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Depuis la fin des années 2000, grâce aux progrès technologiques et à des méthodes très prometteuses, plusieurs études de l'atmosphère d’exoplanètes ont été entreprises, esquissant ainsi les premières cartes météorologiques de ces mondes lointains. Elles offrent un aperçu bienvenu sur l'activité intérieure de la planète et témoigne même de sa genèse.
En effet, à l'instar de l'enveloppe gazeuse de la Terre qui, de par sa composition et son dynamisme, reflète les conditions qui règnent à la surface de notre biosphèrebiosphère, l'atmosphèreatmosphère des exoplanètes peut en dire long sur leur activité. Pour notre planète, parmi les différentes couches qui se superposent, la stratosphèrestratosphère est celle qui nous protège des rayons nocifs du Soleil grâce, entre autres, à la présence d'ozone qui absorbe notamment les rayonnements ultraviolets. Ce processus vital pour nous occasionne un refroidissement du sommet de la couche inférieure appelée troposphèretroposphère (de 0 à 10-15 km d'altitude). Aussi fait-il plus chaud à mesure qu'on se rapproche du sol. Dans la stratosphère, c'est le phénomène inverse qui se produit -- les scientifiques l'appellent « inversion de températureinversion de température » -- : il fait plus froid dans la partie basse et de plus en plus chaud en prenant de l'altitude. Chez nous, c'est l'ozone qui nous protège et, dans le cas des planètes géantes comme JupiterJupiter et SaturneSaturne, ce rôle est attribué à des hydrocarbureshydrocarbures.
Mais qu'en est-il des Jupiter chaudesJupiter chaudes ? Existe-t-il le même processus dans leur haute atmosphère en dépit des températures infernales qui brisent les moléculesmolécules d'hydrocarbures ou d'ozone ? « Certaines de ces planètes sont si chaudes dans leur haute atmosphère qu'elles bouillonnent dans l'espace », signale Avi Mandell. Le planétologue au centre de vol Goddard de la NasaNasa a participé à une étude publiée le 12 juin dans The Astrophysical Journal sur la possible existence d'un « écran protecteur » dans la stratosphère de l'ardente WASP-33b.
L’atmosphère de WASP-33b a pu être étudiée avec Hubble lors des passages de la Jupiter chaude derrière son étoile hôte. En l’absence d’une stratosphère, la température baisserait progressivement en altitude or la présence vraisemblable d’oxyde de titane dans son atmosphère permet d’absorber une partie du rayonnement ultraviolet et de réchauffer cette région de l’enveloppe gazeuse, comme cela a pu être observé. © Nasa, Goddard
Une Jupiter chaude enveloppée d’un écran protecteur
Découverte en 2006 (confirmée en 2010), WASP-33b est la seule exoplanète connue gravitant autour de l'étoileétoile éponyme WASP-33, distante de quelque 370 années-lumièreannées-lumière de notre Système solaireSystème solaire. Séparée de seulement trois millions de kilomètres (0,02 fois la distance Terre-Soleil et seulement 7 % de la distance MercureMercure-Soleil !) de son soleil, cette planète gazeuseplanète gazeuse 4,6 fois plus massive que Jupiter boucle son orbiteorbite en près de 30 heures. Dans ces conditions, nul doute que la température est très élevée à sa surface. Ces caractéristiques lui valent d'ailleurs d'appartenir aux Jupiter chaudes, une catégorie comptant des centaines de cas sur les 1.931 exoplanètes confirmées depuis 1995 (chiffres de juin 2015 via Exoplanet.eu).
Pour mettre en évidence une possible inversion de température, l'équipe de chercheurs emmenée par Korey Haynes (jeune diplômé de l'université George Mason, à Fairfax, aux États-Unis) a disséqué le spectrespectre acquis dans le proche infrarougeinfrarouge avec la caméra WFC3 (Wide Field Camera 3) d'HubbleHubble. En comparant les signatures de l’eau avec celles d'autres gazgaz présents en profondeur, les chercheurs ont conclu que les émissionsémissions de l'eau provenaient de la stratosphère, où la température est d'environ 3.300 °C, tandis que les autres émissions sont issues de gaz à plus basse altitude, où la température avoisine 1.600 °C. Les astronomesastronomes pointent l'oxyde de titanetitane comme principal responsable de l'absorptionabsorption des rayonnements visibles et ultraviolets de l'étoile toute proche, un des rares composants pouvant résister à des températures si élevées.
« Comprendre les liens entre la stratosphère et la composition chimique est essentiel pour étudier les processus atmosphériques des exoplanètes », souligne l'un des auteurs, Nikku Madhusudhan, de l'université de Cambridge. « Notre découverte marque une percée importante dans cette direction » conclut-il.