Porté par une équipe française à l'initiative de l'ingénieur Benoît Faiveley, le projet Sanctuary on the Moon est aussi soutenu par l'Unesco et la Nasa. Il s'agit de déposer sur la Lune non pas une archive ou une encyclopédie complète des connaissances et de la culture d'Homo sapiens au début du XXIe siècle, mais des extraits représentatifs conservés dans une capsule temporelle capable de traverser des millions d'années. Elle témoignera alors de qui nous étions à des archéologues du lointain futur, qu'ils soient post-humains ou même extraterrestres.
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Dans 2001 : l'Odyssée de l'espace, Arthur Clarke imagine qu'une civilisation extraterrestre très avancée a visité la Terre il y a des millions d'années puis laissé une preuve de son existence sur la Lune sous la forme d'un monolithemonolithe noir enfoui dans le régoliterégolite lunaire et générant une anomalieanomalie magnétique. Le monolithe est destiné à signaler que l'intelligenceintelligence sur Terre a atteint le seuil permettant le voyage interplanétaire et la découverte du monolithe lui-même. De plus, la Lune est un environnement beaucoup plus stable que la Terre, pas d'érosion, de volcansvolcans actifs ou de tremblements de Terretremblements de Terre, de sorte que le monolithe pouvait traverser sans encombre les millions d'années nécessaires à l'évolution du genre HomoHomo sur Terre.
Nous ne savons pas si comme dans 2001 le voyage interstellaire est possible, mais s'il l'est et que l'humanité colonise quelques exoterres dans la banlieue du Soleil, peut-être que des archéologues du futur, dans des milliers ou centaines de milliers d'années, ayant perdu la trace de leur monde originel et d'une partie de son histoire, finiront par revenir dans le Système solaire et qu'ils y feront la découverte des disques du projet Sanctuary. Ces archéologues pourraient bien aussi être des super-IA extraterrestres cherchant à en savoir plus sur une espèceespèce disparue qui n'a pas su gérer les défis de son XXIe siècle : la nôtre.
Il y a quelques années, dans le précédent article ci-dessous, Futura vous avait déjà parlé de ce projet imaginé et initié par l'ingénieur français Benoît Faiveley et qui vient d'être lancé officiellement ce 21 mars 2024 à l'Unesco. Dans le cadre du programme Artemis, la Nasa devrait déposer à l'horizon 2027 une capsule temporelle sur la Lune.
Une salutation cosmique en saphir
Il ne s'agit pas d'une machine à voyager dans le temps au sens de la science-fiction, mais de l'analogue moderne de la capsule temporelle de la Westinghouse Electric & Manufacturing Company dont le but était de présenter un instantané de l'époque en 1939, en s'appuyant sur les dernières technologies. C'était un témoignage et un message pour les générations futures enterré à 15 mètres de profondeur dans une capsule spéciale mesurant 2,3 mètres de longueur et 22 centimètres de diamètre capable de protéger son contenu pendant 5 000 ans. Il s'agissait de plus de 100 objets soigneusement sélectionnés comme des millions de pages de texte sur microfilmmicrofilm, des échantillons de graines provenant de cultures courantes telles que le bléblé et même des messages manuscrits de personnalités telles qu'Albert EinsteinEinstein et Thomas Mann.
Dans le cas du projet Sanctuary on the Moon, il est prévu de graver 24 disques de saphir de telle sorte que, comme l'explique dans un communiqué de presse Benoît Faiveley, « Sanctuary constitue "une salutation cosmique" à nos descendants ou peut-être même à des visiteurs venus d'ailleurs. Il s'agira d'un portrait bigarré de notre espèce gravé en micropixels - jusqu'à 7 milliards par disque. La plupart des documents ne sont pas simplement présentés. Ils sont racontés par le biais de textes, d'images, de diagrammes et de représentations de données. Des exemples importants en astrophysiqueastrophysique, physiquephysique des particules, astronomie et sciences planétaires sont ainsi fournis ».
Une présentation complémentaire du projet Sanctuary. © Grapevine Prod, Sanctuary
Une équipe pluridisciplinaire dans les pas de Carl Sagan
Pour atteindre ce but avec Sanctuary, une équipe pluridisciplinaire de 11 scientifiques a été constituée. Elle compte des ingénieurs, astrophysiciens et cosmologistes comme Roland Lehoucq et Jean-Philippe Uzan, des paléontologues comme Jean-Sébastien Steyer, mais aussi des artistes de renom et le soutien d'organisations telles que le Cnes, le CEA, l'Inria, le BCGSC et l'Unesco, comme le précise toujours le contenu du communiqué de presse que nous reprenons en partie.
Michael Benson, auteur notamment de l'ouvrage Space Odyssey: Stanley Kubrick, Arthur C. Clarke, and the Making of a Masterpiece, historienhistorien et membre de l'équipe, y précise que « la trajectoire de Sanctuary s'inscrit dans l'espace, mais aussi, et c'est tout aussi important, dans le temps cosmique profond. La Lune est l'endroit idéal pour conserver une telle capsule grâce à sa surface ancienne, résistante aux inondationsinondations, tremblements de terre, tsunamistsunamis et ouragansouragans ».
Les disques, dont certains sont encore en conception en ce qui concerne le choix des informations témoignant de qui nous sommes, de ce que nous savons et de ce que nous faisons selon la formule du communiqué, ne sont pas sans faire penser au célèbre disque d'or de Voyager (ou Voyager Golden Record) de Carl Sagan qui lui aussi contient des informations illustrant l'essence de la culture, de l'art et de la science.
