Cela fait plusieurs années que des membres de l'Institut Seti se demandent si quelques exoplanètes pas très loin du Soleil et potentiellement habitables ne font pas partie d'un empire galactique extraterrestre. Ils tentent de le savoir en étudiant lors de transits planétaires de possibles communications radio entre les planètes autour de l'étoile Trappist 1, à seulement 40 années-lumière environ du Système solaire.


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    Au début du XXe siècle, on pensait que les planètes du Système solaire étaient nées dans un lambeau de plasma solaire se refroidissant et se condensant arraché au Soleil par le passage rapproché d'une étoile et les forces de marée engendrées par un tel événement cosmique. On savait déjà, en étudiant la densité et les mouvements du gazgaz d'étoiles dans la GalaxieGalaxie, qu'il devait être très rare. Par conséquent, il était raisonnable de penser que le Système solaire avec son cortège de planètes était une rareté dans la Voie lactéeVoie lactée.


    Dans le projet multiplateforme francophone sur la cosmologie contemporaine Du Big Bang au Vivant, Jean-Pierre Luminet et Hubert Reeves nous parlent du programme Seti et des extraterrestres (E.T.). © Groupe ECP, www.dubigbangauvivant.com, YouTube

    L'Institut Seti chasse des E.T. depuis des décennies

    Il est devenu parfaitement clair depuis deux décennies qu'on se trompait et les exoplanètesexoplanètes autour des étoiles apparaissent maintenant comme la règle et pas l'exception, se formant dans des disques protoplanétairesdisques protoplanétaires selon le fameux scénario de Kant-Laplace, considérablement plus développé pendant les années 1960 à 1970 par le Russe Viktor Safronov et l'Américain George Wetherill.

    En est-il de même pour la vie et plus spécifiquement des civilisations intelligentes technologiquement avancées ? Répondre à ces questions est l'objectif de l'Institut Seti, plus généralement du programme Seti qui, depuis plus de 60 ans, tente de détecter des technosignatures de ces civilisations en supposant qu'au moins certaines d'entre elles utilisent les ondes radio ou des faisceaux laserlaser pour communiquer ou se signaler aux autres civilisations qui existent peut-être dans la Voie lactée.

    Hélas, les pionniers qu'étaient Carl Sagan, Frank Drake et leurs collègues russe et ukrainien Nikolaï Kardashev et Iossif Chklovski ne sont plus là pour le voir et commenter les derniers résultats obtenus de cette quête.


    Une présentation de l'Institut Seti. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Seti Institute

    Or, en mai 2016, un groupe d'astronomesastronomes faisait sensation en annonçant la détection de trois exoplanètes autour de l'étoile 2MASS J23062928-0502285 située à environ 40 années-lumièreannées-lumière du Soleil, dans la constellationconstellation du Verseau. La découverte avait été faite avec la méthode des transits planétairestransits planétaires en utilisant Trappist (TRAnsiting Planets and PlanetesImals Small Telescope), un télescopetélescope de seulement 60 centimètres de diamètre à l'observatoire de La Silla (ESOESO), au Chili, géré par l'université de Liège, en Belgique. Rebaptisée pour cette raison Trappist-1, l'étoile fait partie des naines rougesnaines rouges de type M8M8 dites ultrafroides. Elles sont très peu massives et de ce fait, très peu lumineuses. Toutefois, elles représentent pas moins de 18 % des étoiles proches du Soleil, soit un nombre probable de plusieurs centaines.

    L'âge de Trappist 1 - estimé à partir de la théorie de la structure stellaire et des mesures qui la concernent - serait d'au moins 500 millions d'années, mais peut-être aussi jusqu'à plusieurs milliards d'années. Depuis, on a finalement établi qu'il n'y avait pas trois, mais au moins sept exoplanètes rocheuses, dont certaines sont potentiellement habitables.


    Une présentation des dernières découvertes autour de Trappist-1. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, Jet Propulsion Laboratory

    Nous ne savons pas en combien de temps la vie est apparue sur Terre, mais il est bien possible que cela se soit produit très rapidement, en moins de quelques centaines de millions d'années. Certaines des exoplanètes autour de Trappist-1 pourraient donc posséder quelques formes de vies. Toutefois, si tel est bien le cas, celles-ci seraient forcément rudimentaires si l'on considère que ce qui est arrivé sur Terre n'est pas singulier dans la Voie lactée et que l'étoile est bien encore jeune.

    Toutefois, il y a quelques années, des membres de l'Institut Seti avaient tout de même entrepris de détecter avec le fameux Allen Telescope Array (ATA) des ondes radio en provenance d'une éventuelle civilisation extraterrestre technologiquement avancée, qui serait présente dans le système planétaire de Trappist-1.

    Une vue du <em>Allen Telescope Array</em> (ATA), avec la Voie lactée en toile de fond. © Seti Institute
    Une vue du Allen Telescope Array (ATA), avec la Voie lactée en toile de fond. © Seti Institute

    Un empire galactique et des planètes en communication radio ?

