C’est un buzz difficilement compréhensible qui s’est développé autour d’une intéressante expérience de physique publiée dans le journal Nature. Présentée comme système d'invisibilité temporelle, la performance serait probablement restée... invisible si la célèbre Defense Advanced Research Project Agency n’avait participé au financement. Au mieux, la découverte ne devrait concerner que les réseaux de communication par fibre optique.

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    L'espoir de disposer dans un avenir proche de la cape d'Harry Potter, ou bien plus sérieusement du dispositif d'invisibilité de Ghost in the shell, est devenu particulièrement vif il y a environ 6 ans lorsque que l'on a annoncé l'obtention d'une certaine invisibilité grâce à des métamatériaux.

    L'exploit n'était alors possible qu'avec des micro-ondes mais on s'est progressivement rapproché du domaine visible. Force est de constater qu'en 2012, on n'y est toujours pas vraiment arrivé... Il faudra peut-être attendre la réalisation de la mythique singularité technologique à l'horizon 2030-2040 pour voir émerger de véritables dispositifs comme ceux que l'on voit dans le célèbre manga de Masamune Shirow. D'ailleurs, dans son adaptation en dessin animé, les aventures du major Motoko Kusanagi se passent effectivement dans les années 2030.

    Aujourd'hui, on parle beaucoup d'un article récemment publié dans Nature. Les titres font rêver : « Dispositif d'invisibilité temporelle » et même « Camouflage spatiotemporel ». De plus, ce qui ajoute un zeste de sensationnalisme, les auteurs de l'article ont réalisé leurs recherches grâce à des financements de la Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency)), la célèbre organisation chargée de la recherche et développement des nouvelles technologies destinées à un usage militaire aux États-Unis. 

    Le schéma du principe du camouflage spatiotemporel. Les explications sont dans le texte. © Martin McCall et Paul Kinsler

    Le schéma du principe du camouflage spatiotemporel. Les explications sont dans le texte. © Martin McCall et Paul Kinsler 

    Pourtant, il ne s'agit que de la mise en application concrète d'un article publié l'année dernière dans Journal of Optics et qui, bien que médiatisé, n'avait pas fait l'objet d'un tel engouement.

    L'idée derrière ce dispositif de camouflage spatiotemporel est facile à comprendre à l'aide du diagramme d'espace-temps ci-dessus. En abscisse, l'axe des x représente l'espace et en ordonnée, l'axe des y représente une date multipliée par la vitesse de la lumière dans le vide. Des rayons lumineux se déplaçant à vitesse constante de la gauche vers la droite sont représentés par des droites de pente constante, proportionnelle à la vitesse de la lumière dans le milieu. Dans un milieu où elle varie, la pente changera, les plus faibles vitesses rapprochant la ligne de l'horizontale.

    Au final, comme le montre le schéma, de tels rayons lumineux dans un milieu approprié peuvent contourner une région de l'espace-temps - le disque rouge - de sorte qu'un événement de courte duréedurée aura été complètement caché dans le domaine optique où se trouvent les rayons lumineux pour des observateurs.

    Un dispositif d’invisibilité surtout temporel et non spatial

    Il ne s'agit donc clairement pas d'un dispositif d'invisibilité comme on en rêve. Pour une cape à la Harry Potter, ou la combinaison de camouflage thermo-optique de Motoko Kusanagi, on aurait sur le diagramme d'espace-temps un camouflage spatial qui se traduirait, non pas par un disque mais par une longue bande rouge légèrement inclinée par endroits. 

    On peut donc qualifier ce dispositif de système d'invisibilité temporelle. En pratique, cela revient à couper une fraction de seconde une caméra de surveillance en laissant donc un trou dans l'enregistrement. D'ailleurs, dans l'expérience réalisée par les chercheurs avec un dispositif basé sur une fibre optique, la durée pendant laquelle des événements sont camouflés (l'équivalent du disque rouge) n'est que de l'ordre de la picosecondepicoseconde, c'est-à-dire un millième de milliardième de seconde. On peut certes imaginer augmenter cet intervalle de temps mais clairement, il s'agira toujours d'un événement de l'espace-temps de courte durée.

    En fait, comme les chercheurs le reconnaissent, leur travaux devraient surtout concerner la transmission et le traitement optique des données.