Le pôle sud de la Lune est l’un des environnements les plus extrêmes du Système solaire. Certaines zones y sont constamment plongées dans l’obscurité. Des endroits rêvés pour y conserver de la glace d’eau. En très grande quantité, assurent aujourd’hui des chercheurs américains.
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Il y a quelques années, la sonde MessengerMessenger confirmait la présence de grandes quantités de glace d’eau sur Mercure -- la planète pourtant la plus proche du Soleil -- au fond de cratères situés aux pôles de la planète. Des cratères qui ne voient jamais la lumière du jour et qui, de fait, affichent une température moyenne extrêmement basse.
Or il y a dix ans déjà, la sonde Lunar Crater Observation and Sensing Satellite (LCROSS) avait permis de détecter des traces d'eau et de glace dans un cratère du pôle sud de la Lune. Les données spectroscopiques de la sonde indienne Chandrayaan-1Chandrayaan-1 avaient apporté une nouvelle preuve de la présence d’eau dans cette région l'année dernière. Alors, des chercheurs de l'université de Californie (États-Unis) ont eu l'idée de comparer les cratères ombragés de la surface de Mercure avec ceux de la Lune.
Après avoir passé au crible les données disponibles pour quelque 12.000 cratères lunaires, ils ont noté, pour ceux du pôle sud, un « environnement thermique et une tendance morphologique similaires » à ceux des 2.000 cratères de Mercure qu'ils ont pu étudier. Une preuve, selon eux, que ces cratères recèlent d'épais dépôts de glace, de parfois plusieurs mètres d'épaisseur. Il pourrait ainsi y avoir jusqu'à 100 millions de tonnes de glace d'eau cachées à la surface de la Lune. Pas moins du double de ce qui avait été estimé à partir des seules données de LCROOS.
De l’eau, mais pour combien de temps ?
Début juillet, des chercheurs de la Nasa avaient eux aussi abordé la question de l'eau que pouvaient contenir les cratères du pôle sud de la Lune. D'un point de vue plus dynamique cependant... Selon eux, de l'eau s'échappe lentement de la surface de la Lune. Le tout sous l'effet des particules de vent solairevent solaire et des impacts de météorites.
« À chaque fois qu'une météoritemétéorite frappe le pôle sud de la Lune, une fine couche de glace est potentiellement éjectée et exposée à la lumière du Soleil et à l'environnement spatial en général. Elle est alors sublimée ou éliminée par d'autres processus physiquesphysiques », explique Dana Hurley, astronomeastronome à l'université John Hopkins (États-Unis). De quoi craindre, selon les chercheurs de la NasaNasa, que les couches de glace d'eau -- si elles sont plus fines que ce que supposent les astronomes de l'université de Californie --, présentes sur la Lune, ne disparaissent en quelques milliers d'années seulement.
“Nous devons nous rendre sur place”
À moins que quelques comètes glacées, notamment, ne viennent réalimenter la Lune en eau. Une bonne nouvelle quoi qu'il en soit pour l'avenir de l'exploration lunaire. Car, au lieu d'avoir à affronter l'environnement hostile du fond des cratères du pôle sud de la Lune, les futurs astronautesastronautes pourraient trouver de l'eau dans les régions ensoleillées voisines. « Pour en avoir le cœur net, nous devons nous rendre sur place et obtenir des informations de première main », conclut Dana Hurley.
La Lune contiendrait bien plus d'eau que prévu
Des colons lunaires auraient besoin d'eau pour boire bien sûr mais aussi pour produire l'oxygèneoxygène de l'airair à respirer et le carburant des lanceurslanceurs. Il est peut-être possible de la tirer du régolitherégolithe lunaire un peu partout sur la Lune selon les données de la sonde indienne Chandrayaan-1 et la sonde états-unienne LRO.
Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 06/03/2018
Le succès du lancement du Falcon Heavy de SpaceXSpaceX est encourageant pour ceux qui espèrent qu'Elon MuskElon Musk finira par réussir son pari d'ouvrir Mars à la colonisation dans les quelques décennies à venir. L'entreprise reste formidable et on peut légitimement se demander s'il ne vaudrait pas mieux commencer par coloniser la Lune en y établissant une base permanente. Les astronautes y sont certes nettement plus près de la Terre en cas de problème, mais il y a certainement moins d'eau sur notre satellite que sur la Planète rouge.
Comme on envisage de coloniser la Lune, et ce déjà avant le programme ApolloApollo, les ingénieurs et les sélénologues se sont penchés sur ce problème depuis longtemps. On sait qu'il est au moins possible de fabriquer de grandes quantités d'oxygène à partir du régolithe lunaire qui est riche en oxyde métallique. Il suffit de mobiliser l'énergieénergie solaire pour chauffer ce régolithe en combinaison avec des réserves de méthane apportant des atomesatomes d'hydrogènehydrogène. Mais il resterait à combiner l'oxygène produit avec de l'hydrogène, ce qui ne fait donc que déplacer le problème même si l'on dispose, au moins de cette façon, d'une source appréciable de comburantcomburant pour un propergolpropergol.
