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Dans un récipient adapté, placez du solvant et un durcisseur, auxquels vous ajoutez un peu de résine époxyde. Faites passer un courant alternatifcourant alternatif dans l'ensemble, et vous verrez (au microscopemicroscope) surgir de longues fibres de polymère. C'est en substance le résultat obtenu par des chercheurs de l'Argonne National Laboratory (Chicago, Illinois).
« Le procédé est très simple, les matériaux sont bon marché et disponibles en abondance et ces fils peuvent grandir sur presque toutes les surfaces que nous avons essayées », explique Igor Aronson, coauteur des travaux publiés récemment dans la revue Nature Communications.
Les « forêts » obtenues sont composées de brins de l'ordre du micromètremicromètre. En appliquant des variantes à leur procédé, les chercheurs ont réussi à obtenir des structures variées : des poils droits et drus, des cheveux avec de nombreuses branches ou encore des « champignonschampignons », c'est-à-dire des segments dotés d'une petite perle à leur extrémité. Des formes qui peuvent tout aussi bien être réversiblesréversibles ou encore permanentes après durcissement.
Ces « cheveux » très fins s’autoassemblent presque instantanément quand les scientifiques appliquent un courant alternatif dans une solution de polymère. Le champ couvert par la caméra ne dépasse pas l’épaisseur d’une carte de crédit. Les chercheurs de l’Argonne National Laboratory peuvent produire tous types de formes avec leur procédé. Les matériaux « chevelus » pourraient devenir utiles pour les technologies à venir dans le domaine de l’énergie, notamment pour de nouveaux types de batteries. © Argonne National Laboratory, YouTube
Matériau « chevelu » pour de grandes surfaces de contact
« Il s'agit d'un nouveau type de structures, s'enthousiasme Alexey Snezhko, également coauteur de ces travaux. Avec cette méthode, nous pouvons produire des structures complexes, possédant ainsi des propriétés uniques. »
Qu'est-ce qui pousse les scientifiques à fabriquer ces rangées de poils miniatures ? La perspective d'une large variété d'applications industrielles, allant des batteries aux cellules photovoltaïques. Tout d'abord, ce genre de poils offre une grande surface de contact dans un espace réduit, ce qui est une qualité appréciable pour certaines réactions chimiques. On pense notamment aux pots catalytiques des automobilesautomobiles. Des poils de l'ordre du micromètre peuvent aussi constituer une surface hydrophobe, également capable de repousser la poussière. Un peu comme les poils microscopiques que l'on trouve sous les pattes des geckos, et qui expliquent leur capacité à coller à presque toutes les surfaces. Sans se l'avouer, nos chercheurs ont donc aussi lorgné du côté du biomimétisme...
Jusqu'à présent, la seule manière d'obtenir ce genre de poils minuscules était d'employer la lithographielithographie, c'est-à-dire en dessinant la forme désirée sur une surface et en supprimant le matériaumatériau superflu. En plus de demander temps et minutie en quantité, ce procédé ne permet que difficilement d'obtenir quelque chose d'uniforme à l'échelle du micron. Ce que parviennent à faire les scientifiques avec leur nouvelle méthode. Alexey Snezhko résume la chose ainsi : « nos polymères s'autoassemblent, ce qui est beaucoup plus facile que de procéder par lithographie ».
Un jour, peut-être, ces petits champignons en polymère seront utiles pour les nouvelles technologies de l'énergie. Les chercheurs peuvent aussi obtenir d'autres formes, comme des sortes de buissons. © Alexey Snezhko, Igor Aronson, Argonne National Laboratory, cc by nc sa 2.0
Un semi-conducteur déposé sur des « cheveux » de polymère
Obtenir de fins filaments de polymères est une chose : encore faut-il pouvoir les utiliser avec d'autres matériaux. C'est ce que les scientifiques ont voulu essayer en déposant une couche de semi-conducteursemi-conducteur à la surface de cette forêt de poils. Pour y parvenir, ils ont utilisé la technique dite de dépôt de couches minces atomiques (Atomic Layer Deposition en anglais). Résultat : une couche de semi-conducteur d'une moléculemolécule d'épaisseur a pu être déposée, preuve que ces formes de polymères pourraient être utilisées dans des cellules solaires ou des batteries. Les chercheurs ont également pu vérifier que leurs forêts peuvent résister à un chauffage à 150 °C, des températures habituelles que l'on retrouve dans certains procédés de fabrication de matériaux composites.
Actuellement, les chercheurs parviennent à générer des poils de l'ordre du micromètre d'épaisseur, soit le centième de l'épaisseur d'une feuille de papier. Mais ce n'est pas encore assez bien pour eux : ils disent vouloir aller encore plus loin, et descendre... jusqu'à l'échelle nanométrique.