Le survol de Cérès, le plus gros objet de la ceinture d’astéroïdes, entre Mars et Jupiter, par la sonde Dawn avait permis d’y détecter la présence de molécules organiques complexes. En sachant que la planète naine a peut-être pu abriter un océan d’eau liquide par le passé, les scientifiques estiment qu’elle a pu présenter autrefois des conditions propices à l’apparition de la vie. L'origine de ces molécules organiques à la surface de Cérès fait ainsi l'objet de nombreuses recherches.
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À la limite entre le Système solaire interne et le Système solaire externe, entre les orbites de Mars et de JupiterJupiter, orbitent des milliards de petits corps célestes, dont les tailles peuvent varier de l'ordre du millimètre au kilomètre. Ils constituent la ceinture principale, ou ceinture d'astéroïdes, formée il y a environ 4,6 milliards d'années par des astéroïdes qui ne se sont pas agrégés en planète. Mais un objet de la ceinture principale dénote nettement des autres, notamment par sa taille : c'est Cérès, la seule planète naine de la ceinture principale. Avec son rayon d'environ 476 kilomètres, CérèsCérès représente à elle seule près d'un tiers de la masse de la ceinture principale. Présentant une grande quantité de glace d'eau à sa surface, c'est d'ailleurs le seul objet sphérique de la ceinture d'astéroïdes.
Découverte dès 1801, la planète naine a récemment fait l'objet de nombreuses études, car les scientifiques estiment qu'il s'agit d'une protoplanète, gardant encore des caractéristiques inchangées depuis la formation de notre Système solaire. La curiosité des scientifiques pour ce corps céleste a été de plus largement attisée depuis la mise en évidence de la présence de matériaux hydratés à sa surface, suggérant la présence d'une quantité significative d'eau dans ses entrailles, et d'un éventuel océan souterrain.
Des observations in situ révélatrices
Afin de percer les mystères de la planète naine, l'Agence spatiale américaine (NasaNasa) avait lancé en 2007 sa sonde Dawn, conçue pour observer de près Cérès ainsi que l'astéroïde Vesta, qui évolue également dans la ceinture d'astéroïdes. Équipée notamment d'un spectromètrespectromètre, qui permet de déterminer à distance la composition chimique des surfaces observées, la sonde avait comme principal objectif d'aider à la compréhension des processus à l'œuvre lors de la formation du Système solaire.
Après ses observations de l'astéroïde VestaVesta, la sonde transite vers Cérès, autour de laquelle elle se place en orbite en 2015. Et les observations de la planète naine ont mené à des résultats surprenants : la sonde a détecté à la surface de Cérès la présence de moléculesmolécules organiques complexes. Combinés avec l'idée que la planète naine pourrait abriter un monde océanique en son sein, ces résultats indiquent que Cérès aurait pu avoir autrefois abrité les ingrédients nécessaires à l'apparition de la vie telle qu'on la connaît. La sonde Dawnsonde Dawn n'est aujourd'hui plus en activité, et est devenue un satellite « passif » de Cérès.
Une origine de ces composés organiques encore débattue
Les composés organiques détectés à la surface de Cérès sont dits aliphatiques : ce sont des hydrocarbureshydrocarbures (uniquement composés d'atomesatomes d'hydrogènehydrogène et de carbonecarbone), dont les chaînes carbonées présentent des structures linéaires (par exemple, le méthane). Depuis leur découverte en 2017, les raisons de leur présence sur la planète naine ont fait l'objet de nombreuses recherches et hypothèses, aboutissant à globalement deux écoles distinctes.
Certains scientifiques estiment que ces composés ont été apportés à Cérès par des impacts de comètescomètes ou d'autres corps célestes riches en composés organiques, tandis que d'autres avancent que ces composés se sont formés par l'altération des composés initialement présents par l'action de l'eau salée. Dans tous les cas, au vu des nombreux impacts que la planète naine a subi (et subi encore), l'évolution de ces molécules organiques à la surface de Cérès est très probablement intimement liée aux impacts quasi omniprésents qui ont façonné sa surface, d'autant plus que les premiers composés organiques détectés étaient localisés près d'un cratère d'impact.
Le fruit de plusieurs processus ?
Mais une récente étude, présentée le 17 octobre à la Geological Society of America (GSA), tend à montrer que l'apparition de ces molécules organiques serait en fait le fruit de plusieurs processus et phénomènes distincts, mélangeant les deux grandes hypothèses précédemment énoncées. Afin de déterminer l'origine de ces composés organiques, les auteurs ont combiné les données recueillies par le spectromètre et celles mesurées par la caméra, embarqués sur la sonde, leur permettant de dresser une cartographie précise de la présence de composés organiques à la surface de la planète naine. Ils ont dans le même temps simulé les conditions d'impact typiques de Cérès, avec des vitessesvitesses d'impact allant de 2 à 6 km/s et des angles d'impact variant entre 15 et 90 degrés par rapport à l'horizontale.
Leurs résultats indiquent ainsi une forte corrélation spatiale entre la présence de composés organiques et la localisation de structures d'impacts, ainsi qu'entre la présence de composés organiques et la présence de minérauxminéraux, comme des carbonates, témoignant de la présence d'eau. Bien que l'origine de ces composés demeure alors encore peu comprise, les scientifiques sont confiants quant à une part non négligeable d'une origine endogèneendogène : ils estiment que ces composés organiques ont pu se former sur Cérès, probablement grâce à la présence d'eau. Cette conclusion pointe vers une existence plausible d'un grand réservoir de composés organiques dans les entrailles de la planète naine, motivant son intérêt pour la recherche de vie extraterrestre.