux obstacles restent à surmonter avant que le graphène et le graphane ne deviennent réellement des matériaux providentielles de notre vie quotidienne.