Parce que ces objets flous catalogués par Messier il y a trois siècles ressemblaient beaucoup à Uranus dans les instruments de l'époque, William Herschel les avait baptisés nébuleuses planétaires. Quand on réalisa qu’il s’agissait d’enveloppes gazeuses et poussiéreuses éjectées par des étoiles en fin de vie, leur nom paru bien peu approprié. Au contraire, il recèle une part de vérité insoupçonnée, affirme aujourd'hui un groupe d’astrophysiciens !
La nébuleuse de l'Œuf pourri (son nom provient de sa richesse en soufre). Crédit : Nasa

La nébuleuse de l'Œuf pourri (son nom provient de sa richesse en soufre). Crédit : Nasa

Les nébuleuses planétaires sont parmi les plus beaux objets astrophysiques que l'on peut admirer dans le cosmos avec un télescope. Il s'agit de phénomènes transitoires, n'existant que pendant quelques dizaines de milliers d'années se formant lorsque les étoiles sont en fin de vie et quittent la séquence principale (dans le diagramme HR). Comme il s'agit d'un moment bref, en comparaison des dix milliards d'années d'espérance de vie moyenne pour des étoiles naines comme le Soleil, la probabilité d'observer un tel événement semble bien faible.

Mais notre Galaxie compte environ 200 milliards d'étoiles, si bien qu'environ 1.500 nébuleuses planétaires sont connues. On peut alors observer une étonnante variété de formes complexes et de couleurs, correspondant à différentes périodes de l'évolution dynamique et chimique des couches supérieures de l'enveloppe d'une étoile, qu'elle éjecte alors qu'elle se déplace sur la Branche Asymptotique des Géantes (AGB). 

La nébuleuse de l'Œil de Chat. Crédit : Nasa

La nébuleuse de l'Œil de Chat. Crédit : Nasa

Eric Blackman, un astrophysicien de l'université de Rochester, pense aujourd'hui avec ces collègues qu'une des explications de la grande variété de formes des nébuleuses planétaires, souvent associées à des jets de matière et des structures en spirales, résiderait dans la présence proche ou lointaine d'une étoile de faible masse, voire d'une planète particulièrement massive, en orbite autour de l'étoile agonisante.

Une planète géante prise au piège pourrait compliquerl'expansion des gaz et des poussières

Par une ironie de l'histoire de l'astrophysique, le nom de nébuleuse planétaire, qui semblait si mal approprié depuis que l'on avait compris leur véritable nature de nuage de poussières et de gaz éjectés par une étoile, ne le serait donc pas, au moins pour certaines d'entre elles.

En effet, lorsque l'étoile commence à expulser une série de coquilles sphériques de gaz, et en raison de l'expansion de ses couches supérieures lorsqu'elle quitte la séquence principale, une éventuelle exoplanète un peu plus grande que les géantes gazeuses que l'on connaît déjà, pourrait se retrouver à l'intérieur de l'enveloppe de gaz et de poussières.

D'après les calculs et les simulations numériques, des processus hydrodynamiques et magnétohydrodynamiques complexes se produiraient alors avec, notamment, l'apparition d'ondes spirales comprimant les gaz et les poussières pour former des tores et des disques entourant l'étoile principale. A cause de la turbulence et des différences de vitesses de rotation dans ces structures, un effet dynamo pourrait se produire avec une amplification du champ magnétique de l’étoile.

A son tour, ce champ magnétique influerait sur la matière éjectée par l'étoile pour la canaliser et produire les jets que l'on observe souvent dans ces nébuleuses.

Une simulation numérique de l'influence d'une exoplanète sur l'enveloppe gazeuse éjecté par l'étoile centrale agonisante. La formation d'une onde spirale est bien visible. Crédit : <em>Rochester University</em>

Une simulation numérique de l'influence d'une exoplanète sur l'enveloppe gazeuse éjecté par l'étoile centrale agonisante. La formation d'une onde spirale est bien visible. Crédit : Rochester University

Un autre fait vient étayer cette théorie. Les chercheurs ont calculé que la compression de la matière produite par les ondes spirales provoquerait de brusque libérations de chaleur, faisant fondre les poussières pour ne laisser que des gouttes de liquide se refroidissant lentement. Or, dans de telles conditions, les molécules de ces gouttes finissent par se figer pour former des réseaux cristallins.

Ce serait l'explication idéale pour rendre compte des étranges signatures spectrales témoignant de la présence de cristaux dans certaines de ces nébuleuses et que l'on ne comprenait pas jusqu'à aujourd'hui.