Trois astronomes de l’Université de Toronto viennent de dévoiler ce qui pourrait être la première image jamais réalisée d’une planète tournant autour d’une autre étoile.
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Superposition d’images prises dans les spectres bleu, vert et rouge au foyer du télescope Gemini Nord équipé d’optique adaptative les 21 et 24 août 2008. Pose 180 secondes. Magnitude visuelle de l’étoile : +10,9. Crédit : D. Lafrenière et al.
Conduite par David Lafrenière, l'équipe de scientifiques a utilisé le télescope Gemini Nord installé à Hawaï, équipé d'un miroir de 8,1 mètres de diamètre et d'un dispositif d'optique adaptative hautement performant afin d'obtenir une image infrarouge en très haute résolutionrésolution de l'étoile 1RXS J160929.1-210524 dans la constellation du Scorpion, et de son compagnon.
Ce dernier apparaît séparé de 2,22 secondes d'arcsecondes d'arc de l'étoile, soit, d'après la distance du couple, une distance de 330 UAUA (50 milliards de kilomètres). Rappelons que la Terre est par définition à 1 UA du SoleilSoleil. Son spectrespectre dans l'infrarouge suggère qu'il s'agit d'un objet de classe L4 dont la température de surface d'environ 1.525°C (les auteurs donnant une fourchette de -100 à +200) pour une massemasse d'environ 8 fois celle de JupiterJupiter (-1/+4). Les valeurs spectrales en bande h et K démontrent, d'après les auteurs qui s'appuient sur les modèles en vigueur, que la force de gravitationforce de gravitation en surface est encore faible et qu'il s'agit donc d'un astreastre jeune n'ayant pas encore terminé sa contraction.
En haut à gauche, le compagnon de 1RXS J160929.1-210524. Crédit Gemini Observatory
A ce jour, les seuls objets planétaires directement observés en dehors de notre système solairesystème solaire étaient des astres isolés, flottant librement dans l'espace (c'est-à-dire ne tournant pas autour d'une étoile), ou des naines brunesnaines brunes, dont la faible luminositéluminosité facilite la détection. Mais la température de ce nouveau candidat est trop faible pour répondre à cette catégorie et ne peut s'expliquer que par une nature planétaire.
L'étoile elle-même est légèrement moins massive que notre Soleil, dont elle n'atteint qu'environ 85% de la masse pour 1,3 diamètre solaire. Si le lien gravitationnel entre celle-ci et la planète est confirmé, ce qui semble déjà acquis, il s'agirait ainsi du plus petit objet gravitant autour d'une étoile de masse solaire.
« C'est la toute première fois qu'il nous est donné d'apercevoir un objet de masse planétaire en orbiteorbite probable autour d'une étoile comparable à notre Soleil. Si nous arrivons à confirmer que ces deux astres appartiennent à un même système, nous aurons accompli un important pas en avant », s'enthousiasme David Lafrenière, auteur d'une publication en cours de parution dans Astrophysical Journal Letters co-signée par ses deux collaborateurs, Ray Jayawardhana et Marten H. Van Kerkwijk (pré-publication disponible sur le site de l'Université Cornell).
Cette première observation d'un compagnon de masse planétaire, qui survient à un moment où personne ne s'y attendait, lance un nouveau défi aux astronomesastronomes en matièrematière de formation d'étoiles et de planètes. « Cette découverte démontre une fois de plus la diversité véritablement remarquable des mondes étrangers, et c'est une nouvelle démonstration des possibilités offertes à la nature pour produire des compagnons planétaires à des étoiles de type classique telles notre Soleil », s'émerveille Ray Jayawardhana, auteur d'un ouvrage sur le sujet, à paraître sous peu sous le titre Worlds Beyond.
Une confirmation délicate
La distance entre l'étoile et la planète impliquant un déplacement très lent de celle-ci, deux années d'observation seront au minimum nécessaires afin de démontrer un lien gravitationnel et déterminer l'orbite. « Il est évidemment trop tôt pour affirmer avec certitude que cette planète tourne effectivement autour de 1RXS J160929.1-210524, mais c'est une quasi certitude et à l'évidence, cette étoile sera très étudiée au cours des prochaines années », annonce Lafrenière.
Marten H. Van Kerkwijk, membre de l'équipe, précise avoir effectué cette découverte grâce à une méthode nouvelle, qui consistait à observer préférentiellement des étoiles formées depuis au maximum 5 millions d'années, et dont les hypothétiques compagnons planétaires n'auraient pas encore eu le temps de se refroidir, ce qui en facilitait la détection directe en infrarouge.
C'est dans un groupe de 85 étoiles appartenant au jeune amas Upper Scorpius que la nouvelle planète a été observée grâce au dispositif d'optique adaptative du télescope Gemini, qui permet de différencier les divers types de compagnons stellaires : étoiles, naines brunes ou planètes.
Notons que par le passé, plusieurs annonces de découvertes d'exoplanètesexoplanètes avaient été émises par des astronomes avant qu'un examen plus approfondi n'infirme l'hypothèse en la ramenant au rang de naine brune. Souvenons-nous entre autres de 2M1207b, en avril 2004.