Les comètes du Système solaire libèrent des atomes lourds dans des conditions où l'on pensait que ce ne serait pas le cas, ce qui a des implications encore mystérieuses sur la cosmogonie planétaire. Remarquablement, la comète interstellaire 2I/Borisov fait de même, ce qui implique une certaine universalité de cette cosmogonie.


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    Au début du XIXe siècle, le philosophe français Auguste Comte (allez visiter son appartement devenu musée à Paris, c’est émouvant), formé à l'École polytechnique et donc parfaitement capable de lire dans les textes les traités de Lagrange et Laplace en mathématique et en mécanique céleste, contemporain d'Ampère, Arago, Fresnel et Fourier pour ce qui concerne la physique, pensait que l'on ne connaîtrait jamais la composition physique et chimique du Soleil et des étoiles, car on ne pourrait jamais s'y rendre pour prendre des échantillons de matière.

    Il se trompait, malgré sa maîtrise encyclopédique de toutes les sciences de son temps. De son vivant, l'astrophysiqueastrophysique naissait. Déjà avec les travaux d'Arago sur la polarisation de la lumièrelumière, comme Futura l'expliquait dans le précédent article ci-dessous, mais surtout après sa mort avec la découverte de l’analyse spectrale par Kirchhoff et Bunsen vers 1860.

    Cette nouvelle science allait donner des cauchemars à une partie de l'Humanité dans la nuit du 18 au 19 mai 1910. Désinformés par une partie des médias de l'époque et malgré les précisions rassurantes des astronomesastronomes et astrophysiciensastrophysiciens d'alors, beaucoup attendaient la mort par empoisonnement en raison du passage supputé de la Terre à travers la queue de la comètequeue de la comète de Halley. En effet, les analyses spectroscopiques avaient démontré qu'il y avait des moléculesmolécules de cyanogène dans cette queue. Découverte en 1815 par le chimiste Louis Joseph Gay-Lussac, on savait qu'elle pouvait se comporter comme un gaz très toxique.

    Heureusement, il était clair et à raison pour les scientifiques que le cyanogène allait se décomposer dans la haute atmosphèreatmosphère, écartant tout danger. Finalement, la Terre n'a pas croisé la queue de la comète comme on l'avait pensé, à cause d'erreurs de calcul.


    Cette vidéo débute par une animation de la comète C/2016 R2 (PANSTARRS), réalisée à partir d'images couleur prises avec un des télescopes SPECULOOS installés à l'Observatoire de Paranal de l'ESO. La vidéo fait ensuite un zoom sur le noyau de cette comète. Dans une nouvelle étude réalisée avec l'instrument UVES du Very Large Telescope de l'ESO, une équipe belge a repéré des atomes de métaux lourds dans l'atmosphère des comètes, une découverte illustrée à la fin de la vidéo. On y voit le spectre de la comète C/2016 R2 et notamment les raies du fer neutre (FeI, bleu) et du nickel neutre (NiI, orange), marquant la présence de ces deux éléments dans l'atmosphère de la comète. © ESO/L. Calçada/M. Kornmesser, SPECULOOS Team/E. Jehin, Manfroid et al.

    L'analyse de la composition chimique des comètes se poursuit encore de nos jours, par exemple avec la radioastronomie, mais elle peut se faire dans plusieurs bandes spectrales comme vient de le montrer à nouveau aujourd'hui une équipe d'astrophysiciens belge qui a utilisé les données de l'instrument UVES (UltravioletUltraviolet and Visual Echelle Spectrograph) du VLT de l'ESOESO, comme elle l'explique dans un article (Nature, Manfroid et al).

    C'est ce que montre également et au même moment une équipe polonaise menée par Piotr Guzik, de l'université Jagellonne (Kraków, en Pologne), qui a publié un article consacré aux mesures faites à l'aide du spectrographespectrographe X-shooter du VLT de l'ESO lors du passage au périhéliepérihélie de la comète interstellaire 2I/Borisov, il y a environ un an et demi (Nature, Guzik and Drahus).

    Une source inconnue d'atomes lourds dans les comètes

    Dans le communiqué de l'ESO au sujet de ces deux articles, on trouve plusieurs commentaires des chercheurs au sujet des résultats qu'ils présentent aujourd'hui. Ainsi, Jean Manfroid de l'université de Liège, en Belgique, déclare-t-il : « Ce fut une grande surprise de détecter des atomesatomes de ferfer et de nickelnickel dans l'atmosphère de toutes les comètes que nous avons observées au cours des deux dernières décennies, soit une vingtaine d'entre elles, et même dans celles éloignées du Soleil, dans le froid de l'espace. »

    Pour bien comprendre de quoi il en retourne il faut savoir qu'en soit la découverte de la signature spectrale de ces éléments lourds dans le dégazagedégazage de comètes n'était pas forcément inattendue. On savait que les poussières et les roches présentes dans les comètes en contenaient, tout comme l'atmosphère du Soleil et beaucoup de météoritesmétéorites où l'on mesure d'ailleurs en rapport d'abondance dix fois plus de fer que de nickel. Mais, ce qui est surprenant, c'est que les astronomes belges ont mis en évidence la présence de ces éléments alors que les comètes étaient observées dans des régions froides du Système solaireSystème solaire, en l'occurrence à plus de 480 millions de kilomètres de notre étoile, soit plus de trois fois la distance Terre-Soleil.

