La transition énergétique est devenue une priorité cruciale pour répondre à la demande croissante en énergie tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre. Dans cette perspective, les centrales électriques spatiales émergent comme une solution à long terme prometteuse. Christophe Bonnal, membre de l’Académie de l’air et de l’espace, a récemment mis en avant les bénéfices et les défis uniques que représentent ces centrales lors d’une intervention au Sénat. Nous avons pu recueillir ses éclairages précieux sur ce concept innovant.


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    La demande croissante en énergie et la préoccupation grandissante face au réchauffement climatiqueréchauffement climatique posent un dilemme complexe aux décideurs politiques. Ils doivent trouver des solutions de remplacement au pétrole et au gaz pour satisfaire les besoins énergétiques tout en prenant en compte les conséquences environnementales. Le monde est à un carrefour critique où les choix énergétiques d'aujourd'hui détermineront le visage de notre avenir.

    Entre perspectives terrestres et spatiales

    Mais, si les alternatives énergétiques telles que l'énergie éolienneénergie éolienne, hydraulique et la biomassebiomasse offrent la possibilité de constituer un mix énergétiquemix énergétique diversifié et durable, favorisant ainsi la transition vers une économie à faible émission de carbone, aucune de ces sources ne pourra à elle seule répondre à la demande croissante d'énergie et aux besoins énergétiques futurs, à l'exception de l'énergie nucléaire, bien que la gestion des déchets nucléaires demeure un défi. Dans ce contexte, l'énergie solaire émerge comme une solution prometteuse et durable pour l'avenir, offrant un potentiel considérable selon l'Agence internationale de l'énergie qui prévoit qu'elle devrait générer plus d'électricité d'ici 2028 que l'éolien et le nucléaire.

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    Christophe Bonnal, membre de l'Académie de l'air et de l'espace, a récemment exposé les défis singuliers de la production d'électricité solaire lors d'une remarquable intervention au Sénat, à l'invitation de l'association Onera Alumni. Au cœur de cette présentation sur les centrales électriques spatiales, il a mis en évidence les avantages et les défis uniques de cette approche novatrice. Pour une compréhension approfondie de l'interview, nous vous recommandons de lire cette présentation « Centrales Électriques Spatiales : Principes et défis ».

    Il n'est pas surprenant de constater que la production d'électricité solaire sur Terre est « perçue comme plus réaliste en matièrematière de coûts et de logistique, tandis que la production depuis l'espace offre un potentiel pour une production continue sans interruptions liées aux conditions météorologiques, et à une échelle considérable ». Les désavantages de la production terrestre incluent la « dépendance aux conditions météorologiques locales, les contraintes d'espace pour les installations, et la réduction de la productivité due à l'obstruction solaire ». Pour ce qui est de la production spatiale, elle est marquée par « des coûts élevés, des défis technologiques liés à la transmission de l'électricité, ainsi que des préoccupations environnementales telles que les opérations en orbiteorbite et la gestion des débris spatiaux ».

    La production d'électricité solaire sur Terre est perçue comme plus réaliste en matière de coûts et de logistique, tandis que la production depuis l'espace offre un potentiel pour une production continue sans interruptions liées aux conditions météorologiques, et à une échelle considérable

    La perspective d'une centrale électrique solaire en orbite « pourrait potentiellement résoudre certains des défis relatifs à la production terrestre ». Elle offrirait une production continue d'électricité, « indépendante des conditions météorologiques terrestres, tout en ouvrant la voie à un approvisionnement en énergie à grande échelle ». Cependant, sa mise en œuvre nécessiterait une infrastructure « de grande envergure et un effort considérable pour surmonter les obstacles techniques, logistiques et financiers ».

    Concept de centrale électrique spatiale SPS-Alpha de John Mankins. © Nasa, John Mankins
    Concept de centrale électrique spatiale SPS-Alpha de John Mankins. © Nasa, John Mankins

    Défis et complexités de l'exploitation des centrales électriques spatiales

    Pour mieux appréhender le fonctionnement d'une station de production d'énergie solaire en orbite, voici une explication détaillée : le processus commence par les cellules photovoltaïquescellules photovoltaïques qui captent l'énergie solaire et la convertissent en électricité. Cette électricité est ensuite transformée en un faisceau d'énergie, généralement des micro-ondes ou des laserslasers, dirigé vers la Terre. À son arrivée sur Terre, ce faisceau est capté par un collecteur spécialisé qui convertit l'énergie en électricité utilisable et distribuable à des fins d'alimentation. Quant à la puissance solaire maximale théorique, elle est de 1 360 W/m2 depuis l'espace et de 1 000 W/m2 au sol.

