Il fallait certainement bien du courage pour s’attaquer à un mammouth lancé à pleine vitesse. Pourtant, l’archéologie nous dit que cet animal était l’une des proies fréquemment chassées par les Hommes préhistoriques. Comment faisaient-ils pour venir à bout de cet énorme animal ? Des chercheurs proposent une solution.


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    Les nombreux ossements fossilesfossiles retrouvés sur les sites archéologiques en témoignent : le mammouth faisait partie de l’alimentation des populations préhistoriques. Et nos ancêtres en consommaient visiblement beaucoup. Au point d'avoir participé à l’extinction de cette espèce.

    Voyagez dans le temps à la rencontre du mammouth dans cet épisode de Bêtes de Science, le podcast de l'intelligence animale. © Futura

    Mais comment s'y prenaient nos ancêtres pour chasser ces gros herbivoresherbivores de trois mètres de haut et pesant jusqu'à six tonnes ? L'image populaire de chasseurs tirant des lances ou des flèches sur un mammouthmammouth en furie est-elle réaliste ? Cela suffisait-il vraiment à stopper ce mastodonte recouvert de fourrure et d'un cuir épais ? C'est une véritable question. Une question sur laquelle se sont penchés des scientifiques de l'université de Californie, Berkeley.

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    Pas évident de venir à bout d'un animal pesant plus de six tonnes... © scaliger, Adobe Stock

    Quelle technique de chasse pour venir à bout d’un mammouth ?

    La diversité de pointes et d’armes en pierre taillée datant de la Préhistoire nous révèle que nos ancêtres étaient très certainement des chasseurs hors pair, capables de s'adapter à toutes sortes de proies. De nombreuses pointes de flèches et de lances et des couteaux acérés ont été retrouvés sur les nombreux sites archéologiques qui parsèment le territoire européen. Ont-ils utilisé ces armes pour chasser les mammouths ? C'est possible. Mais face à la difficulté que représente l'abattage d'un tel animal, d'autres scénarios ont été proposés au fil du temps. Les Hommes de la Préhistoire s'attaquaient-ils préférentiellement aux individus blessés ou faibles, plus faciles à abattre ? Construisaient-ils des pièges, comme de grandes fosses, dans lesquels étaient poussés les animaux ? Ou étaient-ils, tous simplement, charognards, récupérant la viande sur des animaux venant de mourir par d'autres causes ? Difficile de savoir.

    L'étude de techniques de chasse existant au sein des populations indigènesindigènes de par le monde pourrait cependant apporter des éclaircissements, tout comme l'analyse de certaines armes connues sous le nom de pointe Clovis. Il s'agit de pointes réalisées en pierre taillée associées à la culture Clovis d’Amérique du Nord. Elles datent d'il y a environ 13 500 ans.

    Des pointes qui n’étaient peut-être pas utilisées comme on le pensait

    Les pointes Clovis possèdent une forme caractéristique, avec des bords parallèles ou convexesconvexes et une base concaveconcave possédant un chenal creusé dans les deux faces de la lame, qui servait certainement à emmancher la pointe sur une hampe fendue ou en deux parties. Leur taille peut aller jusqu'à 20 centimètres de long. On sait d'ailleurs que ces pointes étaient utilisées pour la chasse au mammouth puisque certaines d'entre elles ont été retrouvées au sein de squelettes de cet animal. Reste à savoir comment ces armes étaient utilisées.

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    Exemple de pointes Clovis. © Scott Byram

    Pour cela, les chercheurs ont effectué des tests utilisant des pointes Clovis montées sur une hampe en boisbois. Et il s'est avéré que ces armes n'étaient certainement pas utilisées comme des lances. La puissance générée par un bras humain, même en s'y mettant à plusieurs, aurait en effet été insuffisante pour abattre un animal aussi imposant. Si l'on regarde le rapport de force, la puissance est plutôt du côté de l'animal, surtout si celui-ci est en train de charger. Et si les chasseurs de la Préhistoire avaient tiré parti de cela ?

    Un pieu planté dans le sol

    Les chercheurs pensent ainsi qu'au lieu de lancer la hampe munie d'une pointe, les chasseurs l'auraient plutôt utilisée comme un pieu planté fermement dans le sol. Grâce à la vitesse de charge du mammouth, les pointes auraient ainsi pénétré bien plus profondément dans la chair de l'animal, causant bien plus de dégâts. Une technique qui, quand on y regarde bien, a d'ailleurs été largement utilisée au fil du temps, notamment pour stopper les charges de la cavalerie.

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    Des pics dressés et appuyés fermement sur le sol étaient l'une des techniques permettant de stopper une charge de cavalerie. © dessin original de Ronald R. Nelson, Scott Byram et al. 2024, Plos One

    Mais ce n'est pas tout. Il est possible que l'arme ait été volontairement construite pour que la pointe, sous une pression suffisante, recule entre les deux morceaux de bois servant à la maintenir en place. Avec ce système, le bout du pieu s'écarte, causant encore plus de dommages. Un peu à l'image des balles à pointe creuse actuelles.

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    La construction des pieux permettait à la pointe, sous une certaine pression, d'écarter l’extrémité de l'arme, causant encore plus de dégâts au mammouth. © Scott Byram et al. 2024, Plos One

    Ces résultats, publiés dans la revue Plos One nous révèlent une fois de plus toute l'ingéniosité dont étaient capables nos ancêtres du Paléolithique.