    Cette image présente une comète située à l’extérieur du Système solaire : la comète C/2016 R2 (PANSTARRS). Comme son nom l’indique, la comète a été découverte en 2016 par les télescopes Pan-STARRS à Hawaï. Cette nouvelle image a été capturée par un projet basé à l’observatoire Paranal de l’ESO au Chili, intitulé <em>Recherche de planètes habitables qui transitent autour d’étoiles ultra-froides</em> (<em>The Search for habitable Planets EClipsing ULtra-cOOl Stars, </em>en anglais) – ou SPECULOOS. L'image présentée ici a été prise le 18 janvier 2018 lorsque la comète était à 2,85 UA du Soleil (1 AU est la distance Terre-Soleil) et lorsqu'elle voyageait vers l’intérieur du Système solaire. Cette comète est particulièrement intéressante en raison des rares composés et molécules que les scientifiques ont détectés dans sa chevelure : le monoxyde de carbone et les ions azote. Ces composés donnent à la comète des lignes d'émission bleues distinctives, à tel point qu'on la surnomme « la comète bleue ». © ESO/SPECULOOS Team/E. Jehin
    Cette image présente une comète située à l’extérieur du Système solaire : la comète C/2016 R2 (PANSTARRS). Comme son nom l’indique, la comète a été découverte en 2016 par les télescopes Pan-STARRS à Hawaï. Cette nouvelle image a été capturée par un projet basé à l’observatoire Paranal de l’ESO au Chili, intitulé Recherche de planètes habitables qui transitent autour d’étoiles ultra-froides (The Search for habitable Planets EClipsing ULtra-cOOl Stars, en anglais) – ou SPECULOOS. L'image présentée ici a été prise le 18 janvier 2018 lorsque la comète était à 2,85 UA du Soleil (1 AU est la distance Terre-Soleil) et lorsqu'elle voyageait vers l’intérieur du Système solaire. Cette comète est particulièrement intéressante en raison des rares composés et molécules que les scientifiques ont détectés dans sa chevelure : le monoxyde de carbone et les ions azote. Ces composés donnent à la comète des lignes d'émission bleues distinctives, à tel point qu'on la surnomme « la comète bleue ». © ESO/SPECULOOS Team/E. Jehin

    La température est alors bien trop basse pour que des métauxmétaux comme le fer ou le nickel se subliment en passant de l'état solideétat solide à l'état gazeuxétat gazeux. Comment rendre compte de ces observations ? Voilà ce qu'en dit, toujours dans le communiqué de l'ESO, Damien Hutsemékers, également membre de l'équipe belge de l'université de Liège : « Habituellement, le fer est dix fois plus abondant que le nickel, et dans les atmosphères de ces comètes nous avons trouvé à peu près la même quantité pour les deux éléments. Nous sommes arrivés à la conclusion qu'ils pourraient provenir d'un type particulier de matériaumatériau à la surface du noyau de la comète, se sublimant à une température assez basse et libérant du fer et du nickel dans des proportions à peu près identiques. »

    Un scénario universel pour les comètes ?

    Reste à déterminer lequel, et on peut espérer que c'est ce que permettra de faire l'instrument METIS (Mid-infrared ELTELT Imager and Spectrograph) du prochain Extremely Large Telescope (ELT) de l'ESO. On disposera alors d'une information supplémentaire nous permettant d'éclairer les processus à l'origine de la cosmogonie planétaire.

    Mais venons-en maintenant à ce qui est probablement la découverte la plus intéressante et que l'on doit aux chercheurs polonais. Il se trouve que la comète interstellaire 2I/Borisov a aussi dégazé du nickel et également alors qu'elle se trouvait dans des régions froides du Système solaire, à quelque 300 millions de kilomètres du Soleil, soit environ deux fois la distance Terre-Soleil !

    « Au début, nous avions du mal à croire que le nickel atomique pouvait réellement être présent dans l'atmosphère de 2I/Borisov si loin du Soleil. Il nous a fallu de nombreux tests et vérifications avant de pouvoir nous en convaincre », explique à son tour dans le communiqué de l'ESO l'astrophysicien Piotr Guzik. « Tout à coup, nous avons compris que le nickel est présent dans les atmosphères cométaires dans d'autres coins de la GalaxieGalaxie... Imaginer maintenant que les comètes de notre Système solaire aient leurs véritables analogues dans d'autres systèmes planétaires : c'est vraiment génial », ajoute son collègue et coauteur Michał Drahus, de l'Université Jagellonne.

    Voilà des éléments de plus pour construire une cosmogonie comparée des systèmes planétaires après la planétologie comparée rendue possible dans le Système solaire par l'ère spatiale.


    La comète interstellaire Borisov est la comète la plus primitive jamais découverte

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 04/04/2021

    De précédentes études concernant  la comète interstellaire 2I/Borisov avaient montré qu'elle était atypique par rapport aux comètes du Système solaire. Mais, finalement, en utilisant le phénomène de polarisation de la lumière, on a découvert qu'elle ressemblait à la comète Hale-Boop. Cela a des implications sur l'histoire passée et l'origine de 2I/Borisov.

    On fait souvent remonter la naissance de l'astrophysique, qui se distingue de l'astronomie fondée uniquement sur des mesures d'angles et de temps sur la voûte céleste, à la découverte des principes de la spectroscopie par Kirchhoff et Bunsen vers 1860. Mais en fait, elle prend naissance presque 50 ans plus tôt avec les travaux sur la polarisation du Français François Arago qui vont lui permettre pour la première fois d'avoir des renseignements sur la physique des corps célestes. Dès le début des années 1810 il détermine ainsi, en étudiant la polarisation de la lumière du Soleil, que sa surface ne peut être celle d'un solide ou d'un liquideliquide chauffé mais qu'elle est forcément à l'état gazeux, ce qui relève bien de la physique et pas de l'astronomie. Il fera également des observations concernant la lumière de la LuneLune.

    L'étude de la polarisation des ondes lumineuses va ensuite se poursuivre car on peut l'utiliser pour avoir des renseignements sur les minérauxminéraux des roches et sur la structure des molécules. On s'en sert également depuis longtemps pour étudier les surfaces planétaires comme on peut s'en rendre compte en lisant l’article consacré à ce sujet par l'astrophysicien Audouin Dollfus, découvreur de Janus, qui avait déterminé de cette manière, et le premier, que la surface de Mars devait contenir un oxyde de fer.

