En 2019, des chercheurs ont repéré, dans la constellation de Cassiopée, à quelque 10.000 années-lumière de notre Terre, une étoile aux propriétés inhabituelles. En y regardant de plus près, ils pensent aujourd’hui avoir découvert un nouveau type d’étoile.


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    Les nébuleuses sont des nuages de gaz et de poussière. Parfois, elles sont associées à une ou plusieurs étoiles. C'est le cas de IRAS 00500+6713, justement. Une nébuleuse circulaire qui entoure une étoile que les astronomesastronomes ont appelée J005311. Cette étoile a attiré leur attention en 2019, notamment parce qu'elle est riche en oxygène et parce que ses ventsvents stellaires se déplacent à une vitesse inhabituellement élevée de 16.093 km/s. Ils ont alors pensé avoir débusqué les restes d'un événement rare : une fusion de deux naines blanchesnaines blanches qui aurait donné naissance à une nouvelle naine blanche.

    Mais J005311 restait trop brillante - 40.000 fois plus que notre SoleilSoleil - pour être une naine blanche. Elle émettait aussi dans le domaine des rayons Xrayons X. Et elle se composait essentiellement d'oxygène et de néonnéon. De quoi suggérer qu'elle corresponde plutôt à un sous-produit d'une collision entre naines blanches qui n'aurait pas donné naissance à une naine blanche.

    J005311 se dévoile ici dans le domaine des rayons X sur une image en fausses couleurs. © L. Oskinova, XMM-Newton, ESA, Université de Potsdam
    J005311 se dévoile ici dans le domaine des rayons X sur une image en fausses couleurs. © L. Oskinova, XMM-Newton, ESA, Université de Potsdam

    Une nouvelle étoile et une nouvelle supernova en prime

    Pour en avoir le cœur net, des astronomes ont utilisé le télescope XMM-Newton de l'ESA, l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne pour observer le système dans les rayons X. Ils ont révélé, dans la nébuleuse et l'étoile, des quantités importantes de néon, de siliciumsilicium et de soufresoufre. Elles ont aussi montré que les gazgaz qui forment la nébuleuse sont extrêmement chauds.

    Pour expliquer ces caractéristiques, les chercheurs racontent désormais l'histoire suivante. Au début, il devait y avoir deux naines blanches. La plus grosse a peu à peu aspiré la matièrematière de sa compagne. Menant à une explosion en supernova. Très classique, jusque-là. Mais si cette explosion a été suffisamment puissante pour éjecter de grandes quantités de matière et former une nébuleuse, elle ne l'a pas été assez pour détruire le système. Quelque chose a survécu. L'étoile d'un genre jamais encore observé : J005311.

    Pour le confirmer, il faudra d'autres observations. D'autres modélisationsmodélisations. Mais en attendant, les chercheurs croient aussi avoir découvert un nouveau type de supernovasupernova. Et ils l'imaginent plutôt commun dans notre galaxiegalaxie. Ayant seulement échappé aux observations à cause de leur duréedurée de vie très courte, ne dépassant pas les 10.000 ans.


    Deux étoiles mortes ont ressuscité en fusionnant

    Les naines blanches sont des cadavres stellaires, les restes d'étoiles défuntes où les réactions thermonucléaires se sont arrêtées. Très rarement, et de façon transitoire, elles peuvent se rallumer quand deux naines blanches ont fusionné en entrant en collision. C'est ce qui a dû se produire pour l'étoile découverte dans une nébuleuse planétairenébuleuse planétaire atypique.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 23/05/2019

    En illustration, ce ne sont pas des naines blanches. Il s'agit de VFTS 532, le système d’étoiles doubles le plus chaud et le plus massif connu à ce jour. La binaire de contact KIC 9832227, proche du baiser ultime, doit certainement avoir cette apparence de cacahuète. © ESO, L. Calçada
    En illustration, ce ne sont pas des naines blanches. Il s'agit de VFTS 532, le système d’étoiles doubles le plus chaud et le plus massif connu à ce jour. La binaire de contact KIC 9832227, proche du baiser ultime, doit certainement avoir cette apparence de cacahuète. © ESO, L. Calçada

    Décidément, les archives de la mission Wide-field Infrared Survey Explorer (Wise) sont pleines de surprises. Elles avaient déjà permis à l'astronome brésilien Denilso Camargo de faire plusieurs découvertes concernant les amas d'étoiles dans la Voie lactéeVoie lactée mais aujourd'hui, c'est une équipe internationale d'astronomes, russes pour l'essentiel, qui annonce avoir fait une découverte avec ces données.

    Comme les chercheurs l'expliquent dans un article publié dans le journal Nature, en accès libre sur arXiv, tout a commencé avec la détection d'une nébuleuse planétaire inhabituelle dans l'infrarougeinfrarouge par Wise. Cataloguée sous le nom de J005311, elle est située dans la constellationconstellation de Cassiopée, à environ 10.000 années-lumièreannées-lumière du Système solaireSystème solaire dans la Voie lactée. En son centre, on trouve une étoile qui de prime abord ressemble à une naine blanche classique.

