Ce qu’Icare n’a pas été en mesure de faire, la mission Parker Solar Probe l’a accompli. Elle s’est suffisamment approchée de la surface de notre Soleil pour renvoyer aux astronomes des informations qui leur permettent enfin de remonter à la source du vent solaire.


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    Chaque seconde, notre Soleil renvoie dans l'espace environ un million de tonnes de matière. Sous forme de ce que les astronomesastronomes appellent le vent solaire. C'est assez connu. Mais ce qui l'est peut-être un peu moins, c'est que ce ventvent se décompose en un vent solaire dit lent et en un vent solaire rapide. Le premier est assez constant et il souffle tout de même à quelque 300 km/s. Le second peut atteindre les 800 km/s et il est fortement dépendant de l'activité de notre Soleil. Ce sont les rafales de vent solaire rapide qui sont à l'origine des tempêtestempêtes géomagnétiques qu'essuie régulièrement notre Terre. D'où l'intérêt d'en comprendre les mécanismes. De comprendre ce qui accélère à ce point les particules chargées issues de notre Soleil.

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    La sonde Parker Solar Probe bouleverse l'énigme de la couronne solaire

    Et la mission de la Nasa Parker Solar ProbeParker Solar Probe vient de livrer à des chercheurs de l’université de Californie à Berkeley (États-Unis) des données d'une importance capitale en la matière. La sonde s'est en effet approchée suffisamment de la surface de notre Soleil -- c'était en novembre 2021, à quelque 8 millions de kilomètres seulement -- pour voir la structure du vent solaire, tout près de l'endroit où il est généré. Mettant ainsi au jour des détails auxquels les astronomes n'avaient jamais eu accès par de simples observations du souffle de vent solaire à la sortie de la couronne.

    C'est au niveau des trous coronaux que Parker Solar Probe a détecté des flux de particules à haute énergie. De quoi suggérer que c'est là que le vent solaire rapide prend sa source. Rappelons que les trous coronaux correspondent à des régions du Soleil dans lesquelles les lignes de champ magnétiquechamp magnétique émergentémergent de la surface sans se reboucler vers l'intérieur. On les trouve généralement aux pôles pendant les périodes calmes du cycle de notre étoileétoile. Mais lorsque le Soleil devient plus actif, ces trous apparaissent sur toute la surface, générant des rafales de vent solaire qui peuvent être dirigées directement vers notre Terre.

    La reconnexion magnétique à l’origine du vent solaire

    Les astronomes racontent que les trous coronaux sont un peu comme des pommeaux de douche de plusieurs milliers de kilomètres de diamètre. Avec des jets à peu près régulièrement espacés émergeant des endroits où les lignes de champ magnétique entrent et sortent de la surface de notre Soleil. Lorsque des champs magnétiques opposés s'y croisent, ils se brisent et se reconnectent tout en projetant des particules chargées vers l'espace.

    « La photosphèrephotosphère de notre étoile est recouverte de cellules de convectionconvection, comme dans une marmite d'eau bouillante, et le flux de convection à plus grande échelle est appelé supergranulation, explique Stuart Bale, physicienphysicien à l'université de Californie, dans un communiqué. Là où ces cellules de supergranulation se rencontrent et descendent, elles entraînent avec elles le champ magnétique dans une sorte d'entonnoir descendant. Ainsi bloqué, le champ magnétique s'y intensifie fortement. C'est une comme de boule de champ magnétique descendant dans un draindrain. Et la séparationséparation spatiale de ces petits drains, ces entonnoirs, est ce qui apparait désormais dans les données des sondes solaires. »

    Selon les chercheurs, le fait que la mission Parker Solar Probe ait détecté là des particules de très haute énergie, se déplaçant 10 à 100 fois plus vite que la moyenne du vent solaire, montre que ce dernier ne peut être créé que par ce processus qu'ils appellent de reconnexion magnétiquereconnexion magnétique. Un mystère vieux de six décennies semble enfin avoir été résolu. Mais les astronomes espèrent encore récolter quelques données qui pourraient confirmer ces conclusions lorsque la mission s'approchera de notre Soleil à à peine plus de 6 millions de kilomètres. Même si lesdites données pourraient bien être brouillées par l'intense activité actuelle de notre étoile.