    Une illustration beaucoup plus récente de l'intérêt toujours moderne de l'étude de la polarisation de la lumière des astresastres en astrophysique a été fournie par la collaboration EHT qui a obtenu des renseignements sur les champs magnétiques associés au trou noir supermassif M87* et à son disque d’accrétion.

    De la polarisation de la lumière des planètes à celles des comètes

    Pas en reste, des astrophysiciens font savoir aujourd'hui via deux publications respectivement dans Nature Communications et Nature Astronomy qu'ils ont fait des découvertes intéressantes sur la composition et l'origine de la fameuse comète interstellaire 2I/Borisov, qui avait été identifiée par l'astronome amateur Gennady Borisov en août 2019. Elles proviennent de l'analyse de données qui ont été collectées à l'aide du Very Large TelescopeVery Large Telescope de l'Observatoire européen austral (le VLT de l'ESO) et de l'Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (Alma), un autre instrument de l'ESO. Dans le premier cas, ces informations ont été obtenues par polarimétrie justement, c'est-à-dire en étudiant la lumière polarisée émise par la surface de la comète.


    De nouvelles observations réalisées à l'aide du Very Large Telescope de l'Observatoire européen austral (VLT de l'ESO) indiquent que la comète 2I/Borisov, qui n'est que le deuxième visiteur interstellaire détecté récemment dans notre Système solaire, est l'une des plus « pures » jamais observées. Cette vidéo résume les nouvelles découvertes sur ce mystérieux visiteur extraterrestre. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © European Southern Observatory (ESO)

    Ce faisant, ces astrophysiciens se posent en dignes héritiers d'Arago puisque lui-même avait pavé le chemin en étudiant la polarisation de la lumière de la comète C/1819 N1 Tralles, en 1819, et celle de la comète de Halley, en 1835.

    Ils profitaient également des travaux passés de leurs collègues qui avaient fait de même avec d'autres comètes. En l'occurrence, c'est la comparaison avec les polarisations obtenues concernant la comète C/1995 O1, alias la célébrissime Hale-Bopp, qui a été particulièrement intéressante. En effet, la polarisation de la lumière émise par 2I/Borisov différait de toutes celles des autres comètes à l'exception de celle de Hale-BoppHale-Bopp qui s'est avérée similaire.

    Or, Hale-Bopp est une comète longue période et sa différence avec toutes ses cousines avait suggéré qu'elle n'était passée qu'une seule fois proche du Soleil il y a des milliers d'années. Sa composition aurait donc été que peu modifiée par le rayonnement et le vent solairevent solaire, en faisant un témoin particulièrement précieux de la matière primitive avant qu'elle ne s'effondre pour donner le disque protoplanétairedisque protoplanétaire du Système solaire.

    En suivant le même raisonnement, les astrophysiciens pensent que la comète interstellaire n'était jamais passée près d'une étoile avant de frôler le Soleil en 2019. Elle doit donc, elle aussi, garder la mémoire du nuagenuage de gaz et de poussière où elle est née et qui a dû donner également une ou plusieurs protoétoilesprotoétoiles. Le fait que 2I/Borisov soit aussi proche de Hale-Bopp laisse donc penser que la nébuleusenébuleuse primitive à l'origine de notre Système solaire avait probablement une composition très similaire, ce qui laisse songeur quant à l'universalité des conditions favorables à l'apparition de la vie dans la Voie lactéeVoie lactée.

    C'est bien ce qu'explique Alberto Cellino, de l'Observatoire d'astrophysique de Turin, Institut national d'astrophysique (INAF), Italie, coauteur de l'étude, dans le communiqué de l'ESO annonçant les deux articles : « Le fait que les deux comètes soient remarquablement similaires laisse supposer que l'environnement dans lequel 2I/Borisov a vu le jour n'est pas si différent, en matière de composition et de l'environnement des débuts du Système solaire. »

    Son collègue OlivierOlivier Hainaut, astronome à l'ESO en Allemagne, qui étudie les comètes et d'autres objets géocroiseursgéocroiseurs mais qui n'a pas participé à cette découverte en convient également, toujours dans le même communiqué : « Le résultat principal - à savoir que 2I/Borisov ne ressemble à aucune autre comète à l'exception de Hale-Bopp - est très fort. Il est très plausible qu'elles se soient formées dans des conditions très similaires. »

    Les comètes interstellaires, des clés pour la cosmogonie comparée

    Autant dire qu'il serait du plus haut intérêt pour mieux comprendre la formation des planètes que d'étudier de plus près une autre comète interstellaire, ce qui pourrait être accompli au moyen de la mission de l'ESAESA qui est à l'étude : Comet Interceptor.

    Les données collectées avec Alma ont concerné aussi bien les poussières dans la comacoma de 2I/Borisov que les abondances relatives des molécules d'eau et de monoxyde de carbonemonoxyde de carbone. Ces abondances ont évolué avec le dégazage de la comète au fur et à mesure qu'elle se rapprochait du Soleil.

    Cela suggère une composition hétérogène de 2I/Borisov qui serait donc le résultat d'une accrétionaccrétion de matériaux nés dans différentes parties du système planétaire en cours de formation par effondrementeffondrement gravitationnel. Dans le cas du Système solaire, les météorites témoignent d'un processus de mélange entre les parties internes et externes du disque protoplanétaire et l'on sait que les géantes gazeusesgéantes gazeuses ont conduit à des éjections de petits corps formés proches du jeune Soleil vers les régions externes du Système solaire.

    Là encore 2I/Borisov nous donne des indices laissant penser que ce qui s'est passé dans notre cas n'est probablement pas atypique, au moins sur certains aspects, dans le domaine de la cosmogonie planétaire.


