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Les orbites des planètes nous semblent régulières et destinées à durer pour l'éternité. C'est une illusion, comme Newton le savait déjà il y a presque quatre siècles. Sa théorie de la gravitation lui indiquait que tous les corps du Système solaire s'attiraient et il était donc difficile de croire que ces orbites pouvaient rester inchangées, à moins de faire appel, comme Newton, à un agent surnaturel. La question de la stabilité à long terme du Système solaire était cependant dès lors ouverte et des mathématiciensmathématiciens de première force vont s'attaquer au problème à partir du XVIIIe siècle, tels Lagrange et Laplace. Aujourd'hui encore, après les travaux de Poincaré et Arnold, ce problème est encore étudié.
Les simulations numériquessimulations numériques ont finalement montré que le Système solaire n'est pas stable sur une longue durée et que le chaos peut s'y manifester. Ces analyses indiquent également qu'au début de son histoire, il a été restructuré par des migrations planétaires. Toutefois, au cours du dernier milliard d'années, on pensait que rien de notable ne s'y serait produit. Une publication dans Nature Astronomy d'une équipe de chercheurs américains, russes et suédois vient cependant de remettre en cause cette idée reçue.
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Une collision majeure d'astéroïdes pendant l'Ordovicien ?
Depuis quelque temps déjà, les roches calcairescalcaires retrouvées dans la carrière de Thorsberg, dans le sud de la Suède, livrent de nombreuses météoritesmétéorites dites fossilesfossiles car, bien qu'elles aient été altérées, elles ont visiblement bénéficié de conditions d'enfouissement qui leur ont permis de traverser les âges jusqu'à nous. Ces météorites datent de l'Ordovicien moyen, qui s'étend de 470 à 458 millions d'années environ. Elles montrent qu'il y a eu une brusque augmentation du flux de ces corps célestes heurtant la Terre pendant cette période. Surtout, l'une de ces météorites découvertes, Österplana 065, ne ressemble à aucune de celles que l'on connaissait. Comme l'expliquait l'article ci-dessous, certains chercheurs en avaient tiré la conclusion que l'origine du flux de météorites pendant l'OrdovicienOrdovicien était différente de celle du flux actuel, et donc que le Système solaire de l'époque l'était aussi.
L'article de Nature confirme cette interprétation. Comme l'explique la vidéo ci-dessus, les chercheurs se sont intéressés cette fois-ci aux micrométéorites contenues dans les roches sédimentairesroches sédimentaires d'une carrière en Russie. En dissolvant une grande quantité de ces roches, ils en ont extrait 43 micrométéorites de l'âge d'Österplana 065. L'objectif était surtout d'analyser la composition isotopique des oxydes de chromechrome de certains minérauxminéraux car elle permet de bien identifier la nature des micrométéorites.
Quelque chose s'est donc bien produit il y a environ 500 millions d'années et qui a pendant un temps changé la composition et l'intensité du flux de météorites sur Terre. Mais quoi exactement ? Sans aucun doute une collision avec un corps céleste important mais le flou règne encore à ce sujet. On en saura peut-être beaucoup plus quand le Système solaire aura été colonisé, la Ceinture d'astéroïdes exploitée et de nombreuses comètescomètes visitées...
Un nouveau type de météorite intrigue les scientifiques
Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 19/06/2016
On a collecté environ 50.000 météorites sur Terre mais celle retrouvée dans une carrière suédoise, piégée dans du calcaire qui s'est déposé il y a 470 millions d'années, ne ressemble à aucune autre. Cette découverte nous donne peut-être des informations précieuses et inédites sur l'histoire de la biosphèrebiosphère et du Système solaire.
