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A l'intérieur d'une microsphère poussent des nanostructures capables de fixer des molécules. http://srnl.doe.gov/ Savannah River National Lab, American Ceramic Society
Ce ne sont que des billes de verre mais elles sont minuscules. Leur diamètre varie de 2 à 100 microns (ou micromètresmicromètres), soit 0,2 centième de millimètre à un dixième de millimètre. Leur dimension est déjà exceptionnelle mais si ces microsphères réalisées au Savannah River National Lab (SRNL) viennent d'être présentées dans la revue d'une association d'industriels de la céramiquecéramique (The American Ceramic Society), c'est pour deux autres particularités. Ces billes sont creuses (mais solides). De plus leur paroi, de 1 à 2 microns, est poreuse. On peut donc y ranger quelque chose...
Pour les fabriquer, les trois inventeurs, G.G. Wicks, L.K. Heung, et R.F. Schumacher, exposent à une flamme précisément contrôlée des grains vitreux de 20 à 40 microns. Dans la pâte de verre a été ajouté un produit qui se vaporise sous l'effet de la chaleur. Les petites particules vitreuses se transforment en ballons en train de gonfler. Il suffit d'arrêter le processus avant leur éclatement. On obtient alors des Hollow Glass Microspheres (microsphères creuses de verre), ou HGM, selon la terminologie des chercheurs. Par ce procédé, deux types de verre ont pu être utilisés, l'un riche en silicesilice et l'autre comprenant aussi du borate de sodium et ressemblant au Vycor, nom commercial d'un verre très résistant.
Une microsphère PW-HGM brisée vue au microscope électronique à balayage dévoile le matériau installé à l'intérieur. Derrière la mince paroi de verre (SiO2) est ici abrité un petit morceau de palladium (Pd). Dans la partie inférieure de l'image, la ligne blanche indiquant l'échelle mesure 11 microns. Crédit : Savannah River National Lab, American Ceramic Society
Avec ce second type de verre, une attaque acide perfore la paroi des sphères de multiples pores dont le diamètre va de 100 à 3.000 angströms. Très nombreuses, ces anfractuosités s'interconnectent et traversent ainsi complètement la paroi. Les HGM sont devenues des PW-HGM, pour Porous Wall-Hollow Glass Microspheres, HGM à paroi poreuse.
L'équipe est parvenue à emplir ces sphères avec plusieurs produits, en guise de démonstration pour les applicationsapplications variées auxquelles ils pensent. En modifiant leurs structures, les chercheurs estiment que ces sphères pourraient, selon les cas, retenir des gazgaz ou des produits dangereux, servir de filtre pour capter un polluant ou même transporter des médicaments.
Ces PW-HGM se prêtent en effet à des conditions de fabrication qui en modifient les caractéristiques. Par exemple, la dimension des pores peut être ajustée. Des billes emplies d'un produit absorbant pourrait ainsi devenir un filtre efficace, adapté à la taille des moléculesmolécules à retenir, pour purifier un gaz ou encore pour l'analyser. Elles pourraient aussi devenir des réservoirs aux propriétés intéressantes. En introduisant à l'intérieur une substance capable d'absorber un gaz, ces bulles le retiendraient de manière efficace. Ces microsphères, en effet, sont solides et semblent constituer un moyen sûr pour stocker des substances potentiellement dangereuses. De plus, elles peuvent être réutilisées.
Schéma d'une microsphère. La taille moyenne est de 50 microns mais varie de 2 à 100 microns. Constituée d'un verre contenant du borate de sodium, connu sous le nom commercial de Vycor, la paroi est épaisse de 1 à 2 microns (wall thickness) et parcourue de minuscules pores interconnectés, de 100 à 3.000 angströms de diamètre (interconnected pores). Crédit : Savannah River National Lab, American Ceramic Society
Retenir l'hydrogène ou fixer la radioactivité
Les chercheurs pensent notamment à la récupération de gaz radioactif. L'équipe a d'ailleurs démontré la possibilité d'installer dans les sphères du palladiumpalladium, utilisé pour stocker les isotopesisotopes radioactifs de l'hydrogènehydrogène (deutérium et tritiumtritium). Parmi les applications étudiées figure d'ailleurs le stockage de l'hydrogène, en vue de son utilisation comme carburant d'une pile à combustiblepile à combustible. Dans ce cas, les sphères contiendraient l'un des matériaux actuellement envisagés pour fixer ce gaz, chimiquement ou par adsorptionadsorption. Un partenariat a d'ailleurs déjà démarré avec Toyota pour étudier la faisabilité d'un réservoir d'hydrogène pour des véhicules électriques.
L'équipe affirme qu'il est possible de modifier les propriétés mécaniques de la surface des microsphères pour faire en sorte, par exemple, que cette fine poudre s'écoule facilement, presque comme un liquideliquide. A tel point, affirme les chercheurs, qu'elle pourrait prendre la place du carburant dans les infrastructures existantes de distribution, jusqu'aux stations services. Un automobiliste pourrait ainsi faire le plein de son réservoir d'hydrogène comme il le fait aujourd'hui avec de l'essence...
Fortuitement, il est apparu que la surface des microsphères pouvait être utilisée d'une autre manière. En cherchant à faire croître à l'intérieur des sphères des nanostructures capables de fixer des molécules diverses, l'équipe a remarqué qu'elles pouvaient aussi se développer à l'extérieur, sur la surface de la bille. Il n'en fallait pas plus pour imaginer des applications médicales. En collaboration avec une université de médecine, les scientifiques cherchent à accrocher ainsi des protéinesprotéines ou des molécules fluorescentes pour réaliser une nouvelle génération de marqueurs pour les examens en RMNRMN.
En tout, une demi-douzaine d'applications est actuellement à l'étude. Même si toutes n'aboutissent pas, il est probable que ces microsphères feront un jour parler d'elles..