Longtemps, la question de la structure interne de la Lune est restée débattue. Contient-elle, comme la Terre, une graine solide au sein d’un noyau externe fluide ? Grâce à une nouvelle étude, cette question semble aujourd’hui résolue : oui, la Lune possède bien un petit noyau solide. Les scientifiques accréditent de plus l’hypothèse du retournement du manteau lors de la cristallisation de l’océan de magma, un processus qui permet d’expliquer la composition de la croûte lunaire.


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    Elle est si proche de nous et pourtant encore si mystérieuse. Voilà en effet cinquante ans que les scientifiques cherchent à percer le secret de la structure interne de la Lune et à expliquer la présence d’oxydes de fer et de titane dans les roches formant la croûte lunaire.

    Car si la Lune est, à l'image de la Terre, un astre différencié, c'est-à-dire possédant une croûte, un manteau et un noyau de compositions bien distinctes, de nombreuses différences existent entre notre Planète et sa petite sœur née d’une gigantesque collision il y a 4,4 milliards d’années.

    Deux sœurs pourtant bien différentes

    La composition de la croûte lunaire est ainsi bien différente de la croûte terrestrecroûte terrestre, notamment au niveau des « mers lunaires », ces grandes étendues sombres que l'on peut apercevoir à l'œilœil nu depuis la Terre. Si la croûte est le plus souvent composée d'anorthositeanorthosite, une roche riche en feldspathsfeldspaths plagioclases et dérivant des processus de cristallisation de l’océan de magma primitif, les mers lunaires contiennent, elles, d'étonnantes quantités de fer et de titane. Leur formation résulte d'importantes éruptions basaltiquesbasaltiques survenues principalement entre 3,5 et 3 milliards d'années. Cette composition indique que le manteau lunaire est globalement plus riche en fer que le manteau terrestremanteau terrestre et qu'il présente de fortes hétérogénéités de composition.

    Carte de la Lune avec la localisation des différentes « mers ». © Nasa, Wikimedia Commons, domaine public
    Carte de la Lune avec la localisation des différentes « mers ». © Nasa, Wikimedia Commons, domaine public

    De même, si les études sismiques réalisées lors des missions Apollo ont révélé l'existence d'un noyau au centre de la Lune, l'incertitude demeurait sur la nature solide ou fluide du noyau interne. Une incertitude aujourd'hui définitivement levée grâce à une nouvelle étude publiée dans Nature, menée par des scientifiques français (CNRS, Université Côte d'Azur, Observatoire de la Côte d'Azur, Sorbonne Université et Observatoire de Paris-PSL).

    La Lune renferme bien une petite graine solide

    Il y a une vingtaine d'années, l'analyse de la rotation de la Lune avait permis de mettre en évidence la présence d'un noyau externe fluide, sans donner cependant d'information sur l'existence d'une potentielle graine solide. La Lune vient cependant de dévoiler un peu plus son intérieur. Grâce à la compilation d'une multitude de données provenant notamment de différentes missions spatiales, mais également grâce à la télémétrie laserlaser-Lune (voir articles ci-dessous) permettant de mesurer les déformations de notre satellite sous l'effet des maréesmarées, les chercheurs ont pu mettre en évidence la présence d'un noyau indéniablement solide, d'environ 500 kilomètres de diamètre. Une graine relativement petite donc, qui représente à peu près 15 % de la taille de Lune. Les données indiquent de plus une densité élevée, proche de celle du fer.

    Structure interne de la Lune. Le diamètre du noyau interne solide est désormais estimé à environ 500 kilomètres. © Nasa, MSFC, Renee Weber
    Structure interne de la Lune. Le diamètre du noyau interne solide est désormais estimé à environ 500 kilomètres. © Nasa, MSFC, Renee Weber

    Dans leur article, les auteurs appuient également l'hypothèse du « retournement du manteau lunaire », qui permet d'expliquer la présence d'oxydes de fer dans les roches de la croûte lunaire. Cette hypothèse existe depuis plusieurs dizaines d'années mais nécessitait d'être confirmée par de nouvelles données.

    L’origine des roches lunaires riches en fer et en titane mieux expliquée

    À la fin de la phase de refroidissement et de cristallisation de l’océan de magma, la dernière phase liquideliquide à cristalliser consiste principalement en ilménite, un oxyde de fer et de titane (FeTiO3) relativement dense. Tandis que les éléments légers comme les feldspaths restent en surface pour former la future croûte, ce matériel aurait ainsi coulé pour venir s'accumuler au niveau de la limite noyau-manteau via un processus de fluagefluage à l'état solideétat solide. Ce niveau dense, riche en fer et en titane à la base du manteau, aurait ensuite servi de source magmatique lors de la formation des mers lunaires.