    La comète interstellaire 2I/Borisov a une composition atypique

    Article de Laurent Sacco publié le 20/04/2020

    Découverte fin août par un astronome amateur, la comète interstellaire 2I/Borisov contient de la matière qui provient d'un autre système planétaire. Sa composition chimique est en cours d'analyse et paraît semblable à celle des comètes du Système solaire par certains aspects mais en diffèrerait fortement d'après les observations d'Alma avec le monoxyde de carbone.

    Les comètes sont des objets de curiosité pour l'Humanité depuis des millénaires mais il a fallu attendre l'essor de la science moderne au XVIIe siècle pour que leur étude scientifique démarre vraiment et principalement avec NewtonNewton qui -- reconnaissant les travaux de Tycho Brahe montrant pour la première fois que les comètes sont forcément des astres au-delà de l'atmosphère terrestre et même au-delà de l'orbiteorbite de la Lune -- va leur appliquer sa théorie de la gravitationgravitation comme aux autres planètes du Système solaire.

    Edmond HalleyEdmond Halley va lui emboîter le pas en utilisant la mécanique newtoniennemécanique newtonienne pour étudier 23 apparitions de comètes entre 1337 et 1698. Il découvrira non seulement que plusieurs de ses apparitions correspondent à une seule comète, la désormais célèbre 1P/Halley que la sonde de la mission Giotto a visité en 1986, car les éléments orbitaux de sa trajectoire elliptique sont identiques, mais il rendra compte aussi des modifications des éléments orbitaux des autres comètes par les effets des perturbations gravitationnelles de JupiterJupiter et SaturneSaturne.

    La théorie du calcul des perturbations pour rendre compte des mouvementsmouvements de tous les corps célestes du Système solaire va faire par la suite d'importants progrès grâce aux mathématiciensmathématiciens Lagrange, Laplace et Gauss. L'étude de la physique et de la chimiechimie des comètes attendra par contre le XXe siècle où l'on comprendra également que les comètes sont des mémoires de l'histoire de la formation du Système solaire mais aussi qu'elles ont des implications dans l'existence de l'eau sur Terre ainsi qu'en ce qui concerne l’origine du phosphore et de l'azote des molécules de la vie ainsi que Futura l'a expliqué avec deux articles consacrés à la désormais mythique mission RosettaRosetta avec la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko.

    Vue d'artiste de la comète interstellaire 2I / Borisov lors de son voyage à travers notre système solaire. Ce mystérieux visiteur des profondeurs de l'espace est la première comète d'une autre étoile identifiée de manière concluante. La comète se compose d'une agglomération lâche de glaces et de particules de poussière. Du gaz est éjecté de la comète à l'approche du Soleil et se réchauffe. © NRAO/AUI/NSF, S. Dagnello 
    Vue d'artiste de la comète interstellaire 2I / Borisov lors de son voyage à travers notre système solaire. Ce mystérieux visiteur des profondeurs de l'espace est la première comète d'une autre étoile identifiée de manière concluante. La comète se compose d'une agglomération lâche de glaces et de particules de poussière. Du gaz est éjecté de la comète à l'approche du Soleil et se réchauffe. © NRAO/AUI/NSF, S. Dagnello 

    Une concentration de CO entre neuf et 26 fois plus élevée

    Tout récemment, cette lente, puis de plus en plus rapide maturation de notre connaissance des comètes a permis l'ouverture d'un nouveau chapitre avec la découverte de la comète interstellaire 2I / Borisov à laquelle Futura a déjà consacré de nombreux articles (Lire ci-dessous). Aujourd'hui, les astrophysiciens publient, dans le célèbre journal Nature Astronomyles résultats d'études qu'ils ont menées concernant sa composition du 15 au 16 décembre 2019 à l'aide de l'Atacama Large Millimeter / submillimeter Array (ALMA), le réseau de radiotélescopesradiotélescopes géant au Chili.

    Alors que les premières études de 2I/Borisov montraient plutôt ses similarités avec les comètes de notre Système solaire, Alma révèle aujourd'hui une différence comme l'explique un communiqué du National Radio Astronomy Observatory (NRAO). Le dégazage de la comète interstellaire à moins de deux unités astronomiquesunités astronomiques du Soleil analysé avec Alma montre que le gaz émis contient une concentration en monoxyde de carbone bien plus élevée que pour toutes les comètes connues observées aussi proches de notre étoile. On trouve ainsi une estimation pour la concentration de CO entre neuf et 26 fois plus élevée que celle de la moyenne des comètes du Système solaire.

    Martin Cordiner, astrochimiste, et Stefanie Milam, planétologue, au Goddard Space Flight CenterGoddard Space Flight Center de la NasaNasa, à Greenbelt (Maryland), et qui ont dirigé l'équipe de scientifiques internationaux derrière l'article de Nature Astronomy, commentent cette découverte dans le communiqué du NRAO en ces termes.

    « C'est la première fois que nous regardons à l'intérieur d'une comète de l'extérieur de notre Système solaire et c'est radicalement différent de la plupart des autres comètes que nous avons vues auparavant », explique Martin Cordiner. Stefanie Milam en déduit que « la comète doit avoir été formée à partir de matériaux très riches en glace de CO, qui n'est présente qu'aux températures les plus basses de l'espace, en dessous de -250 °C ».