    Sauf que normalement, une nébuleuse planétaire produite par la fin d'une étoile peu massive sur la séquence principaleséquence principale et qui est devenue une naine blanche n'est pas seulement brillante dans le domaine infrarouge. Elle se signale aussi dans le domaine visible comme le montre bien le célèbre exemple de la Nébuleuse de la Lyre (en anglais Ring Nebula), photographiée par le télescopetélescope HubbleHubble, inscrite dans le Catalogue de Messier sous le nom M57M57.

     Des images infrarouges en fausses couleurs prises par Wise (panneaux a et b) sont comparées à une image prise dans le visible (panneau c) montrent toute l'étrangeté de J005311. © Vasilii Gvaramadse/Moscow University
    Des images infrarouges en fausses couleurs prises par Wise (panneaux a et b) sont comparées à une image prise dans le visible (panneau c) montrent toute l'étrangeté de J005311. © Vasilii Gvaramadse/Moscow University

    Ce n'est pas le cas de J005311. Qui plus est, une étude fine de la composition de l'atmosphèreatmosphère de l'étoile centrale, et aussi de la nébuleuse elle-même, ne montre pas la présence de noyaux d'hydrogènehydrogène et d'héliumhélium, en contradiction avec ce que l'on observe très généralement avec les naines blanches dans leur nébuleuse planétaire. Les modèles d'atmosphères stellaires permettent de rendre compte des autres caractéristiques des données spectrales observées en faisant intervenir une température de surface d'environ 200.000 K et une vitesse d'éjectionvitesse d'éjection de vents stellaires record d'environ 16.000 km/s, associées à une rotation stellaire rapide et un champ magnétiquechamp magnétique puissant facilitant l'accélération de ces vents.

    Une demi-douzaine d'étoiles zombies dans la Voie lactée

    Ces caractéristiques sont également atypiques et l'on peut se convaincre, comme les astrophysiciensastrophysiciens, que l'on est vraiment devant un cas rare lorsque l'on apprend que la massemasse de l'étoile centrale qui se comporte malgré tout comme une naine blanche est supérieure à la masse limite de Chandrasekhar. Pour les chercheurs, il n'y alors plus guère de doute, nous aurions découvert par chance un type d'astreastre dont on estime qu'il n'en existe qu'une poignée dans la Voie lactée, une naine blanche avec une masse de type super Chandrasekhar.


    La vidéo de cet artiste montre la partie centrale de la nébuleuse planétaire Henize 2-428. Le noyau de cet objet unique est constitué de deux étoiles naines blanches, chacune ayant une masse un peu inférieure à celle du Soleil. Elles devraient se rapprocher lentement les unes des autres et fusionner dans environ 700 millions d'années. Cet évènement créera une supernova éblouissante de Type Ia et détruira les deux étoiles. © European Southern Observatory (ESO)

    Ce type d'étoile n'est pas inerte du point de vue des réactions thermonucléaires. Il se formerait par la fusion de deux naines blanches dans un système binaire qui sont entrées en collision pour la même raison que l'ont fait les paires de trous noirstrous noirs et d'étoiles à neutronsétoiles à neutrons qui ont fusionné, détectées par Ligo et Virgo : une perte d'énergieénergie par émissionémission d'ondes gravitationnellesondes gravitationnelles.

    En perdant de l'énergie, les orbitesorbites des naines blanches auraient donc diminué de rayon jusqu'à la collision. D'ordinaire, lorsque cela se produit et que la masse de Chandrasekharmasse de Chandrasekhar de l'objet résultant est dépassé, l'objet résultant s'effondre gravitationnellement sur lui-même en explosant immédiatement sous forme de SNSN Ia.

    Mais dans certains cas rares, les réactions thermonucléaires rallumées stoppent temporairement l'effondrementeffondrement de sorte que l'étoile recommence à faire fusionner des noyaux, et elle apparaît comme une naine blanche atypique dont la masse dépasse légèrement la masse limite calculée initialement par Chandrasekhar, il y a presque 90 ans. Comme les deux étoiles initiales ont un moment cinétiquemoment cinétique et un champ magnétique, les lois de conservation associées impliquent alors que l'étoile résultant tourne rapidement sur elle-même et possède un important champ magnétique, ce qui est bien ce que l'on observe.

    Cela ne va pas durer très longtemps. Le carburant thermonucléaire disponible va s'épuiser et l'on aura alors une SN Ia particulièrement lumineuse.

    Wise (<em>Wide-field infrared survey explorer</em>, en français « Explorateur à grand champ pour l'étude dans l'infrarouge ») est un télescope spatial américain dont la mission consiste à réaliser une cartographie complète des sources infrarouges afin de repérer en particulier les astéroïdes comme les géocroiseurs, les étoiles peu visibles proches du Soleil et les étoiles de notre Galaxie masquées en lumière visible derrière des nuages interstellaires, comme c'est le cas avec certains amas ouverts d'étoiles. © Nasa, JPL-Caltech
    Wise (Wide-field infrared survey explorer, en français « Explorateur à grand champ pour l'étude dans l'infrarouge ») est un télescope spatial américain dont la mission consiste à réaliser une cartographie complète des sources infrarouges afin de repérer en particulier les astéroïdes comme les géocroiseurs, les étoiles peu visibles proches du Soleil et les étoiles de notre Galaxie masquées en lumière visible derrière des nuages interstellaires, comme c'est le cas avec certains amas ouverts d'étoiles. © Nasa, JPL-Caltech