    Vers une explication de l'accélération supersonique du vent solaire ?

    Après plus de quatre décennies de la confirmation de l'existence du vent solaire par les mesures de la sonde Mariner 2, son accélération à des vitessesvitesses supersoniques de l'ordre de 700-800 km/s reste incomprise. La théorie classique de Parker, basée sur la conduction thermique, fournit une vitesse trop faible, ce qui a conduit la quasi-totalité des théories à chercher une forme d'énergie supplémentaire pour cette accélération. Une équipe d'astronomes du LESIA à l'Observatoire de Paris a élaboré une théorie alternative basée sur le rôle des électronsélectrons qui sont loin de l'équilibre thermodynamiquethermodynamique et qui seraient le moteur principal de cette accélération. Cette approche explique pour la première fois le vent solaire rapide sans hypothèse d'énergie supplémentaire.

    Article de l'Observatoire de Paris paru le 03/06/2005

    Vue d'artiste de la future sonde solaire (Solar Probe) à son périhélie de 4 rayons solaires
    Vue d'artiste de la future sonde solaire (Solar Probe) à son périhélie de 4 rayons solaires

    L'éjection du vent solaire est un problème astrophysiqueastrophysique important, étant l'exemple le plus accessible d'éjection de matière par un objet cosmique. La plupart des modèles d'accélération du vent solaire sont une généralisation du modèle classique hydrodynamique de Parker dans lequel la vitesse terminale est directement liée à l'énergie thermiqueénergie thermique disponible dans la couronne solairecouronne solaire. Toutefois, au vu des contraintes observationelles sur la température coronale (~106 K), ce modèle ne permet pas d'expliquer le vent rapide (vitesses de l'ordre de 700-800km/s).

    La difficulté théorique vient du fait que le milieu est faiblement collisionnel, un domaine de la physiquephysique des plasmas encore mal connu. Or, les modèles hydrodynamiques sont basés sur l'équilibre thermodynamique local, ce qui est loin d'être vrai pour les électrons du vent solaire. En effet, les fonctions de distribution des vitesses des électrons mesurées in situ ne sont pas maxwelliennes, mais présentent un excès d'électrons suprathermiques.

    Ces électrons jouent un rôle primordial pour l'accélération du vent dans une approche théorique récemment élaborée par Iannis Zouganelis et collaborateurs qui a permis d'obtenir pour la première fois des vitesses de vent aussi élevées que celles observées. Il s'agit d'une modélisationmodélisation cinétique d'un milieu hors équilibre thermodynamique qui permet de reproduire des profils de vitesse transsoniques, sans faire appel à un apport ad hoc d'énergie.

    Ces résultats viennent d'être confirmés par des simulations cinétiques indépendantes qui tiennent compte des collisions Coulombiennes entre les particules. Ce travail a également unifié des approches théoriques précédentes qui étaient valables uniquement dans des cas de conditions initiales particulières. Cette généralisation permet d'inclure des cas autres que le vent solaire, par exemple des vents stellaires de type solaire où la couronne de l'étoile « exploserait » et le vent serait supersonique dès son départ.

    La théorie ne pourrait être confirmée que par des mesures in situ dans la couronne très près du Soleil puisque l'essentiel de l'accélération devrait avoir lieu à une distance inférieure à 10 rayons solaires. L'existence de fonctions de distribution non maxwelliennes dans la couronne ainsi que leur origine seront éventuellement dévoilées par la future mission « Solar Probe » qui devrait visiter la couronne avec un périhéliepérihélie de 4 rayons solaires. Cette mission est prévue pour l'horizon 2015-2020 et les astronomes français participent activement à sa définition.