La médaille d'or du CNRS est l’une des plus prestigieuses récompenses scientifiques françaises. L'astrophysicienne Françoise Combes, grande spécialiste des galaxies et de la cosmologie, en est la lauréate cette année 2020.
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Futura est heureux de vous annoncer que la médaille d'or du CNRS, l'une des plus prestigieuses récompenses scientifiques françaises déjà décernée à des chercheurs éminents tels que Alain Brillet et Thibault Damour, a été attribuée à Françoise CombesFrançoise Combes, astrophysicienne à l'Observatoire de Paris. Il y a quelques années, elle avait bien voulu rédiger pour Futura un dossier sur la Voie lactée (voir également à ce sujet son livre avec James Lequeux). Vice-présidente de l'Année mondiale de l'astronomie en 2009, elle en avait dressé pour Futura un bilan. Elle avait également répondu à nos questions au sujet d'une remise en cause, en réalité fumeuse, de l'origine des galaxies elliptiques.
À cette occasion, nous nous étions tout de suite tournés vers elle, puisqu'elle est une spécialiste mondialement reconnue de la formation et de l'évolution des galaxies ainsi que des modèles de matière noirematière noire utilisés en conjonction avec l'énergie noire, pour en rendre compte dans le cadre du modèle cosmologique standard. L'un des principaux pionniers avec la théorie du Big BangBig Bang n'est autre que le prix Nobel de Physique James Peebles.
Présentation par Françoise Combes de son cours 2016-2017 : « Énergie noire et modèles d'univers ». © Collège de France
Françoise Combes, aujourd'hui professeure au Collège de France depuis 2014, a vu ses travaux déjà récompensés par de nombreux prix et distinctions. Elle a, par exemple, été faite officier de la Légion d'honneur en 2015, commandeur de l'ordre national du Mérite en 2019 et elle a été lauréate du prix Tycho BrahéTycho Brahé de l'European Astronomical Society en 2009 et du prix R. M. Petrie de la Canadian Astronomical Society en 2013.
Membre de l'Académie des sciences depuis 2004, on peut visionner sur YouTube ses nombreux cours au Collège de France portant sur les galaxies, les trous noirstrous noirs derrière les quasarsquasars et les noyaux actifs de galaxiesnoyaux actifs de galaxies, l'énergie noire et la matière noire. Il est également possible de télécharger ses cours de master en astrophysique sur sa page personnelle. Tous témoignent des nombreux domaines de la cosmologiecosmologie et de l'astrophysiqueastrophysique qu'elle a abordés et auxquels elle a fait des contributions significatives, n'hésitant pas à explorer l'alternative au modèle de la matière noire qu'est la théorie Mond. Elle évoque d'ailleurs dans son ouvrage grand public « Mystères de la formation des galaxies : Vers une nouvelle physique ? ».
Nous avons un témoignage de cette influence dans de nombreuses disciplines avec le commentaire dans un communiqué du CNRS par Antoine Petit, son président-directeur général : « Françoise Combes est une sommité scientifique incontestée de la physiquephysique extragalactique au niveau mondial, comme en attestent ses nombreux prix internationaux. Son influence s'étend, au-delà de son champ disciplinaire, à toute l'astronomie. C'est une carrière scientifique exceptionnelle et un rayonnement remarquable que le CNRS souhaite honorer en lui décernant sa médaille d'or 2020. »
Jean-Pierre Luminet, directeur de recherche au CNRS et Françoise Combes, Professeur au Collège de France, nous parlent des trous noirs. © Fondation Hugot du Collège de France
De l'antimatière à la cosmologie de la matière noire via l'astrochimie et les galaxies
Sa trajectoire qui l'a menée vers sa médaille d'or du CNRS, Françoise Combes l'a commencée à Montpellier où elle est née le 12 août 1952, ce qui la conduira à étudier à l'École normale supérieure (ENS) d'où elle sortira agrégée de sciences physiques (1975) avant de devenir docteure d'État en astrophysique en 1980. Un article dans le Journal du CNRS détaille son parcours. Après un master en physique quantiquephysique quantique, elle va passer sa thèse en astrophysique théorique avec rien de moins que le fondateur de l'école d'astrophysique française, le regretté Evry Schatzman, auteur d'un célèbre traité sur le sujet avec le regretté Jean-Claude Pecker.
Le sujet de la thèse de Françoise Combes ? La fameuse énigme cosmologique de l'antimatière manquante qui persiste encore aujourd'hui et qui lui fait dire dans l'article du CNRS : « C'est fascinant ! À quel phénomène doit-on ce subtil mais crucial excédent de matière, et donc notamment notre existence ? Avec un petit groupe de chercheurs, dont Evry Schatzman et Roland OmnèsRoland Omnès [Roland Omnès est connu pour ses travaux sur les particules élémentairesparticules élémentaires et l’interprétation de la mécanique quantique, ndlr], nous avons développé un scénario que nos calculs ont finalement invalidé. Un peu perdue à la fin de ma thèse, je me demandais vers quel sujet me tourner. C'est Pierre Encrenaz qui m'a propulsée sur une nouvelle voie... ».
En 1975, elle se tourne alors vers le domaine prometteur de la chimiechimie du milieu interstellaire, à la croisée de la chimie quantique et de la radioastronomie, et qui fait donc grand usage des spectresspectres atomiques et moléculaires. Cela la conduira à participer à la première détection de la moléculemolécule CO (monoxyde de carbonemonoxyde de carbone) non pas dans la Voie lactée mais dans la galaxie d'Andromèdegalaxie d'Andromède, à 2,2 millions d'années-lumièreannées-lumière de la Terre.
En 1989, elle est finalement recrutée comme astronomeastronome à l'Observatoire de Paris, un statut qui lui permettra enfin de se consacrer quasi exclusivement à la recherche, raconte-t-elle. La chimie interstellaire va la ramener vers la cosmologie insensiblement en permettant l'étude de l'anatomieanatomie des galaxies et l'utilisation des molécules comme thermomètrethermomètre pour mesurer la température du rayonnement fossilerayonnement fossile dans le passé via la découverte des premiers systèmes d'absorptionabsorption moléculaires dans l'UniversUnivers lointain. De tels systèmes en relation avec une technique dont Françoise Combes est pionnière, à savoir l’observation des quasars lointains pour la détection de molécules par spectroscopie d’absorption qui permet aussi de poser des bornes sur de possibles variations des constantes de la physique, comme celle de structure fine, en fonction de l'âge de l'Univers.
Françoise Combes va aussi s'occuper de faire progresser les simulations numériquessimulations numériques concernant les galaxies, leur structure spirale et bien d'autres caractéristiques encore. Aujourd'hui, elle est devenue une experte dans le domaine de la matière noire et ses recherches continuent.
Françoise Combes et la théorie du Big Bang. © Société Française de Physique