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Le rêve de la colonisation de Mars semble plus vivant que jamais, même s'il reste toujours très problématique. Bien sûr Buzz Aldrin fait campagne en ce sens et même le prix Nobel de physique Gerard ‘t Hooft a affiché son soutien pour le projet Mars One. Pourtant, plusieurs percées technologiques restent encore à accomplir pour établir une base permanente sur la Planète rouge. À cet égard, un groupe de chercheurs des universités de Northumbria, à Newcastle, et d'Édimbourg (Royaume-Uni) a eu une idée simple et ingénieuse exposée en détail dans un article de Nature Communications.
Le problème anticipé est le suivant : les colons martiens auront besoin d'électricité. Ils pourraient utiliser des panneaux solaires mais encore faut-il les amener sur Mars car il ne sera pas question avant longtemps de les fabriquer sur place. À une distance d'environ 230 millions de kilomètres du Soleil, l'électricité solaire est, de plus, moins abondante sur la Planète rouge que sur Terre. L'idéal serait donc de pouvoir exploiter une source d'énergie proprement martienne. Il n'y a pas d'activité volcanique évidente en cours actuellement sur Mars. Même s'il y existe de l'eau, il est donc douteux que l'on puisse utiliser la géothermiegéothermie, à l'image des Islandais, pour subvenir aux besoins d'une base martienne.
Toutefois, les sondes Mars Reconnaissance OrbiterMars Reconnaissance Orbiter (MRO) et Mars Global Surveyor ont permis la découverte de « gullies » sur la Planète rouge. Il s'agit de ravines visiblement causées par des écoulements de liquides périodiques. Il semble clair aujourd'hui que ces liquides ne sont très probablement pas de l'eau mais proviendraient de la fonte de glace sècheglace sèche, la forme solidesolide du gaz carboniquegaz carbonique à basse température. Sur Terre on l'obtient en refroidissant du CO2 à une température de -78 °C. Sur Mars, on sait que cette glace carbonique existe et qu'elle est proche de son point de sublimationsublimation ce qui veut dire qu'il n'y a pas besoin de la chauffer beaucoup pour qu'elle passe à l'état gazeuxétat gazeux. Il y a là, comme on va le voir, une source potentielle d'énergie relativement abondante et facilement utilisable. Mais comment procéder à l'exploitation de cette ressource ?
Une gouttelette d'eau se vaporise rapidement sur une surface à 100 °C mais il n'en est plus de même au-dessus de 160 °C. Pour comprendre les commentaires en anglais de cette vidéo, il suffit de se reporter au texte ci-dessous. © Northumbria University, YouTube
Des dynamos basées sur l'effet Leidenfrost
C'est là que les ingénieurs ont eu une brillante idée : utiliser le phénomène de caléfaction (du latin calefacere : chauffer) comme expliqué dans la vidéo ci-dessus. De quoi s'agit-il ? Lorsqu'un liquide se trouve sur une surface chauffante dont la température est quelque peu supérieure à sa température d'ébullition, il se forme une couche de vapeur entre cette surface et le liquide qui l'isole thermiquement. Au XVIIIe siècle, le médecin allemand Johann Gottlob Leidenfrost avait décrit et observé le phénomène : alors que des gouttes d'eau s'étalent et s'évaporent lentement sur une surface en dessous de 100 °C et qu'elles s'évaporent rapidement un peu au-dessus, il n'en est plus de même lorsque la température de la surface dépasse environ 160 °C. On obtient alors ce qu'on appelle désormais l'effet Leidenfrost : des gouttes d’eau qui ne disparaissent pas aussi rapidement mais qui glissent sur une plaque chauffante dont elles sont isolées par une fine couche de vapeur de 0,1 mm d'épaisseur.
Comme le montre la vidéo de l'université de Northumbria, il est possible de fabriquer une surface particulière sur laquelle une goutte d'eau se déplacerait en effectuant un mouvementmouvement circulaire. L'effet Leidenfrost peut même être mis à contribution pour entraîner la rotation d'un disque métallique en suspension sur de l'eau, au-dessus d'une plaque chauffante. Si l'on place un aimantaimant sur ce disque on obtient alors la base d'une dynamodynamo. Il est possible de faire de même avec de la glace carboniqueglace carbonique qui se sublime. Comme le disque est en lévitation, les frottements sont aussi réduits, ce qui augmente le rendement.
Théoriquement, la glace carbonique martienne pourrait donc être utilisée pour produire de l'électricité du fait qu'elle peut facilement se sublimer dans les conditions existantes sur Mars. Par ailleurs, il n'est pas besoin de beaucoup d'énergie lumineuse pour la vaporiser, comme c'est le cas sur Terre avec de l'eau ou de la glace ordinaire. Voilà qui intéressera certainement les membres du projet Mars One.