Les étoiles tournent sur elles-mêmes et ce doit aussi être le cas des trous noirs stellaires qui se forment par effondrement gravitationnel de ces étoiles. On pense qu'il en est de même des trous noirs supermassifs au cœur des galaxies et la théorie du rayonnement des quasars fait intervenir de manière cruciale le fait que ces trous noirs sont en rotation. Dans le cas de notre Voie lactée, en plongeant dans les archives des observations en rayons X du satellite Chandra de la Nasa, des astrophysiciens viennent d'en déduire que notre trou noir géant était aussi en rotation, à une fraction considérable de la vitesse de la lumière.

Le trou noir supermassif le plus proche est tout simplement au cœur de la Voie lactée et il contient un peu plus de 4 millions de masses solaires. Nous le savons après des dizaines d'années d'étude des mouvements de certaines étoiles proches de la source d'ondes radio Sagittarius A*. Certaines de ces étoiles subissent une attraction gravitationnelle si intense qu'elles se déplacent en réponse à une fraction notable de la vitesse de la lumière.

Sgr A*, comme on appelle aussi notre trou noir central, est un laboratoire pour comprendre la physique des trous noirs supermassifs derrière les quasars, ces prodigieux noyaux actifs de galaxies. Il nous sert aussi à tester des alternatives à la théorie relativiste de la gravitation d'Einstein et même à tester l'hypothèse de l’existence d’une cinquième force.

On peut étudier Sgr A*, dans le domaine des rayons X, notamment avec le mythique et vénérable satellite Chandra de la Nasa. Une équipe de chercheurs vient d'en déduire une nouvelle estimation de la vitesse de rotation de ce trou noir comme elle l'explique dans un article publié dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.


Le mathématicien Roy Kerr, qui a découvert la solution des équations d'Einstein décrivant des trous noirs en rotation, nous explique la saga de la théorie des trous noirs, avec les problèmes de singularité associés, et sa découverte. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Vetenskapsakademien

Les trous noirs extrêmes et la censure cosmique

Si l'on suppose, non seulement comme c'est désormais très probable, en particulier après les images de l'Event Horizon Telescope, que l'on est bien en présence d'un trou noir de Kerr en rotation, les données de Chandra nous disent que le paramètre décrivant cette rotation se trouve avoir une valeur comprise entre 0,84 et 0,96. Le maximum serait 1 et cela reviendrait très grossièrement à dire -- si on avait comme image de ce trou noir celle d'une sphère solide -- que la surface de cette sphère à l'équateur tourne à la vitesse de la lumière. Techniquement, ce serait ce que l'on appelle un trou noir de Kerr extrême et si l'on imaginait que le paramètre dépassait 1, on n'aurait plus un trou noir car l'horizon des événements disparaitrait, mettant à nu une singularité de l'espace-temps, ce que l'on conjecture être impossible généralement.

Cette conjecture, appelée en anglais Cosmic censorship hypothesis, ce que l'on peut traduire par l'hypothèse de la censure cosmique, a été avancée sous une forme initialement non précise mathématiquement en 1969 par le prix Nobel de physique et mathématicien Roger Penrose.

Les chercheurs sont divisés quant à sa validité.

Rappelons qu'en relativité générale, un trou noir a une forme mathématique précise avec une théorie très élaborée derrière. En gros, un trou noir est défini par l'existence d'une frontière entourant une région d'où, pour s'échapper, il faudrait dépasser la vitesse de la lumière : l'horizon des événements. Nous connaissons toutes les solutions des équations d'Einstein décrivant un trou noir et en plus d'avoir un horizon des événements, elles possèdent de singularités de l'espace-temps où les lois de la physique, comme celle de la causalité, s'anéantissent.

Penrose avait conjecturé que, malgré cela, les lois de la physique isolaient les singularités du reste de l'Univers, les empêchant de causer des problèmes, en les entourant d'un horizon des évènements.


Une présentation des trous noirs extrêmes et de la censure cosmique. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © PBS Space Time

Il existe toutefois des situations, avec des trous noirs en rotation et/ou chargés, qui permettent d'imaginer la disparition de l'horizon des événements selon les paramètres décrivant ces trous noirs. Lorsqu'ils sont sur le point de devenir pathologiques de cette façon, on en parle donc généralement comme des trous noirs extrêmes. La vidéo ci-dessous donne quelques précisions sur ces trous noirs et la censure cosmique.

Des études similaires avec le trou noir M87* montrent que le paramètre décrivant sa rotation est lui compris entre  0,89 et 0,91