    Alma a observé du gaz de cyanure d'hydrogène (HCN, à gauche) et du monoxyde de carbone (CO, à droite) sortant de la comète interstellaire 2I / Borisov. Les images Alma montrent que la comète contient une quantité inhabituellement élevée de gaz CO. Alma est le premier télescope à mesurer les gaz provenant directement du noyau d'un objet qui nous est parvenu d'un autre système planétaire.© Alma (ESO/NAOJ/NRAO), M. Cordiner & S. Milam ; NRAO/AUI/NSF, S. Dagnello
    Alma a observé du gaz de cyanure d'hydrogène (HCN, à gauche) et du monoxyde de carbone (CO, à droite) sortant de la comète interstellaire 2I / Borisov. Les images Alma montrent que la comète contient une quantité inhabituellement élevée de gaz CO. Alma est le premier télescope à mesurer les gaz provenant directement du noyau d'un objet qui nous est parvenu d'un autre système planétaire.© Alma (ESO/NAOJ/NRAO), M. Cordiner & S. Milam ; NRAO/AUI/NSF, S. Dagnello

    Une comète interstellaire formée à grande distance de son étoile

    Il se trouve que le CO est l'une des molécules les plus courantes dans le milieu interstellaire et donc dans les nuages moléculaires denses et froids qui, en s'effondrant gravitationnellement, vont donner des jeunes étoiles entourées d'un disque protoplanétaire où naissent comètes et planètes. Les comètes du Système solaire ont des variations dans la concentration de monoxyde de carbone lors de leur dégazage et l'on n'est pas très sûr de savoir pourquoi. Cela pourrait être tout simplement dû à des compositions différentes reflétant un gradientgradient chimique dans le disque protoplanétaire. On sait, par exemple, de toute façon que les comètes se forment dans les régions froides de ce disque, là où les températures permettent la formation de glaces d'eau et carbonique, au-delà de la fameuse ligne de glace, encore appelée ligne de neige, comme celle déjà observée par Alma avec TW Hydrae, une jeune étoile entourée d'un disque protoplanétaire située à environ 175 années-lumièreannées-lumière du Soleil.

     C'est ce qui fait dire à Martin Cordiner : « Si les gaz que nous avons observés reflètent la composition du lieu de naissance de 2I / Borisov, cela montre qu'elle peut s'être formée d'une manière différente de nos propres comètes du Système solaire, dans une région extérieure extrêmement froide d'un système planétaire éloigné. La plupart des disques protoplanétaires observés avec Alma se trouvent autour de versions plus jeunes d'étoiles de faible massemasse comme le Soleil. Beaucoup de ces disques s'étendent bien au-delà de la région où nos propres comètes se seraient formées et contiennent de grandes quantités de gaz et de poussière extrêmement froides. Il est possible que 2I / Borisov provienne d'un de ces disques plus gros. »

    Stefanie Milam précise tout de même que « 2I / Borisov nous a donné un premier aperçu de la chimie qui a façonné un autre système planétaire. Mais ce n'est que lorsque nous pourrons comparer l'objet à d'autres comètes interstellaires que nous apprendrons si 2I / Borisov est un cas spécial ou si chaque objet interstellaireobjet interstellaire a des niveaux de CO inhabituellement élevés ».

    Les chercheurs s'accordent tout de même pour penser que, comme dans le cas de 1I / ’Oumuamua, le premier objet interstellaire détecté de passage dans notre Système solaire, 2I / Borisov a sans doute dû être éjecté de son système planétaire en passant trop près de son étoile hôte ou d'une planète géanteplanète géante en orbite autour de ce soleil avant d'errer dans le milieu interstellaire depuis des millions et peut-être des milliards d'années.

    Qui peut deviner la nature des secrets sur la formation des exoplanètesexoplanètes et même l'origine de la vie que nous révéleront les études d'autres comètes interstellaires avec, par exemple la mission Comet Interceptor, dont il est hors de doute que nous devrions en observer très bientôt à nouveau ?


    La comète interstellaire 2I/Borisov ressemble beaucoup à celles de notre Système solaire

    Article de Laurent Sacco publié le 20/10/2019

    Découverte fin août par un astronome amateur, la comète interstellaire 2I/Borisov contient de la matière qui provient d'un autre système planétaire autour d'une autre étoile. On commence à analyser la composition chimique de cette matière qui, en accord avec l'activité actuelle de la comète, la rapproche des comètes du Système solaire formées dans la ceinture de Kuiperceinture de Kuiper.

    La découverte d'une nouvelle comète faite par l'astronome amateur ukrainien Gennady Borisov, ce 30 août 2019, dans la constellationconstellation de Cassiopée, a rapidement été l'objet d'un grand intérêt quand l'analyse de ses paramètres orbitaux, notamment son excentricitéexcentricité et sa vitessevitesse (33,8 km/s) a clairement montré qu'il ne pouvait pas s'agir d'un objet appartenant au Système solaire. Il ne s'agissait pas d'une comète à longue période et pas non plus d'une comète provenant du nuage d'Oortnuage d'Oort, qui aurait été déstabilisée par le passage rapproché d'une étoile au voisinage du Soleil (comme par exemple l'étoile de Scholz), la projetant sur l'orbite hyperbolique que l'on constate et qui va la conduire à traverser le Système solaire sans retour.

    Non, on était clairement en présence d'un second voyageur interstellaire après le passage de 1I/'OumuamuaOumuamua et c'est pour cette raison que la comète de Borisov est maintenant reconnue sous la dénomination de 2I/Borisov. Pas plus que 1I/'Oumuamua, il ne s'agit malheureusement pas d'une sonde interstellaire à la « Rendez-vous avec Rama » qui illustrerait une nouvelle fois le caractère visionnaire d'Arthur Clarke déjà constaté avec le Web. Il n'en s'agit pas moins tout de même d'une opportunité d'en apprendre plus sur la nature des autres systèmes planétaires.


    Des images prises de 2I/Borisov, ici avec le télescope Hubble le 12 octobre 2019 et par l'astronome David Jewitt (University of California) avec son équipe. © NASA, ESA, D. Jewitt (UCLA)

    2I/Borisov, la messagère interstellaire

    Cette comète interstellaire, et d'autres qui sont attendues dans un futur proche et dont des échantillons pourraient être rapportés sur Terre au cours du XXIe siècle grâce à une lointaine descendante de la sonde robotisée Rosetta, peut en effet nous donner des renseignements précieux sur la nature physico-chimique du disque protoplanétaire où elle s'est formée, permettant de mieux déterminer à quel point notre Système solaire est typique... ou non.

