Selon un titre d'un article publié dans le très sérieux et réputé journal Nature Astronomy, des caractéristiques des galaxies naines autour de grandes galaxies ne seraient pas prédites par les simulations numériques basées sur le modèle cosmologique standard. Cela suggérerait selon des chercheurs un Univers plus jeune. Futura a demandé l'avis de l'astrophysicienne Françoise Combes.
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« A younger Universe implied by satellite pair correlations from SDSS observations of massive galaxy groups », ce qui peut se traduire par « Un univers plus jeune impliqué par les corrélations de paires de satellites issues des observations SDSS de groupes de galaxies massives », est le titre d'un article publié dans la prestigieuse revue Nature Astronomy ce mois de janvier 2024. Une version en accès libre se trouve sur arXiv.
Bien évidemment, ce titre attire l'attention et il accompagne un communiqué de l'Académie chinoise des sciences (NAOC) expliquant que l'équipe de chercheurs dirigée par l'astrophysicienastrophysicien Guo Qi des Observatoires astronomiques nationaux de la NAOC est arrivée à la conclusion que l'Univers pourrait être plus jeune que ne le prédit le modèle cosmologique standard avec matière et énergie noire (LCDM) déduit notamment des paramètres cosmologiques du modèle relativiste du cosmoscosmos observable, qui reproduisent le mieux les observations du rayonnement fossilefossile de la mission Planck.
Alors s'agit-il encore d'un indice de plus qu'il y a quelque chose que nous ne comprenons pas bien, voire même qui est faux dans le modèle cosmologique standard actuel ? On sait que depuis quelque temps, certaines anomaliesanomalies émergentémergent en ce qui le concerne, par exemple les désaccords sur la mesure de sa vitesse d’expansion avec la détermination de la fameuse constante de Hubble-Lemaître.
Dans le cas présent, les données du rayonnement fossile nous donnent en quelque sorte des conditions initiales sur l'état de la matièreétat de la matière et de l'énergie noire environ 380 000 ans après le Big BangBig Bang ainsi que sur la forme de l'Univers. En utilisant des simulations numériquessimulations numériques comme Illustris il est possible de jouer au démiurge et faire évoluer des modèles de cosmos de l'émissionémission du rayonnement fossile jusqu'à aujourd'hui, en formant des étoilesétoiles, puis des galaxies et enfin les grandes structures rassemblant un zoo de galaxies de différentes formes et tailles.
Depuis 13,8 milliards d’années, l’Univers n’a cessé d’évoluer. Contrairement à ce que nous disent nos yeux lorsque l’on contemple le ciel, ce qui le compose est loin d’être statique. Les physiciens disposent des observations à différents âges de l’Univers et réalisent des simulations dans lesquelles ils rejouent sa formation et son évolution. Il semblerait que la matière noire ait joué un grand rôle depuis le début de l’Univers jusqu’à la formation des grandes structures observées aujourd’hui. © CEA Recherche
Des paires de galaxies naines satellites aux mouvements étrangement corrélés ?
Selon les chercheurs chinois, entre les observations de ces structures et en particulier les caractéristiques des mouvementsmouvements et orbitesorbites des petites galaxies nainesgalaxies naines autour des grandes galaxies faites dans le cadre de la fameuse campagne d'observations du Sloan Digital Sky Survey (SDSS) et les prédictions des simulations numériques de l'évolution de l'Univers, il y aurait donc des problèmes.
Les écarts entre prédictions et observations seraient supérieurs à 3 sigmas bien que n'atteignant pas encore les fameux 5 sigmas qui indiqueraient, dans le jargon des chercheurs, qu'il y a un peu moins d'une chance sur un million pour que les observations soient simplement des fluctuations statistiques dues au hasard et sans signification fondamentale. Mais il est d'usage de commencer à considérer sérieusement un problème ou une découverte quand les mesures dépassent les 3 sigmas.
Le communiqué de la NAOC explique que les chercheurs chinois ont étudié le mouvement de paires de satellites positionnées du côté opposé de groupes de galaxies massives, découvrant un excès notable de paires présentant des décalages de vitessevitesse corrélés par rapport aux paires présentant des décalages de vitesse anti-corrélés.
Or, pour Guo Qi, « l'excès de paires de satellites corrélées suggère la présence de galaxies satellites récemment accrétées ou en chute libre ». Le phénomène est bien prédit par la simulation mais pas avec l'importance observée ce qui, selon le communiqué, implique que les groupes de galaxies massives sont plus jeunes dans l'Univers réel que prévu.
Guo Qi précise : « Étant donné que l'âge des groupes de galaxies massives pourrait être étroitement lié à l'âge de l'Univers, ces découvertes suggèrent par conséquent un Univers plus jeune comparé à celui dérivé du fond diffus cosmologiquefond diffus cosmologique (CMB) par la Collaboration PlanckPlanck. »
On est quand même perplexe.
À strictement parler, il n'est question que de désaccord dans la formation des structures observées contenues dans le cosmos et pas directement d'une mesure d'un phénomène ou d'une correction d'une telle mesure impliquant directement un âge plus jeune pour l'Univers. Il n'est même pas question d'une modification précise de cet âge.
Un problème avec la cosmologie standard avec énergie et matière noire ?
Pour tenter d'y voir plus clair, nous avons donc demandé l'avis de Françoise CombesFrançoise Combes, professeure au Collège de France, célèbre pour ses recherches sur les galaxies et la matière noirematière noire et bien connue des lecteurs de Futura. L'astrophysicienne n'est clairement pas convaincue et elle nous a fait les commentaires suivant :
« Beaucoup d'autres études ont étudié la répartition des satellites, et la trouvaille la plus "solidesolide" si l'on peut dire, est l'alignement des satellites de la Voie lactée et d’Andromède qui suggère leur mécanisme de formation, une grande structure de filaments un peu aplatie, et les galaxies se forment ensuite dans ces filaments.
Certains ont dit que cela favorisait Mond, mais les simulations LCDM en forment aussi. On sait très bien que les satellites ne se forment pas au hasard, et donc de voir qu'il y a un léger (quelques sigmas) déséquilibre d'orientation est tout à fait naturel.
Rien n'est à l'équilibre dans l'Univers, qui continue à évoluer, et l'on ne doit pas attendre une répartition au hasard, il y a des fusionsfusions de satellites avec les galaxies centrales, de la frictionfriction dynamique qui favorise certains angles, etc.
Donc il n'y a rien de nouveau dans cet article, rien d'inattendu, et surtout pas une remise en cause du modèle LCDM, et encore moins de l'âge de l'Univers ! ».