L’altimétrie spatiale ne cesse de s’améliorer. Cette technique d’observation qui consiste à mesurer la hauteur des mers, c’est-à-dire la mesure de la variation de hauteur de la surface de l’eau par rapport à une référence qui est généralement le géoïde, s’améliore grandement avec l’altimétrie interférométrique. Le futur satellite Swot, une mission du Cnes et de la Nasa conçue par Thales Alenia Space, en sera doté. Son lancement est prévu en 2020.
Le satellite Swot et les instruments qu’il embarquera. © Cnes, D. Ducros

Le satellite Swot et les instruments qu’il embarquera. © Cnes, D. Ducros

Le satellite Swot est une mission d'altimétrie spatiale du Cnes et de la Nasa qui sera construit par Thales Alenia Space. Il sera mis en orbite en 2020 par un lanceur fourni par l'agence spatiale américaine : soit l'Antares d'Orbital Sciences, le Falcon 9 de SpaceX ou l'Atlas V d'Ula.

Cette mission qui s'inscrit dans la continuité de  Jason-1-2-3, est destinée à l'étude de la topographie des océans et des eaux de surface continentales, lacs et cours d'eau, le débit des rivières et de déterminer de façon à la fois très fine et très précise le niveau des océans. Swot donnera également accès à la compréhension des mécanismes dits mésoéchelles (tourbillons de quelques dizaines de km) et à l'étude de la circulation côtière qui est indétectable avec des systèmes d'altimétrie classiques.

Pour cette mission, Thales Alenia Space développera une plate-forme de nouvelle génération qui permettra, pour la première fois, une rentrée contrôlée dans l'atmosphère du satellite en fin de vie conformément à la Loi relative aux opérations spatiales (Los). En effet, compte tenu de la masse du satellite, certains de ses éléments sont susceptibles de ne pas se détruire dans l'atmosphère si il devait effecteur une rentrée naturelle. Notez que pour cette manœuvre, Swot utilisera 85 % des ergols qu'il embarque.

Vue qui illustre la différence de couverture des deux types de systèmes altimétriques. © Cnes

Vue qui illustre la différence de couverture des deux types de systèmes altimétriques. © Cnes

D'une masse au lancement de deux tonnes, Swot sera positionné sur une orbite répétitive à 21 jours, non héliosynchrone à 890 km d'altitude, inclinée à 77,6° ; la même que celle des satellites Jason pour assurer les intercomparaisons métrologiques indispensables à la continuité et à la pérennité des mesures comme le niveau moyen des mers.

Deux instruments innovants

La charge comprend deux instruments nommés KaRIn et Nadir. L'instrument KaRIn (Ka-band Radar INterferometer, radar interféromètre en bande Ka), fabriqué par le JPL, comporte deux antennes SAR en bande Ka positionnées avec précision tout en étant éloignées de 10 mètres l'une de l'autre. Elles offrent une observation bidimensionnelle de 120 km de large, avec une résolution horizontale de l'ordre de 50-100 m, programmable de part et d'autre de la trace. Elles assurent ainsi une couverture des lacs, des rivières, réservoirs et océans de la Terre à raison de deux fois tous les 21 jours. Thales Alenia Space propose également la fourniture du RFU (Radio Frequency Unit), qui est au cœur de cet instrument.

Le module Nadir est, quant à lui, constitué des mêmes instruments que ceux des satellites Jason parmi lesquels l'altimètre à double fréquence Poseidon fabriqué par Thales Alenia Space. Par ailleurs, le module Nadir embarque le système Doris -- fabriqué par Thales -- pour l'orbitographie de précision, ainsi qu'un radiomètre micro-onde AMR (Advanced Microwave Radiometer), la charge utile de localisation GPSP et un ensemble de réflecteurs lasers LRA (Laser Retro-reflector Array) réalisés par le JPL.

Mesures hydrologiques et océanographiques

À la différence des précédents altimètres spatiaux, Swot se différencie par l'emport d'un radar interféromètre en bande Ka dont les deux antennes et les deux voies de traitement donnent accès à la mesure interférométrique. Mesures impossibles à réaliser par des instruments SAR classiques à bord des satellites Sentinel 1 et Radarsat par exemple. En altimétrie classique, la hauteur est calculée en observant simplement le temps de propagation de l'onde radar alors qu'en interférométrie radar, on mesure une différence de phase (par triangulation) grâce à l'utilisation de deux antennes espacées (d'où les contraintes de stabilité extrêmes de l'ordre de 1 micromètre à 5 mètres).

De plus, alors que l'altimétrie classique fournit des données ponctuelles le long de profils espacés de plusieurs centaines de kilométriques, l'altimétrie interférométrique fournit, elle, une image bidimensionnelle. Sa résolution horizontale est également fortement améliorée, de l'ordre de 50 mètres pour les produits hydrologiques, et de un kilomètre pour les produits océaniques traités à bord.

L'interférométrie permet de s'affranchir des problèmes de l'altimétrie conventionnelle sur les surfaces continentales, à savoir les problèmes de réflexions parasites dues aux sols secs, à la végétation et au relief. Alors que les altimètres classiques détectent très mal les eaux continentales, Swot aura la capacité de cartographier et mesurer 65 % des surfaces d'eau douce dans le monde.