    L'utilisation de l'énergie solaire depuis les orbites terrestres apparaît comme une solution prometteuse, mais elle « requiert une infrastructure sans précédent en matière de taille, de massemasse et de complexité ». Par exemple, pour satisfaire la moitié des besoins en électricité de la France en 2020, il aurait été nécessaire de « disposer de 25 centrales solairescentrales solaires de 9 km2 et 7 500 tonnes chacune en orbite géostationnaireorbite géostationnaire, totalisant ainsi 187 500 tonnes ». Actuellement, aucun système de lancement « ne peut répondre à cette exigence ». Seul le Starship de SpaceX, en développement, et capable de transporter 100 tonnes en orbite basse par vol « pourrait être en mesure de le faire ». Avec cette capacité, environ 2 000 lancements seraient nécessaires pour atteindre l'objectif de 50 GW, une « perspective potentiellement réalisable sur une période de cinq ans, mais avec un rythme d'un lancement par jour ».

    Le saviez-vous ?

    Parmi les concepts les plus récents, on peut citer le projet SPS-Alpha de John Mankins, un ancien de la Nasa qui prévoit une myriade de petits miroirs focalisés sur un convertisseur de photons en micro-ondes. Avec une masse totale de 7 500 tonnes en orbite géostationnaire, SPS-Alpha peut fournir 2 GW d'électricité sur Terre (1 m2 en orbite produit 150-220 W). Autre concept intéressant, Cassiopeia. Cette centrale électrique spatiale, située en orbite géostationnaire, prévoit l’utilisation d’un immense réflecteur de 17 000 kilomètres de diamètre (1 m2 en GEO produit 255 W). D’une masse envisagée de 2 500 tonnes, elle pourrait fournir 2 GW (au sol).

    Outre les défis liés au processus de lancement, de nombreux défis technologiques devront être surmontés pour les opérations en orbite, notamment le contrôle d'attitude et la gestion des collisions, qui nécessiteront 13 tonnes de xénonxénon, argonargon, kryptonkrypton... chaque année « qu'il faudra livrer en orbite ». Des préoccupations telles que « l'obsolescence, la maintenance fréquente et la planification de la fin de vie des stations solaires spatiales, ainsi que la question du recyclagerecyclage des éléments pour éviter la saturation des orbites dites cimetières, devront être abordées dès la conception de la centrale spatiale ». Quant à leur sécurité, ces infrastructures spatiales seront « exposées à des risques potentiels d'attaques en raison de leur taille importante, qu'il faudra également tenir ».

    Une viabilité à long terme incertaine

    Sur le plan financier, bien que la ressource principale soit gratuite (le soleilsoleil), les « coûts opérationnels de ces centrales solaires spatiales rendent le concept moins attractif qu'il n'y paraît de prime abord ». Les estimations des promoteurs « situent les coûts de déploiement à environ 10 milliards de dollars par tranche de 2 GW, soit un coût de production d'électricité entre 7 et 9 centimes de dollar par kWh, comparé à environ 5 centimes de kWh pour l'énergie nucléaire en France (hors EPR) ». Malgré la diversité des concepts de centrales solaires spatiales proposés à différentes orbites depuis les années 1970, des « incertitudes subsistent quant à leur rentabilité et leur viabilité à long terme ».

    En conclusion, il semble peu probable que des centrales électriques spatiales deviennent opérationnelles avant les années 2060-2070, « principalement en raison de limites physiquesphysiques plutôt que de contraintes technologiques ». Pour diverses raisons, il serait peut-être plus raisonnable de se concentrer sur les solutions terrestres plutôt que de s'aventurer dans l'espace, « étant donné que les avantages potentiels d'une telle solution pourraient ne pas justifier les coûts engendrés ». Cependant, les avancées réalisées dans ce domaine pourraient avoir un impact significatif « sur divers secteurs, tels que l'amélioration de l'efficacité des cellules photovoltaïques, la gestion des émissions de micro-ondes ou encore le transfert d'énergie à distance ». Ces progrès pourraient « justifier le lancement de programmes précurseurs pour explorer ces possibilités et en exploiter le potentiel ».