Déjà froid, le climat se dégrade encore plus il y a 28 000 ans. Une grande partie de l’Europe se retrouve ainsi sous les glaces. Si les nombreux sites archéologiques nous révèlent que la région n’a cessé d’être habitée, une nouvelle étude montre que cette période a toutefois été très difficile à traverser pour les groupes de chasseurs-cueilleurs.


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    Si aujourd'hui nos sociétés sont menacées par le réchauffement climatiqueréchauffement climatique (dont nous sommes à l'origine), il y a 28 000 ans c'est plutôt le froid qui a mis à mal les populations de chasseurs-cueilleurs.

    Nous sommes alors à la fin du PléistocènePléistocène et il faut dire qu'il règne en Europe un climatclimat glacial. Durant cette période qui marque le dernier maximum glaciaire, d'épaisses calottes de glace recouvrent en effet une grande partie du territoire. Cette couverture gelée s'étend ainsi jusque dans le nord de l'Allemagne et de la Pologne et recouvre une grande partie de l'Irlande et de l'Angleterre. Les reliefs alpins sont quant à eux enfouis sous d'épais glaciersglaciers qui descendent jusque dans les plaines.

    Lors du dernier maximum glaciaire, une épaisse couche de glace recouvrait une large part de l'Europe du Nord. © Ulamm, Wikimedia Commons, cc by-sa 3.0
    Lors du dernier maximum glaciaire, une épaisse couche de glace recouvrait une large part de l'Europe du Nord. © Ulamm, Wikimedia Commons, cc by-sa 3.0

    Des dents qui témoignent de l’état démographique des populations de la Préhistoire

    Sur ce territoire gelé vivent pourtant des communautés d'Homo sapiensHomo sapiens. Si la présence de ces habiles chasseurs-cueilleurs est attestée dans toute l'Europe durant l'ensemble du dernier âge glaciaire, les températures glaciales (de 3 à 6 °C inférieures à celles d'aujourd'hui en moyenne) auraient pourtant fait vaciller les populations, notamment dans l'ouest de l'Europe.

    Ce sont les résultats d'une nouvelle étude publiée dans la revue Science Advances. Une équipe de chercheurs s'est penchée sur l'analyse de dents humaines provenant de 450 individus ayant vécu entre 47 000 et 7 000 ans. Les dents représentent en effet les éléments les plus durs du corps humain et sont ainsi souvent retrouvées dans les registres fossilesfossiles. De plus, la morphologiemorphologie des dents possède un caractère hérité, qui peut servir à retracer les relations génétiquesgénétiques entre les individus. Les chercheurs ont donc examiné les motifs des crêtes et des sillons, la forme de la couronne, la présence de dents de sagesse ou non, afin d'observer l'évolution démographique durant ce dernier âge glaciaire.

    Trois crânes provenant de la grotte de Hohlenstein-Stadel dans le sud de l'Allemagne. Ils sont datés de 8 500 ans, et auraient visiblement appartenu à des membres d'une même famille. À gauche, un homme ; au centre, un enfant ; à droite, une femme. © <em>Osteological Collection, University of Tübingen</em>
    Trois crânes provenant de la grotte de Hohlenstein-Stadel dans le sud de l'Allemagne. Ils sont datés de 8 500 ans, et auraient visiblement appartenu à des membres d'une même famille. À gauche, un homme ; au centre, un enfant ; à droite, une femme. © Osteological Collection, University of Tübingen

    Des groupes isolés et en déclin

    Les résultats montrent que si dans la première partie de cette ère glaciaire, entre 47 000 et 28 000 ans, les populations de l'ouest et de l'est de l'Europe semblent avoir été plutôt bien connectées d'un point de vue génétique, indiquant l'existence d'échanges entre les différents groupes, les choses ont drastiquement changé entre 28 000 et 14 700 ans. En plein cœur du maximum glaciaire, les différents groupes se sont en effet retrouvés isolés, chacun enregistrant une baisse démographique importante et une perte de la diversité génétique.

    Durant cette période, le climat très rude ainsi que la progression des glaces vers le sud ont transformé le paysage. Les steppessteppes se sont muées en de vastes toundrastoundras désertiques. Les proies habituelles se sont raréfiées, entraînant certainement des difficultés à se nourrir. Les données suggèrent d'ailleurs que les populations de l'ouest de l'Europe se seraient alors éteintes. Elles seront remplacées par des groupes en provenance de l'est lors du début du retrait glaciaire.

    Ces résultats reposent sur le développement d'algorithmes d'apprentissage automatique. Une nouvelle méthodologie prometteuse qui pourrait s'appliquer dans le futur à de nombreuses études en archéologie.