Fêtera-t-on un jour la fête de la mère du Soleil ? Peut-être. En 2016, les astronomes ont précisé l'identité de la supernova dont l'explosion a engendré notre Système solaire. S'ils ont raison, elle n'était pas trente fois plus massive que le Soleil, comme on le pensait.

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    Article paru le 30 novembre 2016

    Rebondissement dans l'histoire de la formation du Système solaire. Le nuagenuage moléculaire où il est né était être trop peu dense et trop froid pour avoir pu, spontanément, s'effondrer gravitationnellement sur lui-même. Pour expliquer la formation de noter monde, il fallait faire intervenir le passage d'une onde de choc qui aurait comprimé ce nuage et amorcer son effondrementeffondrement. Or, justement, les études de météorites, comme la fameuse chondrite carbonée Allende, avaient montré que certaines d'entre elles portaient des traces d'anciennes radioactivité, aujourd'hui éteintes.

    Ces indices sont des abondances anormalement élevées de certains isotopes qui ne peuvent s'expliquer que par la désintégration complète d'autres isotopes à courtes duréesdurées de vie. La présence de ces isotopes instables ne peut elle-même s'expliquer que s'ils ont été synthétisés et injectés dans le nuage protosolaire par l'explosion d'une supernova juste avant son effondrement. Or, ce type d'explosion produit justement d'importantes ondes de choc dans le milieu interstellaire.

    Il y a quatre ans, les recherches en astrophysiqueastrophysique nucléaire et en cosmochimie avaient dressé un premier visage crédible des caractéristiques de l'étoileétoile qui aurait explosé en supernova. Les chercheurs l'avaient baptisée Coatlicue, la mère du SoleilSoleil dans la cosmogonie aztèque. Il devait s'agir selon eux d'une étoile massive, contenant environ 30 fois la massemasse du Soleil. Mais, selon une équipe de chercheurs qui a publié un article dans Nature Communications (disponible sur arXiv), il n'en serait rien. Coatlicue ne devait représenter qu'environ 12 masses solaires.

    Une coupe de la célèbre météorite Allende. Cette chondrite carbonée contient des structures irrégulières blanchâtres, des CAI (pour <em>calcium-aluminum inclusions</em>, en anglais). Leur formation date de 4,568 milliards d'années et elles contiennent des traces de radioactivités éteintes. © cc by 20 Shiny Things

    Une coupe de la célèbre météorite Allende. Cette chondrite carbonée contient des structures irrégulières blanchâtres, des CAI (pour calcium-aluminum inclusions, en anglais). Leur formation date de 4,568 milliards d'années et elles contiennent des traces de radioactivités éteintes. © cc by 20 Shiny Things

    Des neutrinos qui produisent du béryllium par spallation

    En effet, certaines des abondances d'isotopes qu'aurait dû produire une supernova issue d'une étoile trente fois plus massive que le Soleil ne sont tout simplement pas là. En creusant la question, les chercheurs se sont aperçu, en revanche, qu'il était possible de rendre compte de l'abondance du bérylliumbéryllium 10 dans les météorites à partir de l'explosion d'une étoile moins massive, précisément de 11,8 masses solaires.

    En fait, ce ne sont pas les abondances de béryllium 10 que l'on mesure, car ce noyau est instable et à courte durée de vie, mais celle d'un isotope du borebore qui en est issu. On pensait jusqu'à présent que le béryllium 10 avait été produit par spallation de l'oxygèneoxygène, c'est-à-dire par bombardement de ses noyaux par des rayons cosmiquesrayons cosmiques qui auraient arraché des nucléonsnucléons, changeant l'oxygène en béryllium.

    Mais, selon les astrophysiciensastrophysiciens nucléaires, cet arrachement des nucléons, cette spallation, donc, peut aussi se produire grâce à un flux de neutrinos précis généré par une explosion de supernova, ce que l'on ignorait jusqu'à il y a peu. Ce sont les caractéristiques de ce flux qui permettent de remonter à la masse de l'étoile génitrice de la supernova.

    Les chercheurs veulent consolider leur théorie. Pour cela, il leur reste à mesurer précisément les abondances de lithiumlithium 7 et bore 11 dans les météorites, pour voir si elles sont en accord avec leur modèle de spallation par neutrinosneutrinos.


    Le Soleil serait né de l’explosion d’une supernova

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 30/08/2012

    La généalogie du Soleil dans la Voie lactéeVoie lactée vient peut-être de se préciser. Il serait apparu au sein d'une troisième génération d'étoiles formées en moins de 20 millions d'années dans un nuage moléculaire géant voici environ 4,5 milliards d'années. La supernova ayant provoqué sa naissance résulterait de l'explosion d'une étoile massive d'au moins 30 fois la masse du Soleil, baptisée Coatlicue, la mère du Soleil dans la cosmogonie aztèque.

    Au début des années 1970, des chercheurs comme Robert Clayton et Jerry Wasserburg ont analysé des inclusions riches en aluminiumaluminium et en calciumcalcium (baptisées CAI pour Calcium Aluminum-rich Inclusions) découvertes dans la météorite tombée près du village d'Allende au Mexique, le 8 février 1969. Avec stupéfaction, ils ont mesuré dans ces inclusions blanchâtres des anomaliesanomalies isotopiques concernant certains éléments comme l'oxygène mais surtout avec le magnésiummagnésium, précisément pour les isotopes 26Mg et 24Mg. Ces anomalies ne s'expliquaient que si un Little Bang (une supernova) avait d'abord injecté dans la nébuleusenébuleuse protosolaire (où s'est formée cette météorite) des éléments radioactifs à courte durée de vie (dont l'aluminium 26 se désintégrant en 26Mg), puis provoqué l'effondrement de cette nébuleuse.

