Quelques cyanobactéries, une dose de soleil et un peu d’eau. C’est presque tout ce qu’il a fallu à des chercheurs pour alimenter un microprocesseur pendant plusieurs mois. Pas de quoi, encore, brancher nos voitures électriques sur des « algues bleues ». Mais peut-être bien la vague d’objets connectés qui déferle sur le marché…


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    Les cyanobactériescyanobactéries intéressent les chercheurs, entre autres pour leurs capacités à fixer le carbone et l'azote. Mais aussi pour leur aptitude à la photosynthèsephotosynthèse. Synechocystis est l'une d'entre elles. Une « algue bleue » -- alguealgue entre guillemets parce que dans le fond, une cyanobactérie n'est pas réellement une algue -- très répandue et non toxique. Et des chercheurs de l’université de Cambridge (Royaume-Uni) viennent de réussir, grâce à elle, de l'eau et à un peu de lumière du soleil, à alimenter un microprocesseurmicroprocesseur en continu pendant plusieurs mois -- et ce n'est pas fini.

    Le système qu'ils ont conçu n'est pas plus grand qu'une pile AA. Il est fait de matériaux courants, peu coûteux et largement recyclables. Et contrairement à une batterie, il ne se décharge pas. Puisque les « algues bleues » qu'il renferme récoltent continuellement la lumière du soleil par photosynthèse pour générer un courant. Le tout avec le concours d'une simple électrode en aluminiumaluminium.

    Le système de production d’électricité à base d’<em>« algues bleues »</em> mis au point par des chercheurs de l’université de Cambridge (Royaume-Uni) fonctionne sous lumière naturelle, avec les fluctuations de températures associées et pendant au moins six mois sans intervention extérieure. © Paolo Bombelli, Université de Cambridge 
    Le système de production d’électricité à base d’« algues bleues » mis au point par des chercheurs de l’université de Cambridge (Royaume-Uni) fonctionne sous lumière naturelle, avec les fluctuations de températures associées et pendant au moins six mois sans intervention extérieure. © Paolo Bombelli, Université de Cambridge 

    De l’électricité photovoltaïque même dans l’obscurité

    Les chercheurs observent que même lorsque le soleil est couché, les « algues bleues » semblent continuer à transformer une partie de leur nourriture. Générant ainsi un courant électriquecourant électrique même dans l'obscurité. Un courant qui reste toutefois modeste en l'état actuel des travaux.

    Mais de tels systèmes à base d'« algues bleues » devraient suffire à alimenter l'Internet des objets. Tous ces petits objets connectés -- des montres intelligentes, des capteurs de températurecapteurs de température, etc. -- qui n'ont besoin que d'une faible quantité d'énergieénergie pour fonctionner. Les experts estiment qu'ils pourraient être des milliards sur le marché d'ici 2035. Et les alimenter à l'aide de batteries lithium-ion, même si elles sont chargées par énergie solaire, pourrait finir par coûter cher en ressources à notre Planète. Trois fois plus de lithiumlithium que ce qui est produit actuellement dans le monde, notamment.


    Des algues pour capter l'énergie solaire ?

    Plusieurs laboratoires explorent la piste de la photosynthèse artificielle pour exploiter l'énergie du Soleil. Un groupe d'ingénieurs de l'Université de Stanford a presque pris le contre-pied des travaux existants en utilisant... la photosynthèse naturelle. De l'électricité a été produite directement par des algues.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 22/04/2010

    Image d'algues vertes <em>Chlamydomonas</em> prises en microscopie électronique à balayage. Crédit : domaine public
    Image d'algues vertes Chlamydomonas prises en microscopie électronique à balayage. Crédit : domaine public

    Voilà des années que l'on tente d'exploiter l'énergie solaire de multiples manières. C'est un problème de plus en plus urgent pour répondre au besoin énergétique de la population mondiale croissante alors que les énergies fossilesénergies fossiles s'épuisent et que les problèmes environnementaux s'amplifient. Le projet Iter a bien sûr été lancé mais les problèmes posés par la fusion contrôléefusion contrôlée sont redoutables et il faudra encore des dizaines d'années pour les surmonter.

    De nombreuses recherches tentent actuellement d'améliorer le rendement des cellules photovoltaïquescellules photovoltaïques et de faire baisser les coûts de production. Certains cherchent à imiter les réactions de photosynthèse des cellules végétales, ou s'en inspirent, pour réaliser une photosynthèse artificielle productrice d'énergie. On peut citer par exemple les travaux du groupe de chercheurs du MIT tentant de produire de l'énergie avec l'aide d'un virus ou ceux d'ingénieurs de l'université de Cincinnati, qui, curieusement, ont trouvé l'inspiration chez la grenouille.

    Un groupe de chercheurs de l'Université de Stanford est parvenue à faire quelque chose de remarquable. Comme viennent de l'expliquer les ingénieurs dans un article publié dans Nano Letters, ils sont parvenus à exploiter directement les courants d'électronsélectrons produits par la conversion des photonsphotons solaires à l'intérieur des cellules vivantes d'algues unicellulaires, des Chlamydomonas.

    Le changement d'échelle sera difficile

    Pour ce faire, il a fallu réaliser un petit exploit : plonger des électrodes en or à l'intérieur même des chloroplasteschloroplastes. C'est précisément dans ces organitesorganites (équivalents des organes pour une cellule) que les photons sont captés par les cellules, leur énergie étant convertie en courant d'électrons.

    Les courants extraits par les chercheurs de chacune des cellules sont bien sûr très faibles, de l'ordre de un pico-ampèreampère, soit un millionième de millionième d'ampère. Il faudrait mille milliards de cellules pour produire en une heure l'énergie stockée dans une seule pile AA standard. En outre, les électrodes menacent l'intégritéintégrité des cellules vivantes qui meurent assez vite et il faudrait mettre au point des électrodes moins létales.

    Toutefois, la méthode pourrait être prometteuse car l'efficacité du processus de conversion de l'énergie solaire est déjà de 20 % dans les expériences menées et les chercheurs estiment qu'il n'y a pas de raison qu'il soit impossible d'atteindre des rendements proches de 100 %.

    Il ne semble tout de même pas évident de réaliser la même prouesse à grande échelle, ce qui serait de toute façon nécessaire pour concurrencer les cellules photovoltaïques classiques dont les rendements oscillent entre 20 et 40 %.