Les protéines. Elles sont au cœur de la vie. Et les chimistes ont longtemps rêvé de comprendre leurs secrets et de les imiter. Demis Hassabis et John M. Jumper (Google DeepMind, Royaume-Uni) ainsi que David Baker (université de Washington, États-Unis), les lauréats du prix Nobel de chimie 2024, ont fait de ce rêve une réalité.


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    Les protéines sont au cœur même de la chimie de la vie. Vingt acides aminésacides aminés qui s'arrangent selon les informations codées dans notre ADNADN. Formant des chaînes qui se tordent et se replient pour donner à chaque protéineprotéine une fonction bien définie. Certaines se retrouvent dans nos muscles, d'autres deviennent des anticorpsanticorps. Beaucoup forment des enzymes qui pilotent les réactions chimiques de la vie avec une précision étonnante.

    Une protéine peut être constituée de quelques dizaines à plusieurs milliers d’acides aminés. La chaîne forme une structure tridimensionnelle qui est déterminante pour la fonction de la protéine. © Johan Jarnestad, Académie royale des sciences de Suède
    Une protéine peut être constituée de quelques dizaines à plusieurs milliers d’acides aminés. La chaîne forme une structure tridimensionnelle qui est déterminante pour la fonction de la protéine. © Johan Jarnestad, Académie royale des sciences de Suède

    Un Nobel pour la chimie des protéines

    Pendant plus de 50 ans, les chimistes ont essayé de faire le lien entre une séquence d'acides aminés et la structure tridimensionnelle de la protéine qu'elle forme.

    Le saviez-vous ?

    Le prix Nobel de chimie 1962 récompensait déjà des travaux dans le domaine des protéines. Les chercheurs de Cambridge (Royaume-Uni) John Kendrew et Max Perutz avaient utilisé la cristallographie aux rayons X pour présenter les premiers modèles tridimensionnels de protéines. Le prix Nobel de chimie 1972, lui, était allé à l’Américain Christian Anfinsen qui avait découvert que la structure tridimensionnelle d’une protéine est entièrement régie par sa séquence d’acides aminés.

    Et ce sont finalement Demis Hassabis et John M. Jumper (GoogleGoogle DeepMind, Royaume-Uni) qui sont parvenus à résoudre ce problème. Grâce à l'intelligence artificielleintelligence artificielle et plus exactement, aux réseaux neuronaux de type transformateurstransformateurs. Ceux-ci sont en effet capables de trouver des modèles dans d'énormes quantités de données d'une manière plus flexible que les autres et de déterminer efficacement sur quoi se concentrer pour atteindre un objectif particulier.

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    Cette IA a prédit la structure de 200 millions de protéines !

    C'est ainsi qu'en 2020, avec l'aide d'une intelligence artificielle baptisée AlphaFold2 - et désormais accessible au public -, que les chercheurs de Google DeepMind ont prédit la structure de presque l'ensemble des 200 millions de protéines connues. La moitié du prix Nobel de chimie 2024 leur revient.

    Top 7 a été la première protéine entièrement différente de toutes les protéines existantes créées par l’équipe de David Baker (université de Washington, États-Unis). Formée de 93 acides aminés, elle était plus grosse que toutes les protéines artificiellement formées jusqu’ici. © Terezia Kovalova, Académie royale des sciences de Suède
    Top 7 a été la première protéine entièrement différente de toutes les protéines existantes créées par l’équipe de David Baker (université de Washington, États-Unis). Formée de 93 acides aminés, elle était plus grosse que toutes les protéines artificiellement formées jusqu’ici. © Terezia Kovalova, Académie royale des sciences de Suède

    L'autre moitié du prix Nobel de chimie 2024 est attribuée à David Baker (université de Washington, États-Unis). Il a réalisé ce que beaucoup de chimistes pensaient jusqu'alors impossible. Il a mis au point des méthodes informatisées qui permettent de créer des protéines qui n'existaient pas auparavant et qui, dans de nombreux cas, présentent des fonctions entièrement nouvelles.

    Des protéines désormais au service de l’humanité

    Grâce à Demis Hassabis et à John M. Jumper, nous pouvons donc désormais visualiser facilement la structure des petites machines moléculaires que sont les protéines. Des dires des chimistes, « c'est ahurissant ». Cela leur permet de mieux comprendre le fonctionnement de la vie. Y compris pourquoi certaines maladies se développent, comment la résistance aux antibiotiques se produit ou pourquoi certains microbesmicrobes peuvent décomposer le plastiqueplastique.

    La capacité de créer des protéines grâce aux travaux de David Baker est « tout aussi stupéfiante ». Cela peut conduire à de nouveaux nanomatériaux, à des produits pharmaceutiques ciblés, à un développement plus rapide de vaccinsvaccins ou encore à une industrie chimique plus verte. Le tout, comme il est de coutume pour les prix Nobel, « au plus grand bénéfice de l'humanité ».