    Une telle information pourrait avoir des conséquences sur la façon dont nous pensons que la vie est peut-être apparue ailleurs et à quel point ce phénomène est rare... ou au contraire fréquent.

    Toujours est-il que le premier article d'une équipe de recherche ayant subi le processus de vérification conduisant à une publication officielle est maintenant disponible dans le célèbre journal Nature AstronomyUne autre une version en accès libre est disponible sur arXiv, où des travaux menés par d'autres astronomes à propos de 2I/Borisov sont aussi disponibles, en attendant là aussi des publications officielles. Un de ces articles a aussi été accepté dans Astrophysical Journal Letters et comme Futura l'expliquait dans le précédent article ci-dessous, il fait état à la présence de molécules CN dans la matière dégazée par 2I/Borisov.

    La comète interstellaire a fait l'objet de plusieurs observations avec des instruments présents au télescopetélescope Gemini Nord à Hawaï, au télescope William HerschelWilliam Herschel de l'Observatoire de Roque de los Muchachos situé sur l'île de La Palma et tout dernièrement avec le télescope HubbleHubble dans l'espace.

    Il apparaît maintenant, et pour le moment, que 2I/Borisov est une comète active plutôt typique à sa distance actuelle du Soleil, si elle est originaire du Système solaire. Sa couleurcouleur tirant sur le vert et son noyau dont la taille est de l'ordre du kilomètre ne détonnent pas par rapport à ses cousines solaires.


    Cette brève introduction à l’Observatoire Gemini met en lumière la science, la technologie et les personnes impliquées. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Gemini Observatory

    Une cousine de la famille des comètes de Jupiter ?

    Une étude récente, menée par une équipe d'astronomes ayant utilisé des spectrographes équipant des télescopes, celui de 6,5 mètres de l'Observatoire MMT, situé sur le Mont Hopkins, et de 2,3 mètres de l'Observatoire national de Kitt Peak, tous les deux dans l'Arizona, a conduit à plusieurs résultats intéressants.

    Les chercheurs ont confirmé la présence de molécules CN mais surtout ont établi la présence de raies d'émissionémission associées aux molécules de carbone diatomique (C2) dans le coma de 2I/Borisov. Il leur a alors été possible de faire une estimation du rapport des abondances de ces deux molécules. Il est similaire à celui trouvé dans le cas des comètes périodiques du Système solaire formant une famille que l'on associe à Jupiter, et dont la célèbre comète de Enckecomète de Encke est membre (2P/Encke est une comète périodique avec une période de 3,3 ans).

    Les orbites actuelles de ces astres, dont les périodes orbitalespériodes orbitales sont inférieures à 20 ans, sont principalement déterminées par l'influence gravitationnelle de Jupiter, mais on a des raisons de penser qu'elles sont originaires de la ceinture de Kuiper. 2I/Borisov pourrait donc s'être formée dans l'équivalent de cette ceinture dans son système stellairesystème stellaire d'origine.

    Nous n'en sommes encore qu'au début des études avec 2I/Borisov qui connaîtra son pic d'activité dans moins de deux mois quand elle passera au plus proche du Soleil, environ à deux unités astronomiques (UA), soit le double de la distance du Soleil à la Terre. La comète interstellaire devrait aussi rester encore visible dans notre ciel nocturnenocturne pendant environ un an.


    Comète interstellaire Borisov : premiers résultats sur sa composition

    Article de Laurent Sacco publié le 05/10/2019

    Découverte fin août par un astronome amateur, la comète interstellaire 2I/Borisov contient de la matière qui provient d'un autre système planétaire autour d'une autre étoile. On commence à analyser la composition chimique de cette matière, comme le montre l'identification d'une première molécule, probablement associée à du cyanure d'hydrogènecyanure d'hydrogène.

    La physique semble très sérieusement interdire à l'humanité de vraiment voyager à sa guise entre les étoiles car, malheureusement, il nous serait à tout jamais impossible de disposer de l'énergieénergie nécessaire pour ouvrir un trou de ver traversable (leur existence même n'a rien d'évident).

    Cela pourrait peut-être changer un jour mais, en attendant, il semble bien que nous soyons heureusement et d'ores et déjà capables au XXIe siècle d'avoir accès à de la matière provenant des débuts de la formation d'autres systèmes planétaires que le Système solaire. Son étude serait précieuse pour la cosmochimie et l'exobiologieexobiologie, plus généralement la cosmogonie des exoplanètes.

    Nous possédons bien sûr maintenant de nombreuses observations concernant ces exoplanètes et les disques protoplanétaires où elles naissent. Nous disposons aussi de nombreuses observations concernant les nuages moléculaires froids où naissent ces disques, leur composition, leur structure grâce aux radiotélescopes sur Terre et à des instruments comme ceux équipant le satellite Herschel avant la fin de sa mission. Mais nous ne savons toujours pas à quel point notre Système solaire est typique, ou pas, du point de vue notamment de la cosmochimie. Dans le premier cas, ce serait de bon augure pour la recherche de la Vie dans la Voie lactée.

    La détection des premiers objets interstellaires traversant le Système solaire peut nous aider à avancer sur ce point. 1I/'Oumuamua ne se comportait pas vraiment comme une comète mais il en est tout autrement de 2I/Borisov qui a déjà débuté un processus de dégazage alors qu'elle s'approche du Soleil. Les astronomes constatent en effet qu'elle a développé un début de queue cométaire et qu'une atmosphère de poussières l'enveloppe. Ils peuvent donc commencer à analyser indirectement la composition de la comète interstellaire en attendant le jour où une mission du type de celle envisagée par l'ESA avec un lancement à l'horizon 2028, Comet Interceptor, pourrait faire avec une telle comète ce que Rosetta a fait avec 67/Churyumov-Gerasimenko.