Les premiers « génomenautes »
Il y a toutefois au moins une différence notable, le projet implique l'enregistrement du génomegénome complet d'un homme et d'une femme qui ont été choisis à l'issue d'un processus de sélection en double aveugle. Le séquençageséquençage de ce génome a déjà été réalisé par le British ColumbiaColumbia Genome Sciences Centre à Vancouver au Canada. On peut se demander si une civilisation E.TT. future pourrait en tirer des clonesclones... ou si nos descendants plus évolués en feraient de même pour faire revivre l'espèce Homo sapiensHomo sapiens, comme nous envisageons de le faire aujourd'hui avec les mammouths.
Une deuxième différence est que comme les disques sont destinés à nos descendants en premier lieu, toutes les informations, les images, les graphiques, etc. ne sont pas codés mais représentés directement par des microgravures que l'on peut voir à l'œilœil nu ou à la loupe directement, de sorte que leur lisibilité ne dépendra pas de la technologie disponible pour des archéologues terriens du futur.
Comme l'explique Benoît Faiveley : « Le projet Sanctuary est un message à très long terme. Nous souhaitons que les futurs explorateurs remontent le temps et nous rejoignent dans notre exploration de nous-mêmes, de notre monde et de notre époque. » Et à cet égard, il n'est pas sans rappeler l'esprit qui anime la LNF (Long Now Foundation) à l'origine notamment de l'Horloge du Long Maintenant.
Quelques-uns des disques sont déjà consultables sur le site du projet Sanctuary. On peut voir différentes thématiques, l'espace, la vie, l'eau, la matièrematière et le génome des deux « génomenautes ».
Une interview de Jim Green, l’ancien chef scientifique de la Nasa qui a donné son feu vert au projet Sanctuary en lui réservant 1,4 kilogramme sur une mission Artemis, avec Michael Benson. © Grapevine Prod, Sanctuary
Projet Sanctuary : une expédition privée sur la Lune pour les 50 ans d'Apollo 11
Article de Rémy DecourtRémy Decourt, publié le 13/04/2018
En juillet 2019, tous les passionnés d'astronautiqueastronautique fêteront les 50 ans d'Apollo 11Apollo 11. Mais sans retour humain sur la Lune. La Nasa a en effet abandonné le projet d'un vol orbital habité. Pas d'Homme donc, mais des robotsrobots : un atterrisseur et le roverrover lunaire d'Audi seront envoyés sur le site d'Apollo 17 par le projet Sanctuary, qui profitera de l'occasion pour laisser une trace de l'humanité sur la Lune en y déposant 17 disques gravés.
Cinquante ans après les premiers pas de l'Homme sur la Lune, le projet Sanctuary, porté par huit membres, dont deux chercheurs du CEA-Irfu, a pour but de laisser les souvenirs de notre civilisation à d'éventuels explorateurs du futur. Pour cela, une mission privée décollera en 2019 et ira se poser non pas sur le site d'alunissage d'Apollo 11 mais sur celui d'Apollo 17, dans la région de Taurus Littrow. Elle sera lancée, peut-être par le Falcon 9 de SpaceX, depuis Cap CanaveralCap Canaveral d'où les astronautesastronautes d'Apollo 11 s'envolèrent pour la mer de la Tranquillité, en juillet 1969.
Essentiellement financée par Audi et Vodafone, cette mission se compose de l'atterrisseur Alinea et du rover Audi Lunar Quattro. Elle a été réalisée par une équipe de 35 d'ingénieurs allemands de différents horizons techniques et qui s'est baptisée « les scientifiques à temps partiel » (PT Scientists).
Quant au rover lunaire, il s'agit de celui qui a concouru dans le cadre du Google Lunar X Prize. Il avait été éliminé de la course en raison de difficultés à trouver un lanceurlanceur disponible dans le délai imparti.
Laisser sur la Lune une trace de l'humanité d'aujourd'hui
Sur les flancs de l'atterrisseur Alinea sera fixé un cube d'une dizaine de centimètres d'arête contenant 17 disques de saphir pesant 700 grammes. Gravés à leur surface, des pixelspixels noirs et blancs 50 fois plus fins qu'un cheveu représenteront sous forme de textes, d'images, de diagrammes et de données codées l'intégralité de deux génomes humains (un homme, une femme), une sélection d'informations scientifiques, d'œuvres artistiques et de travaux collaboratifs.
Le saviez-vous ?
Y aura-t-il une photo de vous sur la Lune ? Le projet Sanctuary permet en effet d'envoyer dès maintenant un selfie (d'une personne ou d'un groupe), accompagné d'un court texte, sur le site du projet. Trois mille photographies seront sélectionnées au hasard. Si votre « message pour la Lune » en fait partie, il sera gravé en noir et blanc sur une surface minuscule (0,07 sur 0,03 mm) mais avec une résolution de 500 pixels ! Toutes les informations ici !
L'idée rappelle les disques Golden Record embarqués à bord des sondes Pioneer et Voyager 1Voyager 1 et 2, lancées dans les années 1970, et destinés à une hypothétique civilisation extraterrestre. Chaque Golden Record contient des images et des sons censés présenter un instantané de l'histoire de notre monde à travers la diversité de sa vie et de sa culture.
Cela dit, le but du projet Sanctuary est tout autre. Il ne s'agit pas d'aller à la rencontre de civilisations extraterrestres. Ces 17 disques seront posés sur la Lune à l'attention d'éventuels découvreurs qui seront vraisemblablement nos descendants. Dans un lointain futur, il s'agira de leur parler de nous, d'ici et de maintenant.