    Pour ces exobiologistes, le fait que la vie intelligente n'ait peut-être pas pu avoir le temps d'apparaître, et d'évoluer, dans le système de Trappist-1 serait en réalité un atout. En effet, cette vie intelligente n'existant pas, elle ne pourrait donc pas dissuader une civilisation galactique présente dans la Voie lactée de coloniser certaines de ses planètes. Dès lors, si deux planètes font bel et bien partie d'un empire galactique, elles pourraient être en communication constante par l'intermédiaire de faisceaux radio.

    Les exoplanètes de Trappist-1 sont observées par la méthode des transits planétaires, il est donc possible que périodiquement (cette périodicité doit être courte étant donné la petite taille des orbitesorbites des planètes situées dans la zone d'habitabilitézone d'habitabilité) les faisceaux d'ondes radio connectant les deux planètes intersectent également la Terre, trahissant la présence de cet empire.

    Comme l'explique un communiqué de l'Institut Seti, nullement découragés par les résultats négatifs d'il y a presque une décennie, certains de ses membres en collaboration avec d'autres chercheurs de l'Université Penn State aux États-Unis ont de nouveau utilisé l'ATA pour rechercher, avec la même méthode d'occultationsoccultations planétaires, des signes de technologie extraterrestre dans le système stellairesystème stellaire de Trappist-1. Les observations ont duré 28 heures au total.

    Des millions de signaux ont été examinés avec la technologie de l'ATA qui est mise à jour au fil des années. Mais, comme l'explique une publication en accès libre sur arXiv, aucune technosignature n'a encore été détectée dans le système de Trappist-1.

    Le communiqué du Seti mentionne toutefois des commentaires donnés par Nick Tusay, un étudiant en thèse à l’université Penn State : « Ce travail montre que nous nous rapprochons de la détection de signaux radio similaires à ceux que nous envoyons dans l'espace. La plupart des recherches supposent une certaine intention, comme des balises, car nos récepteurs ont une limite de sensibilité à une puissance d'émissionémission minimale au-delà de tout ce que nous envoyons involontairement. Mais, avec un meilleur équipement, comme le futur Square Kilometer Array (SKA), nous pourrions bientôt être en mesure de détecter les signaux d'une civilisation extraterrestre communiquant avec un vaisseau spatial. »

    « Ce projet comprenait des travaux d'étudiants de premier cycle dans le cadre du programme REU (Research Experience for Undergraduates) 2023 de l'Institut Seti. Les étudiants ont recherché des signaux provenant d'orbiteurs fabriqués par l'Homme autour de Mars pour vérifier si le système pouvait détecter correctement les signaux. C'était une manière passionnante d'impliquer les étudiants dans la recherche Seti de pointe », ajoute Sofia Sheikh, chercheuse à l'Institut Seti.

    Le saviez-vous ?

    En septembre 1959, la revue Nature publiait un article visionnaire de Giuseppe Cocconi, qui joua un rôle important dans la mise en route du Proton Synchrotron du Cern, et de Philip Morrison, qui avait participé au projet Manhattan. Son titre, Searching for Interstellar Communications, allait devenir célèbre sous la forme d'un acronyme, c’est-à-dire Seti.

    Les deux physiciens y tenaient le raisonnement suivant : si des civilisations extraterrestres avancées existent dans la Galaxie, elles pourraient communiquer entre elles ou avec leurs colonies à l'aide d'ondes radio. En considérant les longueurs d'onde les plus propices à la transmission lointaine de signaux clairs, malgré le bruit de fond radio galactique, ils avaient conclu que la bande radio la plus adaptée était celle, étroite, entourant la longueur d'onde de 21 centimètres.

    De plus, cette bande correspond à une transition dite hyperfine dans l'atome d'hydrogène neutre, l'élément le plus abondant de l'Univers. C'était donc un bon moyen pour établir un standard de communication, naturellement adopté par toute civilisation développée.

    Un jeune radioastronome, Frank Drake, était alors parvenu à des conclusions similaires. En poste au radiotélescope de Green Bank, il lança donc le 8 avril 1960 le projet Ozma, du nom d'une princesse du pays d'Oz. Pendant deux périodes de deux mois, Drake et ses collègues écoutèrent avec le radiotélescope de Green Bank deux étoiles semblables au Soleil et situées à moins de 15 années-lumière, Tau Ceti et Epsilon Eridani.

    Le résultat fut négatif. Soixante ans après Drake, toujours vivant, le programme Seti est toujours d’actualité. Il a reçu en 2015 une impulsion importante via le projet Breakthrough Initiative du milliardaire Yuri Milner. Soutenu à l’époque par Stephen Hawking ainsi que Kip Thorne, le prix Nobel de physique et conseiller scientifique du film Interstellar, et Ann Druyan, la veuve de Carl Sagan, il visait à donner 100 millions de dollars en dix ans au programme Seti.