    La composition moléculaire de la comète 67/Churyumov-Gerasimenko est riche d'enseignements multiples. On peut imaginer avec elle ce que pourrait révéler l'analyse in situ d'une comète interstellaire avec une mission spatiale. © Académie des sciences

    Une équipe internationale de chercheurs vient donc de déposer sur arXiv un article où les astronomes exposent les premières conclusions acquises en ayant obtenu notamment des spectresspectres du gaz libéré par 2I/Borisov à l'aide du spectrographe Isis équipant le William Herschel Telescope (WHT) de 4,2 mètres sur l'île de La Palma aux Canaries.

    Du cyanure dans la comète 2I/Borisov ?

    Un communiqué du Centre de recherche en astrophysique de l'Université Queen's à Belfast donne plusieurs détails concernant l'obtention des résultats concernant la composition de 2I/Borisov. Alan Fitzsimmons, professeur dans cette université y explique notamment que : « Pour la première fois, nous sommes en mesure de mesurer avec exactitude la composition d'un visiteur interstellaire et de le comparer à notre propre Système solaire. Et il poursuit en racontant ce qui s'est passé avec la campagne d'observation avec le WHT : Notre première tentative a eu lieu le vendredi 13 septembre, mais nous étions malchanceux et avons été contrariés par la luminositéluminosité du ciel si proche du soleil. Mais la tentative suivante a réussi. »

    Il y avait incontestablement des molécules de formule CN dans le gaz entourant 2I/Borisov. Elle est liée à la molécule (CN)2 appelée cyanogène. Il est probable que CN provient de la photodissociation de la molécule HCN par le rayonnement du Soleil, le tristement célèbre cyanure d'hydrogène. Cette hypothèse est d'autant plus plausible que l'on a trouvé du cyanure dans plusieurs comètes du Système solaire et dans les nuages interstellairesnuages interstellaires. Ainsi, lors du passage de la comète de Halley en 1986, le radiotélescope de 30 mètres de l'Iram qui venait d'être mis en fonction à Pico Veleta (Espagne) l'avait détecté dans cette célèbre comète périodique.

    Les données collectées avec le WHT ont été complétées par des images filtrées de la comète interstellaire obtenues avec le télescope Trappist-North au Maroc, et au final il a été possible de mesurer la quantité de poussière éjectée par la comète et d'en déduire une estimation de la taille du noyau central, entre 0,7 et 3,3 kilomètres.

    L'astronome Emmanuel Jehin qui surveille 2I/Borisov à l'aide du télescope au Maroc ne cache pas son émerveillement : « Nous avons l'habitude de voir des images de comètes, mais celle-ci est si spéciale ! En le regardant presque tous les matins depuis deux semaines maintenant, je suis fasciné par le fait que cet objet ne ressemble pas aux nombreux autres que j'ai observés, mais qu'il provient vraiment d'une autre étoile, probablement très éloignée. »

    Pour le moment 2I/Borisov ressemble beaucoup aux comètes du Système solaire mais on pourrait avoir des surprises bientôt, comme l'explique l'astronome Oliver Hainaut, membre de l'ESO et de l'équipe qui étudie la comète interstellaire : « L'année prochaine sera extrêmement excitante, car nous pourrons suivre l'évolution de 2I/Borisov alors qu'elle traversera notre Système solaire. En comparaison, nous n'avions que quelques semaines pour étudier 1I/'Oumuamua avant qu'il ne devienne trop peu lumineux. »


    C’est officiel : la comète Borisov est d’origine interstellaire

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman publié le 24/09/2019

    Découverte fin août par un astronome amateur, la comète Borisov est confirmée comme étant d'origine interstellaire. Elle s'appelle désormais 2I/Borisov car elle est le deuxième objet découvert à venir d'une autre étoile.

    L'Union astronomique internationaleUnion astronomique internationale, l'IAU, vient d'annoncer qu'il n'y a désormais plus de doutes : C/2019 Q4 (Borisov) est bien une comète interstellaire et a été officiellement renommée 2I/Borisov.

    Découvert le 30 août dernier par l'astronome amateur Gennady Borisov avec son télescope de 65 cm de diamètre, en Crimée, l'astre a été, dès les jours suivants, soupçonné par les astronomes de venir d'ailleurs... 2I/Borisov n'est donc pas une comète comme les autres, née dans notre Système solaire il y a 4,6 milliards d'années, mais un astre glacé façonné autour d'une étoile lointaine et qui parcourt la Galaxie depuis des centaines de millions d'années, voire des milliards d'années. Elle a beaucoup à dire aux chercheurs.

    Pour l'instant, les scientifiques savent encore peu de choses à son sujet -- les premiers spectres ont montré que sa composition n'est pas très différente de celle des comètes typiques qui rôdent dans le Système solaire -- mais ils ne cachent pas leur excitation de pouvoir observer ce corps glacé d'une taille estimée à un kilomètre. D'autant plus qu'il n'y a pas longtemps que 2I/Borisov est entrée dans notre Système, à la différence de ‘Oumuamua, le premier objet interstellaire découvert qui, lui, avait été observé sur le tard, alors qu'il s'éloignait de nous.

    Animation montrant la trajectoire estimée de la comète 2I/Borisov (anciennement C/2019 Q4) découverte fin août 2019. En approche du Système solaire, elle devrait couper le plan de l'écliptique le 26 octobre et passer au plus proche du Soleil le 7 décembre. © Nasa, JPL-Caltech
    Animation montrant la trajectoire estimée de la comète 2I/Borisov (anciennement C/2019 Q4) découverte fin août 2019. En approche du Système solaire, elle devrait couper le plan de l'écliptique le 26 octobre et passer au plus proche du Soleil le 7 décembre. © Nasa, JPL-Caltech

    La comète Borisov passera au plus près du Soleil le 7 décembre

    Donc, cela se présente bien pour les astronomes qui se mobilisent pour la scruter dans ses moindres détails. Actuellement, la comète se rapproche du Soleil et de nous et devrait briller de plus en plus jusqu'à janvier 2020. Sa distance la plus proche avec notre étoile (périhélie) sera le 7 décembre prochain. 2I/Borisov sera alors à quelque 300 millions de kilomètres du Soleil, et autant de la Terre.

