Dis-moi comment tu enterres tes morts, je te dirai qui tu es. Si notre façon d’inhumer les défunts est en effet révélatrice de notre culture, cela est aussi vrai pour les sociétés préhistoriques. La comparaison entre les tombes d’Homo sapiens et de Néandertal permet d’ailleurs de révéler les différences qui ont marqué ces deux espèces humaines.
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Nos rites funéraires sont révélateurs de nos croyances, de la façon dont nous concevons la mort et le monde en général, et aussi des rapports sociaux qui unissent les membres d'une communauté. En bref, leur analyse est précieuse pour connaître notre histoire. Elle aide notamment à comprendre l'évolution culturelle de sociétés disparues de la Préhistoire.
De nombreuses sépulturessépultures ont en effet été retrouvées lors de fouilles archéologiques, indiquant qu'Homo sapiensHomo sapiens, mais aussi Néandertal enterraient leurs morts. Mais ces deux groupes humains suivaient-ils les mêmes rituels funéraires ? Que peuvent nous apprendre ces sépultures sur les différences qui séparaient ces deux sociétés qui se sont côtoyées ? Voilà les questions auxquelles ont tenté de répondre deux chercheurs.
Deux espèces humaines différentes, deux pratiques funéraires
Dix-sept sépultures néandertaliennes et quinze sépultures sapiens ont ainsi été analysées. Elles sont toutes situées dans la région du Levant, où les deux espèces humaines ont coexisté à plusieurs reprises durant le Paléolithique moyen, jusqu'à la disparition de NéandertalNéandertal il y a environ 55 000 ans.
Le Levant représente une région importante pour ce type d'étude puisqu'il apparaît que c'est là qu'aurait soudainement émergé, chez les deux espècesespèces, la pratique funéraire qui consiste à enterrer les morts. En comparant l'emplacement des lieux d'inhumation, la position des squelettes, le sexe et l'âge des individus enterrés, mais aussi la présence d'objets déposés aux côtés du défunt, les scientifiques ont pu mettre en évidence des différences notables entre ces deux communautés.
Des différences révélatrices de deux conceptions du monde
Il apparaît en premier lieu qu'Homo sapiens et Néandertal ne faisaient pas de distinction de sexe ni d'âge, même si les chercheurs notent que les sépultures d'enfants sont plus fréquentes chez Néandertal. Les deux espèces avaient également l'habitude d’ajouter des restes d’animaux dans les tombes, comme des cornes de chèvre, des boisbois de cerf, des mandibulesmandibules... Pourtant, certains indices révèlent des différences profondes entre les deux groupes humains. Le lieu, déjà. Alors qu'Homo sapiens enterrait ses morts juste à l'entrée des grottes ou sous des abris sous roche, Néandertal avait tendance à placer les sépultures clairement à l'intérieur des grottes, suggérant une approche différente du monde souterrain et de son lien avec le monde des morts. Ensuite, la position. Il semble qu'Homo sapiens ait en effet suivi un schéma très régulier, positionnant toujours le défunt en posture fœtale, tandis que Néandertal ne semblait pas accorder une telle importance à la position du mort.
Enfin, la nature des objets accompagnant le défunt. Chez Néandertal, il s'agit le plus souvent de gros cailloux, parfois positionnés sous la tête comme un coussin. Chez Homo sapiens, on trouve par contre, souvent, des ocresocres ou des coquillages, une pratique totalement absente chez son cousin.
Même si elles restent difficiles à interpréter, ces différences dans la façon d'enterrer les morts sont révélatrices de l'existence de deux cultures différentes et de deux façons de voir le monde. Ces résultats ont été publiés dans la revue L’Anthropologie.