On s'est donc tourné vers certains cratères polaires de la Lune que l'on sait partiellement plongés dans l'obscurité pendant des millions voire des milliards d'années. On peut espérer que les chutes de comètescomètes, qui ont dû se produire pendant l'histoire de la Lune après le Grand bombardement tardifGrand bombardement tardif, ont conduit lentement mais sûrement des moléculesmolécules d'eau apportées sur la surface de la Lune à s'y trouver piégées en se condensant. La mission LCross a fourni des indications en ce sens.
Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © NASA Goddard
De l'eau piégée sous forme de radicaux OH dans le régolithe lunaire
Il semble maintenant qu'il y ait une autre source d'eau possible qui, bien que pas aussi facile d'accès, soit disponible partout sur la surface de la Lune. Il s'agirait de radicaux hydroxyle OH qui se trouveraient partout associés aux minérauxminéraux lunaires. Les données fournies par le détecteur Moon Mineralogy Mapper de la sonde indienne Chandrayaan-1 l'avaient déjà laissé supposer voilà presque dix ans. Aujourd'hui une équipe de chercheurs états-uniens vient de publier un article dans Nature Geoscience qui renforce cette conclusion. Ils se sont basés au départ sur les données fournies cette fois-ci par la sonde Lunar Reconnaissance OrbiterLunar Reconnaissance Orbiter (LRO).
La présence d'eau dans les roches, fût-elle sous forme de radicaux OH, se traduit en particulier par une signature spectrale particulière dans la lumière infrarougeinfrarouge réfléchie par le sol lunaire. Le problème est que ce signal est mélangé à celui provenant par émissionémission de ce sol en réponse à son chauffage par le rayonnement solairerayonnement solaire. Ce qui compliquait et rendait problématique les estimations précédentes de la présence des radicaux OH.
Les chercheurs ont trouvé un moyen de mieux résoudre ce problème en utilisant l'instrument Diviner de LRO. La méthode a ensuite été transposée aux données du détecteur Moon Mineralogy MapperMoon Mineralogy Mapper conçu et fabriqué aux États-Unis par les membres du célèbre Jet Propulsion LaboratoryJet Propulsion Laboratory à Pasadena.
L'analyse de ces données conduit à penser que de l'eau, piégée sous forme de radicaux OH associés aux minéraux, est largement répartie sur la surface de la Lune et qu'elle n'est pas confinée à une région particulière et un type de terrain, même si la quantité présente n'est pas la même. Ces résultats contredisent certaines études antérieures, qui avaient suggéré que davantage d'eau était détectée aux latitudeslatitudes polaires de la Lune et que la force du signal variait périodiquement selon le jour lunaire (29,5 jours terrestres).
Reste à prouver que l'on peut bien exploiter en quantité suffisante l'eau dans le régolithe lunaire. La Nasa a quelques idées sur le sujet comme elle l'a prouvé il y a quelques années avec le projet de roverrover lunaire Artemis équipé de la charge utile Resolve (Regolith & Environment Science, and Oxygen & Lunar Volatile Extraction).
Il y aurait beaucoup d'eau sur la Lune
Article de Laurent Sacco, publié le 25 juillet 2017
En janvier 2018, les astronomes découvraient que Mars contient des sortes de gisementsgisements d'eau sous la surface. En 2017, les données collectées par la sonde indienne Chandrayaan-1 ont démontré que la Lune contient de l'eau en importance. Une observation en contradiction avec le scénario de la collision entre la Terre et ThéiaThéia.
Depuis une dizaine d'années, plusieurs équipes de chercheurs (souvent de l'université Brown, à Providence, dans l'État de Rhode Island, aux États-Unis) accumulent des preuves de l'existence d'importantes quantités d'eau dans le manteau de la Lune. En voici un nouvel exemple avec la publication d'un article dans Nature Geoscience. Or, la présence de cette eau est particulièrement surprenante, à tel point qu'elle pourrait bien nous conduire à revoir quelque peu le scénario de la formation de notre satellite.
En effet, nous avons de très bonnes raisons de croire que la Lune s'est formée par accrétionaccrétion des produits éjectés par la collision entre la jeune Terre et une petite planètepetite planète de la taille de Mars baptisée Théia (une variante faisant intervenir plusieurs collisions avec des planètes nainesplanètes naines a toutefois été proposée récemment). Or, ces produits devaient être à hautes températures. L'eau qu'ils pouvaient contenir aurait donc dû s'évaporer avec d'autres éléments volatils.