    La compréhension de ce phénomène est importante puisqu'il semble directement lié à la production d'un champ magnétiquechamp magnétique de forte intensité durant cette période. En effet, l'arrivée de ce matériel froid au fond du manteau aurait créé un pulse de flux de chaleurchaleur à l'interface noyau-manteau, menant à la génération d'un puissant, mais temporaire, champ magnétique.

    Ces nouveaux travaux aident donc à mieux comprendre l'histoire géologique de notre satellite, mais également du Système solaireSystème solaire, d'autres planètes étant suspectées avoir connu un épisode similaire de retournement du manteau.


    Lune : la taille de son noyau déterminée avec une précision record grâce à Apollo

    La structure interne de la Lune influe sur ses mouvementsmouvements de rotation et de révolution. Cinquante années de mesures de télémétrie laser-Lune rendues possibles par les missions ApolloApollo ont permis une nouvelle détermination de cette structure avec une précision encore jamais atteinte pour le rayon de son noyau.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 11 juillet 2019

    Le succès des missions lunaires, qui a débuté il y a 50 ans avec Apollo 11Apollo 11, a permis des révolutions scientifiques et technologiques dont nous sommes les héritiers et nous continuons à en faire fructifier les acquis. Le programme Apollo a bien sûr puissamment aidé à préparer la révolution de l'électronique et de l'informatique des années 1970-1980 et il a inspiré toute une génération d'adolescents à devenir plus tard les ingénieurs et les scientifiques de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle. Mais il a aussi fourni des données précieuses qui ont rendu possible des bonds considérables en planétologie comparée.

    En effet, les roches lunaires rapportées par les missions Apollo ont posé des contraintes sur l'histoire du Système solaire en permettant notamment de dater les terrains de notre satellite et de relier le taux de leur cratérisation à leurs âges, ce qui a permis de faire de même ailleurs dans le Système solaire. Ces roches nous ont aussi conduits au scénario de l'impact géant entre la jeune Terre et ThéiaThéia, expliquant la genèse de la Lune.

    Il y a d'autres héritages d'Apollo qui sont moins connus mais tout aussi passionnants. Ainsi, les missions Apollo 11, 14 et 15 ont-elles été l'occasion de déposer sur le sol lunaire des dispositifs optiques catadioptriquescatadioptriques, dits rétroréflecteurs, capables de renvoyer dans la même direction des faisceaux de lumièrelumière incidents. Les Russes vont faire de même avec les missions Luna 17 et Luna 21 qui vont déposer les roversrovers Lunokhod 1 et Lunokhod 2Lunokhod 2, aussi équipés de rétroréflecteurs.


    Une présentation de la télémétrie laser-Lune. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, STI Program

    Cinquante ans de télémétrie laser-Lune avec Apollo

    La révolution du laser au début des années 1960 a fourni précisément ce qu'il fallait comme source lumineuse pour effectuer de la télémétrie laser-Lune (ou Lunar Laser Ranging Experiment, LLR), c'est-à-dire en l'occurrence mesurer des temps d'aller-retour pour des émissionsémissions en direction des rétroréflecteurs lunaires permettant de faire des mesures très précises de la distance Terre-Lune et aider à mesurer tout aussi précisément ses mouvements en orbiteorbite autour de la Terre, sous l'influence de son champ de gravitégravité, mais aussi de celui du SoleilSoleil.

    Des dizaines de milliers d'allers-retours de faisceaux laser ont été réalisés depuis 1969 à partir de cinq stations sur Terre comme celles de l'Observatoire de la Côte d'Azur, en France, ou celle de l'Observatoire ApacheApache Point, au Nouveau-Mexique (États-Unis). Les résultats obtenus ont permis de poser des contraintes sur des alternatives à la théorie de la relativité généralerelativité générale, notamment celle impliquant une violation d'une des hypothèses à la base de la théorie relativiste de la gravitationgravitation d'EinsteinEinstein : le principe d'équivalence (actuellement testé avec la mission Microscope).

    Mais les enseignements que l'on peut tirer des données accumulées depuis 50 ans concernant la télémétrie laser-Lune ne s'arrêtent pas à la recherche de la nouvelle physiquephysique, comme le montre à nouveau la publication d'un article dans Geophysical Research Letters, également disponible sur arXiv, exposant les résultats des travaux d'une équipe de chercheurs issus de l'Observatoire de Paris-PSL, de l'Observatoire de la Côte d'Azur, du CNRS et de Sorbonne Université.