    On avait donc de bonnes raisons de penser que l'explosion d'une supernova était responsable de la formation du Système solaire. Les décennies qui suivirent ne firent qu'ajouter de nouveaux éléments en faveur de ce scénario mais des difficultés persistaient lorsque l'on cherchait à rendre compte plus précisément de la formation de la nébuleuse protosolaire. Il fallait faire intervenir des conditions assez particulières, rendues peu crédibles par les observations astronomiques récentes. Ainsi, la formation de telles nébuleuses se fait à une distance trop importante d'une supernova dans un nuage moléculaire pour que l'on puisse expliquer la quantité d'aluminium 26 initialement présent à l'aubeaube de la naissance du Système solaire.


    Le Système solaire s'est formé à partir d'un nuage moléculaire riche en poussières s'effondrant sous sa propre gravité et donnant finalement le Soleil entouré d'un disque protoplanétaire. © Groupe ECP, www.dubigbangauvivant.com ,Youtube

    En se basant sur les abondances d'aluminium 26 et d'un autre isotope à courte période de vie (moins de 100 millions d'années dans les deux cas), le ferfer 60, présents dans la nébuleuse protosolaire, et ayant laissé des traces dans les abondances d'autres isotopes mesurées aujourd'hui dans des météorites très primitives, deux chercheurs viennent de proposer un nouveau scénario pour la naissance du Système solaire.

    Trois générations d'étoiles dans un nuage moléculaire

    Le modèle de Matthieu Gounelle du laboratoire de Minéralogie et cosmochimie du Muséum (Muséum national d'histoire naturelleMuséum national d'histoire naturelle/CNRS) et Georges Meynet de l'Observatoire de Genève, est exposé dans un article de la revue Astronomy & Astrophysics en accès libre.

    On voit sur cette image en infrarouge du gaz froid (en bleu) accumulé autour d'une étoile massive (masquée au centre de l'image) âgée de quelques millions d'années. Il s'agit de la « bulle carrée » G15.68-0.28. Des étoiles de masse solaire vont se former dans la coquille de gaz froid d'environ 1.000 masses solaires et située à 10 parsecs (300.000 milliards de km) de l'étoile centrale. C'est dans une telle coquille que serait né notre Soleil il y a 4,5 milliards d'années, en même temps que quelques centaines d'autres étoiles. © CNRS-Image tirée de Deharveng <em>et al.</em> (2010) <em>Astronomy &amp; Astrophysics,</em> 523, A6.

    On voit sur cette image en infrarouge du gaz froid (en bleu) accumulé autour d'une étoile massive (masquée au centre de l'image) âgée de quelques millions d'années. Il s'agit de la « bulle carrée » G15.68-0.28. Des étoiles de masse solaire vont se former dans la coquille de gaz froid d'environ 1.000 masses solaires et située à 10 parsecs (300.000 milliards de km) de l'étoile centrale. C'est dans une telle coquille que serait né notre Soleil il y a 4,5 milliards d'années, en même temps que quelques centaines d'autres étoiles. © CNRS-Image tirée de Deharveng et al. (2010) Astronomy & Astrophysics, 523, A6.

    Selon le cosmochimiste et l'astrophysicien, tout aurait commencé dans un nuage moléculaire géant contenant des dizaines de milliers d'étoiles. En quelques millions d'années, des étoiles massives seraient nées puis mortes dans ce nuage en explosant en supernovae. Le taux de noyaux de fer 60 radioactifs aurait augmenté jusqu'à atteindre une valeur stationnaire du fait de l'équilibre entre production et désintégration.

    Coatlicue, la mère du Soleil aux centaines de filles

    Dans une région de ce nuage, une deuxième génération de quelques milliers d'étoiles aurait pris naissance, dont la formation aurait été provoquée par la compression du gazgaz, à la suite d'ondes de choc produites par les supernovaesupernovae. L'une d'entre elles, baptisée Coatlicue - la mère du Soleil dans la cosmogonie aztèque - par les chercheurs, étant la plus massive avec environ 30 fois la masse du Soleil. Autour d'elle se serait formée une coquille de matièrematière et d'étoiles similaire à celle que l'on observe aujourd'hui et qui porteporte le nom de « bulle carrée » G15.68-0.28.

    La coquille entourant Coatilicue, qui contient du fer 60, aurait été enrichie en aluminium 26 pendant des millions d'années par les ventsvents stellaires provenant de l'étoile, qui aurait fini par exploser elle-même en donnant une supernova suivant le scénario habituel du Little Bang. Quelques centaines d'étoiles à la composition chimique voisine se seraient alors formées en réponse à la propagation de l'onde de choc de l'explosion, dont notre propre Soleil.

    En moins de 20 millions d'années, trois générations d'étoiles se sont donc succédé dans un nuage moléculaire géant, quelque part dans la Voie lactée, avant que n'y naisse notre Soleil et ses jumelles. Peut-on retrouver ses sœurs dans l'environnement proche de notre étoile aujourd'hui ?

    Certainement pas, comme l'expliquent les deux chercheurs. Car un amas ouvertamas ouvert de jeunes étoiles de ce genre se dissipe en 100 millions d'années environ. Cet amas s'étant formé il y a environ 4,5 milliards d'années et notre Soleil bouclant une orbiteorbite autour du centre de la Voie lactée en quelque 200 millions d'années seulement, les sœurs du Soleil sont désormais complètement dispersées à des dizaines de milliers d'années-lumièreannées-lumière les unes des autres.