Arrivé sur Mars le 6 août 2012, le rover Curiosity devrait continuer à nous renseigner sur la Planète rouge jusqu'en 2026, si tout va bien. Il permet en particulier d'étudier des roches contenant la mémoire des époques passées où l'eau liquide coulait sous une atmosphère bien plus épaisse et chaude qu'aujourd'hui. Certaines argiles inspectées par le rover plaident pour l'existence d'un milieu habitable dans le cratère exploré, jadis occupé par un lac.


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    À défaut de pouvoir identifier des microfossilesmicrofossiles, voire des formes de vie microscopiques dans les sédimentssédiments et le sol martien, les géologuesgéologues terrestres continuent de transposer les connaissances acquises de notre Planète bleue à la Planète rouge pour tenter de rendre de plus en plus probable l'apparition de la Vie il y a des milliards d'années sur Mars.

    Pour cela, ils avaient entrepris d'étudier de plus près les roches présentes dans le fameux cratère Gale et ce avec l'aide du rover Curiosity. Les sondes en orbite autour de Mars avaient en effet découvert des signatures d'un empilement de couches argileuses et de sulfates dans ce cratère d'impact qui s'est vraisemblablement formé vers la fin du Noachien ou le début de l'Hespérien selon les définitions de ces ères géologiquesères géologiques martiennes (il en existe trois, la dernière étant l'Amazonien).


    Une présentation du cratère Gale exploré par Curiosity. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, Jet Propulsion Laboratory


    On pense que de l'eau liquide pouvait exister à ce moment-là sur Mars et comme des argilesargiles de type phyllosilicatesphyllosilicates se forment sous une couche d'eau de surface, ou dans un sous-sol gorgé d'eau et pas forcément très acide - au contraire des sulfates qui témoignent d'alternance de présence passée d'eau acide et de longues périodes sèches -, il valait la peine d'envoyer le rover pour en apprendre plus et tenter de préciser les scénarios d'habitabilité de Mars.

    Une mémoire d'argile

    Gale devait certainement contenir un lac, mais les températures et le pH de ce lac étaient-ils favorables à des formes de vie au moins pendant une partie de son histoire ?

    Elisabeth Losa-Adams, de l'Université de Vigo en Espagne, en compagnie de ses collègues, vient à son tour d'aborder ce sujet, étudié depuis un moment, et ce dans une publication du célèbre journal Nature Astronomy.

     Large de 154 kilomètres de diamètre, le cratère Gale a été formé par l'impact d'un petit corps céleste il y a probablement 3,7 milliards d'années, alors que Mars était encore un peu humide et probablement encore accueillante pour la vie. Il a été occupé par un lac il y a plus de trois milliards d'années, comme le montre cette vue d'artiste, qui s'est asséché à plusieurs reprises, ce qui peut se lire dans l'empilement de couches de dépôts sédimentaires gardant des traces de cours d'eau et de dépôts éoliens. Au centre, se trouve le mont Sharp, un mélange de dépôts lacustres et éoliens recouvrant sans doute un pic central formé par un rebond de la croûte martienne après l'impact. © Nasa
    Large de 154 kilomètres de diamètre, le cratère Gale a été formé par l'impact d'un petit corps céleste il y a probablement 3,7 milliards d'années, alors que Mars était encore un peu humide et probablement encore accueillante pour la vie. Il a été occupé par un lac il y a plus de trois milliards d'années, comme le montre cette vue d'artiste, qui s'est asséché à plusieurs reprises, ce qui peut se lire dans l'empilement de couches de dépôts sédimentaires gardant des traces de cours d'eau et de dépôts éoliens. Au centre, se trouve le mont Sharp, un mélange de dépôts lacustres et éoliens recouvrant sans doute un pic central formé par un rebond de la croûte martienne après l'impact. © Nasa

    CuriosityCuriosity était en mesure de faire sur Mars des mesures que les cristallographes savent faire sur Terre en utilisant des rayons Xrayons X qui sont diffractés par leur interaction avec des roches. En étudiant des données collectées avec l'instrument Chemistry and Mineralogy, en abrégé CheMin, les minéralogistes sont arrivés à la conclusion qu'ils étaient en présence dans la formation Murray du cratère Gale de minérauxminéraux dits glauconitiques. Pour être un peu plus précis, il s'agissait d'argiles parentes de la roche appelée glauconie en raison de son contenu en glauconite.

    Sur Terre, la glauconite se forme par altération diagénétique des biotitesbiotites ou de verre volcanique se formant en milieu marin sur le plateau continentalplateau continental. Dans le cas de Mars et des échantillons étudiés par Losa-Adams dans le cadre d'une modélisationmodélisation du cratère Gale, on peut en conclure que ces argiles n'ont pu se déposer que dans une eau avec un pH neutre et des températures relativement douces bien que fraîches car comprises entre -3 et 15 °C. Ces conditions devaient être fréquemment présentes pendant une duréedurée d'environ 10 millions d'années et on peut penser que ce n'était pas le seul endroit sur Mars à présenter cet environnement stable, favorable à des micro-organismesmicro-organismes.

    Restes des sédiments d'un lac vieux de milliards d'années qui remplissait autrefois le cratère Gale. Les scientifiques de la Nasa ont conclu dès le début de la mission Curiosity que Mars était probablement habitable il y a longtemps, en se basant sur l'étude des restes de mudstone, comme ceux-ci. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS
    Restes des sédiments d'un lac vieux de milliards d'années qui remplissait autrefois le cratère Gale. Les scientifiques de la Nasa ont conclu dès le début de la mission Curiosity que Mars était probablement habitable il y a longtemps, en se basant sur l'étude des restes de mudstone, comme ceux-ci. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS

     


    En bref : des argiles découvertes sur Mars par Opportunity

    Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet publié le  05/09/2012

    Arrivé sur Mars en janvier 2004, le rover OpportunityOpportunity travaille toujours et ses dernières images, analysées par Olivier de GoursacOlivier de Goursac, montrent des affleurementsaffleurements d'argiles qui ont sédimenté sous l'eau...

    On n'a d'yeuxyeux que pour Curiosity, qui s'est posé sur Mars le 6 août 2012. Mais un autre rover roule sur la Planète rouge : Opportunity. Arrivé le 25 janvier 2004 et conçu pour fonctionner au moins 90 jours, cet engin de 185 kgkg est toujours en état de marche, tandis que son collègue Spirit, ensablé en novembre 2009, ne répond plus. Opportunity, lui, en est à son 35e kilomètre et, même si la plupart de ses instruments sont hors service, il peut toujours prendre des photos, comme il le fait depuis son arrivée dans le cratère EndeavourEndeavour.

    Spécialiste de l'analyse d'images et membre de Planète Mars, Olivier de Goursac a repéré sur une des dernières photographiesphotographies envoyées par le rover un affleurement rocheux typique des phyllosilicates, et même d'argiles. Structurée en feuillets, ce minéralminéral peut se former par sédimentationsédimentation au fond de l'eau.

    Depuis son orbite, la sonde MRO en avait déjà observé dans le cratère Endeavour et c'est donc désormais de près qu'Opportunity va les photographier. Il ne pourra faire plus mais, à 4.300 km, de là, le rover Curiosity, avec ses instruments perfectionnés, comme la ChemCam, s'apprête justement à étudier des phyllosilicates dans le cratère Gale, au pied du mont Sharp.