Réduire nos émissions de gaz à effet de serre ne suffira pas à maintenir le réchauffement climatique dans des limites acceptables. Il faudra aussi éliminer une part du dioxyde de carbone (CO2) présent dans notre atmosphère. Mais capter ce CO2 est un vrai défi. Que des chimistes ont relevé.


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    Pour maintenir le réchauffement climatiqueréchauffement climatique « bien en dessous » de la barre des +2 °C, nous devons limiter drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre (GESGES). Mais cela risque d'être insuffisant, estiment aujourd'hui les experts de la question. Il faudra sans doute ajouter à notre arsenal d'outils de décarbonation (et certainement pas y substituer), des techniques d'élimination du dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2)) atmosphérique. La reforestation en fait partie. Mais aussi toutes sortes de technologies destinées à capter le CO2. Dans les gaz qui s'échappent des usines. Cela, nous savons le faire. Parce que la concentration est importante. Directement dans l'atmosphèreatmosphère, cela reste plus compliqué. Car les concentrations sont des centaines de fois moindre.

    Les chercheurs travaillent à trouver des solutions. Et des chimistes de l'université de Californie (États-Unis) pourraient bien avoir réalisé une avancée majeure en la matière. Dans la revue Nature, ils présentent un nouveau type de matériau poreux qu'ils ont développé pour absorber le CO2.

    Une structure chimique qui permet d’éliminer efficacement le CO2

    Il y a deux ans, ces chercheurs avaient déjà mis au point à cet effet, un matériau de type Metal-Organic Framework (MOF). Comprenez, un matériau hybridehybride cristallisé qui offre une porosité nettement supérieure à celle des matériaux poreux classiques. Le MOF-808 donnait des résultats très prometteur. Mais il se décomposait après quelques centaines de cycles d'adsorptionadsorption/désorptiondésorption du CO2. Et l'intégration d'amines dans sa structure le rendait aussi peu durable. Une question de volatilitévolatilité du produit et de besoin en énergieénergie important pour la régénération. Eu égard aux besoins en élimination de CO2 qui s'annoncent, il fallait donc trouver une autre solution.

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    « Piéger le CO2 de l'air c'est très difficile. Le procédé est très exigeant sur le plan énergétique. Il faut un matériau qui possède une forte capacité d'adsorption du CO2, qui soit très sélectif, stable à l'eau, stable à l'oxydationoxydation et recyclable. Il doit avoir une température de régénération basse et doit être évolutif. C'est un défi de taille », explique Omar Yaghi, professeur de chimiechimie à l'université de Californie. Son équipe semble aujourd'hui avoir mis la main sur une solution. Dans un matériau qui ressemble aux MOFs. À ceci près que sa structure est maintenue, non par des liaisons entre atomesatomes de métalmétal, mais par des liaisons carbone-carbone ou carbone-azoteazote. Parmi les liaisons chimiques les plus fortes que la nature a inventées. Les chimistes l'ont baptisé COF-999, pour Covalent-Organic Framework.

    Le matériau poreux développé par les chercheurs de l’université de Californie (États-Unis) est de ceux que l’on appelle les structures organiques covalentes (COF). Il possède des canaux hexagonaux décorés de polyamines qui lient efficacement les molécules de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) – boules bleues et orange – à des concentrations trouvées dans l’air ambiant. © Chaoyang Zhao, Université de Californie à Berkeley
    Le matériau poreux développé par les chercheurs de l’université de Californie (États-Unis) est de ceux que l’on appelle les structures organiques covalentes (COF). Il possède des canaux hexagonaux décorés de polyamines qui lient efficacement les molécules de dioxyde de carbone (CO2) – boules bleues et orange – à des concentrations trouvées dans l’air ambiant. © Chaoyang Zhao, Université de Californie à Berkeley

    Encore des améliorations possibles, notamment grâce à l’intelligence artificielle

    « Nous avons pris une poudre de ce matériau, l'avons mis dans un tube et nous y avons fait passer de l'airair extérieur pour voir comment il se comportait. Cela a été magnifique. Il a littéralement nettoyé l'air de son CO2. De tout son CO2 ! » Pour donner quelques chiffres, lorsque 400 parties par million (ppmppm) de CO2 sont pompées dans le COF à température ambiante (25 °C) et 50 % d'humidité, il atteint la moitié de sa capacité en environ 18 minutes et se remplit en environ deux heures. Pour le régénérer, un chauffage à une température relativement basse (60 °C) suffit.

    Le saviez-vous ?

    Actuellement, la concentration de CO2 dans l’atmosphère est supérieure à 420 parties par million (ppm). Elle va encore augmenter, peut-être jusqu’à 500 ou 550 ppm, avant que nous ne soyons en mesure de déployer efficacement et à grande échelle le captage de ce CO2.

    « Ce COF a une structure chimiquement et thermiquement stable, il nécessite moins d'énergie et nous avons montré qu'il peut résister à 100 cycles sans perte de capacité. Aucun autre matériau n'a montré de telles performances, assure Omar Yaghi. C'est fondamentalement le meilleur matériau existant pour la capture directe dans l'air ». Son équipe estime pourtant que des optimisations restent encore possibles. Avec l'aide, notamment, de l'intelligence artificielle qui pourrait identifier la meilleure forme pour le COF-999 et même accélérer la conception d'autres COF encore plus efficaces. Et économiquement intéressants.