Entre 485 et 460 millions d'années environ avant le présent, la diversité de la vie marine a augmenté comme jamais. Cet épisode est d'ailleurs baptisé Grande biodiversification ordovicienne (ou GOBE, pour Great Ordovician Biodiversification Event), ou encore l'explosion ordovicienne. Les calcaires retrouvés dans la carrière de Thorsberg, dans le sud de la Suède, datent de cette période, plus précisément de l'Ordovicien moyen qui s'étend de 470 à 458 millions d'années environ. Depuis le début des années 1990, elle a livré une centaine de météorites dites fossiles car, bien qu'elles aient été altérées, elles ont visiblement bénéficié de conditions d'enfouissement qui leur ont permis de traverser les âges jusqu'à nous.
Jusqu'à 2011, les chercheurs n'avaient découvert qu'un seul type de météorites, des chondriteschondrites ordinaires de type L, qui constituent environ 35 % de l'ensemble des météorites cataloguées, et 40 % des chondrites ordinaires, représentant 87 % des quelque 50.000 météorites collectées sur Terre. On pense que les chondrites ordinaires proviennent d'un petit nombre de collisions récentes d'astéroïdes, récentes à l'échelle de l'histoire du Système solaire bien sûr. Classées en trois groupes (H, L et LL), ces chondrites semblent provenir de trois principaux corps parents.
La quantité de chondrites retrouvées dans la carrière de Thorsberg ne s'explique que par une augmentation brutale du flux de météorites. La mécanique céleste laisse même penser qu'elles sont issues d'un gros d'astéroïdeastéroïde d'environ 100 kilomètres de diamètre qui aurait subi l'impact d'un corps céleste plus petit.
La météorite Österplana 065 (8 × 6,5 × 2 cm) est entourée d’un halo gris dans du calcaire autrement rouge, donc oxydé. On pense que l’oxygène a été consommé par l’altération de la météorite, alors au fond de la mer de l’Ordovicien où se déposaient les sédiments. La pièce de monnaie a un diamètre de 2,5 cm. © Birger Schmitz
L’explosion ordovicienne a-t-elle été causée par une pluie de météorites ?
Tout change donc en 2011 avec la découverte d'une nouvelle météorite qui rentrait mal dans les types connus, même si elle avait été rapprochée des winonaïtes, des achondritesachondrites primitives relativement rares, composées de larges cristaux de pyroxènepyroxène, d'olivineolivine et de sulfuressulfures mixtes de ferfer et de nickelnickel. Or, un groupe de chercheurs suédois et états-uniens vient de publier un article dans Nature Communications qui confirme ce dont se doutaient certains de leurs collègues, décrivant un tout nouveau type de météorite, jamais rencontré auparavant. Il s'agit probablement d'un fragment de l'impacteurimpacteur qui a propulsé dans l'espace les chondrites L retrouvées en Suède.
Baptisée Österplana 065 (Öst 65) conformément aux conventions de la Meteoritical Society, c'est-à-dire du nom de la localité où elle a été trouvée (Österplana), elle a voyagé dans l'espace interplanétaire pendant environ un million d'années avant de rejoindre le fond des mers de l'Ordovicien, il y a précisément 470 millions d'années. En effet, après une collision entre astéroïdes, les fragments produits sont soudain soumis aux rayons cosmiques puisqu'ils sont éjectés de l'intérieur du corps parent. Ces rayons modifient la matièrematière et il est donc possible de déduire de ces modifications un temps d'exposition. L'analyse précise des isotopesisotopes d'oxygèneoxygène et de chrome de Öst 65 a finalement permis de la différencier nettement de toutes les météorites retrouvées à ce jour.
La découverte de météorites dans la carrière suédoise est intéressante à plus d'un titre. D'abord, elle nous dit que les types de météorites qui tombent sur Terre depuis des milliards d'années ne sont pas toujours les mêmes, ce qui ouvre des perspectives pour mieux comprendre l'histoire de la ceinture d'astéroïdesceinture d'astéroïdes et donc, plus généralement, celle du Système solaire. Enfin, il est tentant de relier le pic de bombardement météoritique découvert dans la carrière de Thorsberg, et que semblent accompagner des cratères d'impact alignés aux États-Unis comme ceux de Ames et Rock Elm, à la grande biodiversification ordovicienne.