Évaporer de l’eau sous une simple lumière verte sans apporter de chaleur ? Eh bien oui, c’est possible. Cet effet photomoléculaire a été découvert récemment par une équipe du MIT (Massachusetts Institute of Technology). Il permet d’expliquer certaines observations jusque-là incomprises et pourrait avoir d’importantes applications notamment dans les procédés de dessalinisation.


au sommaire


    L'évaporation est un phénomène physique très commun et sur lequel on pourrait penser tout savoir. Il s'agit du passage d'un liquide à l'état gazeuxétat gazeux, pour une température inférieure à celle d'ébullition. L'évaporation fait donc partie des six principales transitions de phase de la matière, aux côtés de la liquéfaction, de la solidification, de la fusion, de la sublimationsublimation et de la condensationcondensation.

    L’évaporation, un changement d’état dont on pensait tout connaître… ou presque !

    Ce changement d’état se réalise lorsque les moléculesmolécules d'un liquide (dont la surface est libre) sont agitées par une énergie thermiqueénergie thermique, autrement dit par apport de chaleur. Certaines molécules présentes en surface vont alors être éjectées dans l’air, rejoignant ainsi la partie gazeuse. La quantité de molécules éjectées du liquide va dépendre notamment de la température du liquide, mais également de la quantité de vapeur déjà présente dans l'airair et de la pressionpression de vapeur saturante du liquide en question, qui dépend, elle aussi, de la température ambiante.

    Quels éléments affectent la température d'ébullition de l'eau ? On vous dit tout dans cet épisode de Science ou Fiction, qui vous aidera aussi en cuisine !

    Dans le processus d'évaporation, on remarque donc que l'apport de chaleur joue un rôle important. Et pourtant, dans certains cas, il est possible de s'en affranchir totalement. C'est ce qu'ont découvert des chercheurs du MIT (Massachusetts Institute of Technology). Une étonnante découverte qui permet d'expliquer enfin nombre d'observations !

    L'évaporation se fait habituellement lorsqu'il y a apport de chaleur. © Juraj Varga, Pixabay
    L'évaporation se fait habituellement lorsqu'il y a apport de chaleur. © Juraj Varga, Pixabay

    Trop de vapeur par rapport à la chaleur reçue

    Des expériences récentes avaient en effet montré que le taux d'évaporation de l'eau retenue dans une sorte d’éponge faite d’hydrogel était bien trop élevé pour être expliqué uniquement par la quantité de chaleur reçue par l'eau. Les taux d'évaporation étaient d'ailleurs plutôt conséquents : le double, voire le triple de la valeur théorique attendue !

    Un phénomène mystérieux qui pourrait donc être en passe d'être expliqué. S'étant emparée de l'affaire, une équipe du MIT a en effet découvert que sous certaines conditions, la lumièrelumière seule, sans apport de chaleur, peut provoquer l'évaporation d'une façon très efficace. Plus efficace, même, que lorsqu'il y a apport de chaleur. Les résultats ont été publiés dans la revue PNAS.

    Les expériences ont été menées sur des matériaux composés d'hydrogelhydrogel, mais les chercheurs pensent que ce phénomène peut se produire dans d'autres environnements naturels, notamment à la surface de la mer, ou en surface des gouttes qui forment les nuagesnuages ou la brumebrume.

    L’énergie des photons solaires utilisée pour l’évaporation

    Pour réaliser leurs expériences, les scientifiques ont placé un hydrogel gorgé d'eau sous des lumières de couleurscouleurs différentes tout en mesurant en direct le taux d'évaporation et en veillant à ce qu'il n'y ait aucun apport de chaleur. Les mesures ont révélé que l'évaporation était la plus efficace sous une certaine longueur d'ondelongueur d'onde de lumière verte.

    Évaporation à la surface d'un hydrogel chargé d'eau placé sous une lumière verte. © Yaodong Tu, Jiawei Zhou, Shaoting Lin, Mohammed Alshrah, Xuanhe Zhao et Gang Chen
    Évaporation à la surface d'un hydrogel chargé d'eau placé sous une lumière verte. © Yaodong Tu, Jiawei Zhou, Shaoting Lin, Mohammed Alshrah, Xuanhe Zhao et Gang Chen

    Il apparaît que si ni l'eau ni l'hydrogel en eux-mêmes n'absorbent beaucoup la lumière, la combinaison des deux produit un matériaumatériau hautement absorbant, ce qui lui permet d'exploiter efficacement l'énergie des photonsphotons solaires et d'entraîner une évaporation de l'eau à la surface du matériau.

    D’importantes implications pour les procédés de dessalinisation par exemple

    Ce phénomène nommé « effet photomoléculaire » pourrait avoir d'importantes applicationsapplications, notamment pour augmenter l'efficacité des systèmes de dessalinisation de l'eau de mer basés sur l'énergie solaire. Le procédé de dessalinisation repose sur deux étapes. La première est l'évaporation de l'eau pour la séparer du sel. La seconde consiste à condenser cette vapeur d'eau pour obtenir de l'eau douceeau douce liquide. L'effet photomoléculaire pourrait donc aider à augmenter l'efficacité de la première étape, et donc de faire baisser les coûts du processus. De façon plus générale, il peut trouver une application dans de nombreux procédés qui impliquent l'assèchement d'un matériau.