    Vue d’artiste de la structure interne de la Lune. Elle montre l’emplacement des cinq panneaux de réflecteurs laser (Apollo 11, 14, 15, Luna 17 et 21) et les faisceaux laser provenant des stations à la surface de la Terre, symbolisés par des traits verts. L’analyse précise des mouvements de rotation de la Lune et de son orbite a permis de déterminer avec une précision inégalée le rayon de la limite noyau-manteau lunaire à 381 kilomètres (± 12 km) et son aplatissement ((2,2 ± 0,6) x 10-4). © Y. Gominet/IMCCE/Observatoire de Paris-PSL
    Vue d’artiste de la structure interne de la Lune. Elle montre l’emplacement des cinq panneaux de réflecteurs laser (Apollo 11, 14, 15, Luna 17 et 21) et les faisceaux laser provenant des stations à la surface de la Terre, symbolisés par des traits verts. L’analyse précise des mouvements de rotation de la Lune et de son orbite a permis de déterminer avec une précision inégalée le rayon de la limite noyau-manteau lunaire à 381 kilomètres (± 12 km) et son aplatissement ((2,2 ± 0,6) x 10-4). © Y. Gominet/IMCCE/Observatoire de Paris-PSL

    Les chercheurs expliquent qu'ils sont arrivés à une nouvelle détermination de la forme et surtout de la taille du noyau de la Lune. Il se trouve que les équationséquations décrivant la rotation de la Lune sur elle-même et ses mouvements orbitaux sont dépendantes de la structure interne de notre satellite. On peut donc résoudre ce que l'on appelle un problème inverse en physique mathématique, c'est-à-dire, dans le cas présent, remonter à cette structure interne par son influence sur les mouvements lunaires, mouvements que l'on peut mesurer.

    Ainsi, dès les années 1980, on était arrivé à la conclusion que la Lune avait probablement bien été le lieu d'une différenciation planétaire, comme dans le cas de la Terre, et qu'elle possédait donc un noyau dont une partie est liquide. Cette conclusion s'est trouvée renforcée par les données sismiques fournies par les instruments, là aussi déposés par les missions Apollo, comme Futura l'expliquait dans un des précédents articles ci-dessous.

    Il restait toutefois une incertitude de l'ordre de plus ou moins 55 kilomètres sur la taille de ce noyau. Les planétologues viennent toutefois de faire savoir qu'ils étaient arrivés à la réduire pour obtenir une valeur de ± 12 kilomètres avec un rayon du noyau de la Lune déterminé à 381 kilomètres.

    Une clé de l'histoire de la Lune

    Pour arriver à ce résultat, 50 ans de données de télémétrie laser-Lune ont été introduites dans INPOP (acronyme pour « Intégration numériquenumérique planétaire de l'Observatoire de Paris »), qui est un ensemble de modèles et de programmes de calcul des éphémérides planétaires et lunaires développés conjointement par des équipes de l'Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides - IMCCE (Observatoire de Paris-PSL/CNRS/Sorbonne Université) et du laboratoire Géoazur (OCA).

    À la différence du modèle développé par la NasaNasa qui supposait que l'interface entre le noyau et le manteau de la Lune était de forme sphérique, les chercheurs ont laissé ouverte la possibilité que cette forme soit en fait légèrement aplatie. Nourris également par les données gravimétriques fournies par la mission Grail, les calculs effectués ont permis un meilleur ajustement du modèle lunaire avec les observations et du même coup une réduction de l'incertitude sur la valeur du rayon de son noyau.

    Comme l'explique le communiqué de l'observatoire de Paris au sujet de cette performance : « Cette nouvelle mesure de la taille du noyau fluide est importante pour les modèles d'évolution de la Lune. Elle va permettre notamment de mieux comprendre les mécanismes qui ont permis l'apparition, puis la disparition du champ magnétique lunaire.

    « Aujourd'hui l'exploration lunaire est en pleine croissance et l'ajout de nouveaux réflecteurs à sa surface permettrait de poursuivre le sondage de son intérieur et de développer de nouveaux tests relativistes. »


    Lune : sa structure interne et son noyau sont désormais mieux compris

    Article de Laurent Sacco publié le 02/04/2019

    Les roches lunaires des missions Apollo et les sismomètressismomètres qu'elles ont déposés sur la Lune nous ont donné des renseignements sur sa structure interne. Des expériences à hautes pressionspressions sur Terre permettent d'aller plus loin, notamment en aidant à préciser les profils de températures et de compositions minéralogiques dans le manteau lunaire.