    Deux objets interstellaires observés en l'espace de deux ans, cela laisse présager qu'il y en a beaucoup déjà qui ont traversé le Système solaire incognito et qu'il y en a encore beaucoup à découvrir.


    Première image en couleur de l'objet interstellaire C/2019 Q4

    Article de Rémy DecourtRémy Decourt publié le 17 septembre 2019

    Une première image en couleur de C/2019 Q4 confirme que ce probable visiteur interstellaire, venu d'ailleurs, est une comète.

    L'objet interstellaire C/2019 Q4 découvert par l'astronome amateur russe Gennady Borisov le 30 août 2019 a été photographié en couleurs par l'observatoire Gemini ! L'image a été obtenue dans la nuit du 9 au 10 septembre à l'aide du spectrographe multi-objets GMOS du télescope Gemini North, basé à Maunakea, Hawaï. Une performance technique à souligner en raison de la difficulté de saisir ce type d'objet qui ont une fenêtrefenêtre de visibilité très courte. En effet, la supposée comète interstellaire C/2019 Q4 est actuellement proche de la position apparente du Soleil et est, par conséquent, difficile à observer en raison de la lueur du crépusculecrépuscule.

    L'objet interstellaire, C/2019 Q4, photographié en couleur par l'observatoire Gemini dans la nuit du 9 au 10 septembre 2019. © <em>Gemini Observatory</em>, NSF, AURA
    L'objet interstellaire, C/2019 Q4, photographié en couleur par l'observatoire Gemini dans la nuit du 9 au 10 septembre 2019. © Gemini Observatory, NSF, AURA

    Après ‘Oumuamua, voilà une comète venue d'ailleurs

    L'image acquise dans deux bandes de couleur distincte, qui montre une tache blanchâtre, n'enthousiasmera peut-être pas le grand public mais pour les astronomes elle fourni de nombreuses informations. Elle met en évidence une queue très prononcée, révélatrice d'un dégazage, caractéristique d'un objet cométaire de sorte que les spectres enregistrés devraient aider les chercheurs à déterminer la nature de ce nouveau visiteur interstellaire.

    La queue, que l'on soupçonnait au moment de la découverte de l'objet, est donc confirmée par l'image, ce qui enthousiasme les astronomes. ‘Oumuamua, le seul autre objet interstellaire connu était bien plus allongé que ne l'est C/2019 Q4 et s'apparentait à un astéroïdeastéroïde (quoique la Nasa conclut à une comète), sans dégazage apparent. L'autre attrait, c'est qu'il devrait rester à priori visible depuis la Terre jusqu'en octobre 2020.


    Un objet interstellaire serait en train de traverser le Système solaire

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer publié le 12/09/2019

    Il y avait 'Oumuamua et désormais, il y a C/2019 Q4 (Borisov). Ce nouvel objet supposé interstellaire a été observé pour la première fois par un astronome amateur le 30 août dernier. Il s'agirait d'une comète.

    Gennady Borisov -- un astronome amateur qui fabrique lui-même ses télescopes avec lesquels il chasse les comètes -- a capturé l'objet le 30 août dernier, à l'observatoire astrophysique de Crimée. Il se trouvait alors à quelque trois unités astronomiques de notre Soleil (soit environ 420 millions de kilomètres). Après 'Oumuamua, c'est le deuxième objet potentiellement interstellaire découvert navigant dans le Système solaire. Et contrairement à son illustre prédécesseur, il a été découvert avant même son passage à son périhélie.

    Ainsi, selon les premières estimations, C/2019 Q4 (Borisov) - provisoirement nommé « bg00234 » au moment de sa première observation - devrait passer au plus près du Soleil le 8 décembre prochain, prévoit la Nasa dans un communiqué. À son point le plus proche, il se trouvera alors à environ 300 millions de kilomètres de nous. D'ici là et encore après, les astronomes devraient avoir tout le loisir de préciser sa nature et son origine. Ce visiteur a priori venu d'ailleurs devrait rester visible jusqu'en octobre 2020 par les plus puissants télescopes.

    La comète C/2019 Q4 vue par le télescope Canada-France-Hawaï le 10 septembre 2019. © <em>Canada-France-Hawaii Telescope</em>
    La comète C/2019 Q4 vue par le télescope Canada-France-Hawaï le 10 septembre 2019. © Canada-France-Hawaii Telescope

    Une autre comète venue d’ailleurs

    Pour l'heure, les images montrent un objet de type cométaire, avec une coma discrète mais bien dessinée, suggérant qu'elle possède effectivement un noyau glacé, et un soupçon de queue. Les chercheurs sont impatients d'obtenir un spectre qui leur permettrait de déterminer quels composés s'en échappent.

    L'excentricité de C/2019 Q4 (Borisov), quant à elle, est estimée à 3,2. Ce qui confère à l'objet une orbite hyperbolique signe que cette comète n'est pas liée à notre Soleil. Elle pourrait venir de la direction du plan galactique situé dans Cassiopée. Elle voyage actuellement à une vitesse de 150.000 km/h, phénoménale pour un objet du Système solaire, ce qui fournit aux astronomes un indice supplémentaire en faveur d'une origine interstellaire.

    Arrivant de biais, avec un angle de 40° par rapport au plan de l'écliptiqueplan de l'écliptique (défini par l'orbite de la Terre, et approximativement des autres planètes, autour du Soleil), elle devrait traverser celui-ci le 26 octobre prochain, avant de poursuivre sa route et de quitter notre Système. Autre donnée, tirée cette fois de la réflectivité de sa surface : C/2019 Q4 (Borisov) serait un objet relativement grand, entre 2 et 16 kilomètres. À comparer aux 400 mètres de long estimés pour 'Oumuamua. Affaire à suivre...