    Cinquante ans après le succès des missions Apollo et les progrès vertigineux en sélénologie qu'elles ont permis, la Lune reste malgré tout largement inexplorée même si, depuis, plusieurs missions comme LROLRO, Grail et Artemis nous ont permis de bien mieux connaître sa topographie, son champ de gravité et même son très faible champ magnétique. L'étude des données des missions lunaires habitées se poursuit toujours, aussi bien avec les enregistrements sismiques qu'avec la composition des roches rapportées sur Terre.

    Ces données ont permis de construire un scénario spectaculaire de la naissance de la Lune faisant intervenir une collision géante entre la Terre et une petite planètepetite planète de la taille de Mars, baptisée Théia. Cette collision rend compte du fait que la composition de la Lune est anormalement proche de celle de la Terre, ce qui suggère qu'une bonne partie de la matièrematière constituant notre satellite naturel a été arrachée à la Terre primitive par cette collision.

    On pouvait naïvement s'attendre à ce que cette proximité de composition produise une évolution très similaire à celle de la Terre pour la Lune et on sait bien qu'il n'en a rien été. Ce serait oublier que la taille de la Lune n'est pas la même que celle de la Terre, quand bien même le rapport des deux soit bien plus élevé que dans le cas des autres planètes du Système solaire. Au point que certains parlent parfois du système Terre-Lune comme d'un système planétaire double.

    La petite taille de la Lune l'a privée d'une importante réserve de chaleur d'accrétionaccrétion ainsi que d'éléments radioactifs source d'un dégagement de chaleur, de sorte que l'histoire thermique de la Lune a été bien différente de celle de notre Planète. Son champ de gravité plus faible ne lui a pas non plus permis de conserver longtemps une atmosphèreatmosphère primitive et encore moins des éventuelles étendues d'eau.


    Une présentation des travaux sur l'intérieur des planètes menés avec les presses multi-enclumes. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © GIA, courtesy Carnegie Institution of Washington

    Des expériences à hautes pressions pour étudier l'intérieur des planètes

    Cette histoire thermique de la Lune est étroitement liée à son évolution et à sa structuration. Sur Terre, cette histoire a produit sa différentiationdifférentiation avec l'apparition d'un manteau et d'un noyau et surtout une tectonique des plaquestectonique des plaques. Il n'y en a pas sur la Lune mais la sismologiesismologie lunaire nous a permis de découvrir que la Lune s'était aussi différenciée. La proximité de la Lune et sa similarité du point de vue cosmochimique avec la Terre en font donc un laboratoire naturel où étudier la formation et la différentiation des planètes telluriquesplanètes telluriques en permettant de mieux comprendre les mécanismes en œuvre. Car la Nature a fait varier pour nous quelques-uns des paramètres gouvernant en quelque sorte une expérience.

    Pour mieux connaître et comprendre notre Lune, et donc aussi la Terre et indirectement les autres planètes comme MercureMercure, VénusVénus, Mars et même les exoplanètesexoplanètes rocheuses, il est nécessaire de déterminer avec précision les variations de sa température interne en fonction de sa profondeur. Ces variations sont notamment gouvernées par la fameuse équation de la chaleur de Fourier, tout autant que par la composition minéralogique de l'intérieur de la Lune qui dépend également des variations de pression en fonction de la profondeur.

    Pour aider à y voir plus clair, il est possible de faire des expériences à hautes pressions avec des presses multi-enclumes qui reproduisent les conditions régnant à l'intérieur des planètes. Plusieurs laboratoires jouent à ce jeu de par le Monde et depuis des décennies. Une de ces presses a été utilisée par Ananya Mallik, une spécialiste en géoscience de l'université de Rhode Island (États-Unis), en compagnie de ses collègues. Il en a découlé un article publié dans le journal Geochimica et Cosmochimica Acta.

    Un modèle de l'intérieur de la Lune déduit des analyses des données sismologiques des missions Apollo. © Nasa/MSFC/Renee Weber
    Un modèle de l'intérieur de la Lune déduit des analyses des données sismologiques des missions Apollo. © Nasa/MSFC/Renee Weber

    Il s'agissait de déterminer plus précisément la température régnant à l'interface du noyau et du manteau de la Lune et donc d'avoir en quelque sorte une seconde condition aux limites, comme disent les physiciensphysiciens cherchant à résoudre des équations aux dérivées partielles comme celle de Fourier, en plus de celle donnant la température juste sous la surface de la Lune : en moyenne -20 °C.

    L'analyse des données collectées par les sismomètres déposés par les missions Apollo avait conduit les planétologues à penser que l'interface du manteau et du noyau de la Lune était dans un état fondu de 5 à 30 %. En soumettant un échantillon de composition similaire à celle supposée de cette interface à la pression y régnant, qui est de 45.000 atmosphères, il suffisait de faire ensuite varier la température et de mesurer le taux de fusion partiellefusion partielle pour déterminer la valeur de la température à cette interface. En l'occurrence, on sait maintenant qu'elle doit être comprise entre 1.300 et 1.470 °C.

    Il devient donc possible de dresser un profil des variations de températures entre surface et noyau et donc de préciser du même coup la composition minéralogique des roches à l'équilibre (on sait par exemple que dans le cas de la Terre, les changements de pressions et de températures induisent des transitions de phasetransitions de phase en profondeur transformant les minérauxminéraux du manteau, notamment l'olivineolivine).

    Lorsque ces profils de températures et de compositions seront établis, nous devrions faire un nouveau bond en planétologie.


    La Lune posséderait bien un noyau comme celui de la Terre

    Article de Laurent Sacco publié le 10/01/2011

    Un groupe de chercheurs américains et français vient d'apporter une contribution importante au débat concernant l'intérieur de la Lune. En examinant les données des missions Apollo à l'aide des méthodes modernes en sismologie, il apparaît que la Lune posséderait bien un noyau similaire à celui de la Terre.

    On connaît assez bien aujourd'hui la surface de la Lune. Il suffit d'ailleurs d'une bonne connexion InternetInternet pour se lancer dans de superbes survolssurvols de notre satellite grâce aux magnifiques images rapportées par la sonde Kaguya. YouTubeYouTube permet ainsi de passer au-dessus du cratère Anaxagore, du bassin Schrödinger ou encore d'assister à un lever de Terre.

    Mais il n'en est pas de même pour l'intérieur de la Lune qui reste encore plein de mystères. Les données gravimétriques obtenues par les sondes en orbite ont par exemple mis en évidence l'existence de zones plus denses à l'intérieur de la Lune, les mascons, dont la nature fait parfois débat (vestiges de grosses météoritesmétéorites, concentrations de basaltebasalte ou autre chose ?). Les données déduites de la rotation de la Lune à l'aide de rétro-réflecteurs laser ont permis quant à elles de suspecter la présence d'un noyau à l'intérieur de la Lune et les sismomètres déposés par plusieurs missions lunaires, à commencer par Apollo 11, sont elles aussi favorables à l'existence de ce dernier.

    Toutefois, un débat existe concernant la taille de ce noyau et au sujet de sa structure. Est-il complètement solide ou contient-il une zone fluide comme dans le cas de la Terre ?

    Le premier sismomètre PSE déposé par Apollo 11 sur la Lune. © Nasa
    Le premier sismomètre PSE déposé par Apollo 11 sur la Lune. © Nasa

    Il semble que l'on y voie maintenant plus clair grâce aux travaux de plusieurs chercheurs dont Philippe Lognonné de l'Institut de physique du globe de Paris. Ils ont en effet repris les données sismiques fournies par les modules Passive Seismic Experiment (PSEPSE) des missions Apollo pour leur appliquer des méthodes modernes de traitements du signal dans le domaine de la sismologie terrestre. Il a ainsi été possible d'obtenir un meilleur rapport signal/bruit.

    Un autre sismomètre PSE, déposé par Apollo 16 cette fois. © Nasa
    Un autre sismomètre PSE, déposé par Apollo 16 cette fois. © Nasa

    La composition du noyau de la Lune

    L'article des physiciens, publié dans Science, dresse maintenant une image probable du noyau de la Lune. Non seulement il existerait bel et bien mais il partagerait avec la Terre une structure commune. Ainsi, il y aurait une graine solide de 240 kilomètres de rayon à l'intérieur d'un noyau dont la taille est aujourd'hui estimée à 660 kilomètres de diamètre. Entre la graine et la surface du noyau, une zone fluide existerait. À l'extérieur du noyau, ferreux comme celui de la Terre, il y aurait aussi une zone partiellement fondue de 150 kilomètres d'épaisseur. Sur ce point, l'intérieur de la Lune différerait de celui de la Terre. Le noyau contiendrait en revanche des éléments légers comme le soufresoufre et l'oxygèneoxygène, tout comme pour notre planète.

    Les chercheurs vont continuer leurs analyses des données fournies par les instruments des PSE entre 1969 et 1977. On devrait tout de même en savoir plus avec la mission Gravity Recovery and Interior Laboratory  (GRAIL) qui va être lancée cette année. La connaissance de la structure interne de la Lune est importante dans la connaissance de son histoire, de son origine ; elle peut déterminer si elle a pu posséder pendant un temps sa propre dynamodynamo autoexcitatrice générant un champ magnétique, comme la géodynamo de la Terre.