En 2008, dans une publication du journal Nature, le géochimiste Alberto Saal avait montré, avec des collègues, qu'il y avait bel et bien de l'eau dans le manteau lunaire, au moins dans certaines régions (voir article ci-dessous). Prudent à l'époque, et parce qu'il ne disposait pas des données nécessaires, il n'avait pas avancé d'estimation précise de la quantité d'eau présente dans la totalité du manteau de la Lune.
Lancée le 14 septembre 2007, la mission japonaise Selene (rebaptisée Kaguya du nom d'une princesse d'un célèbre conte) a fourni une moisson extraordinaire de résultats et, surtout, des vidéos stupéfiantes de la surface de notre satellite. Voici une compilation des plus remarquables d'entre elles. © Astroclubul
Des roches lunaires 100 fois plus riches en eau
Quelques années plus tard, Alberto Saal et d'autres chercheurs se sont intéressés à des inclusions vitreuses découvertes dans des échantillons du fameux « sol orange » de la mission Apollo 17. Les géologuesgéologues lunaires pensent qu'il s'agit des restes d'une éruption explosiveéruption explosive, avec des fontaines de lave, s'étant produite il y a 3,64 milliards d'années. Ces inclusions étaient, à l'origine, des petites gouttelettes de magmamagma ; elles ont été piégées par la suite dans un minéralminéral. Elles constituent un outil puissant pour quantifier l'abondance d'eau dans les magmas aux stades pré-éruptifséruptifs.
Stupéfaits, les géochimistes avaient découvert que certaines inclusions étaient 100 fois plus riches en eau qu'on ne l'imaginait ! Leur contenu en autres éléments volatils était également très semblable à celui des basaltesbasaltes des rides médio-océaniquesrides médio-océaniques sur Terre. Cela indiquait donc que certaines parties de l'intérieur de la Lune contenaient autant d'eau que le manteau supérieur de notre planète. Mais de nouveau, on ne pouvait rien conclure quant à la présence de l'eau dans tout le manteau lunaire.
Les chercheurs ont trouvé le moyen de contourner le problème de la rareté des échantillons de roches lunaires provenant de la surface de notre satellite en utilisant les données spectroscopiques collectées par la sonde indienne Chandrayaan-1 alors qu'elle était en orbiteorbite autour de la Lune. La lumière mesurée par les instruments de la sonde permet en effet de remonter à la composition minéralogique du sol lunaire. Il est donc possible de déterminer, dans une certaine mesure, le contenu chimique des dépôts pyroclastiques laissés par des éruptions volcaniqueséruptions volcaniques un peu partout sur la surface de notre satellite naturel.
Ces roches nous donnent des renseignements sur la composition du manteau lunaire puisque les laveslaves refroidies qui les constituent sont des échantillons du magma qui s'est formé dans ce manteau à partir de la fusion partiellefusion partielle des roches présentes. Le verdict est tombé : ces laves avaient des contenus en eau similaires à ceux des roches ramenées sur Terre par les missions Apollo 15 et 17. Cela suggère bien que le contenu en eau de tout le manteau de la Lune est nettement plus élevé que ce qui est prévu par la théorie de la collision avec Théia. Reste à expliquer pourquoi...
Il y a de l'eau dans la Lune !
Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet, publié le 12/07/2008
Une analyse fine des échantillons lunaires ramenés par les missions Apollo a montré la présence de petites quantités d'eau incluses dans le basalte vitrifié. La thèse de la formation du couple Terre-Lune né d'un formidable impact s'en trouve renforcée.
En utilisant une variante récente de l'analyse par spectrométrie de massespectrométrie de masse, une équipe américaine a décelé des traces d'eau dans de minuscules grains vitreux d'origine volcanique ramenés de la Lune par les astronautes des missions Apollo 11Apollo 11, 15 et 17. Les résultats, qui viennent d'être publiés dans la revue Nature, apportent des précisions au scénario de la formation de la Lune et démontrent sans ambigüité que de l'eau est bien présente dans les couches profondes de la Lune.
Alberto Saal et son équipe (Department of Geological Sciences, Brown University, État de Rhode Island) sont partis à la recherche de produits volatiles (gaz carboniquegaz carbonique, eau, fluorfluor, soufresoufre et chlorechlore) inclus dans le basalte lunaire. La technique utilisée est la spectrométrie de masse à ionisationionisation secondaire (Secondary ionion mass spectrometry, SIMS). Son principe est de bombarder l'échantillon avec des faisceaux d'ions pour vaporiser le matériaumatériau à étudier sous forme d'ions, dits secondaires, dirigés vers un spectromètrespectromètre de masse classique. On peut ainsi analyser précisément la structure chimique d'une surface et même répéter l'opération pour étudier l'échantillon en profondeur. De conception ancienne, la SIMS a bénéficié de progrès récents.
Cette nouvelle a mis en évidence la présence d'eau -- 46 parties par millions (ppmppm) --, à l'intérieur même du basalte, ce qui exclut une contaminationcontamination par de l'eau terrestre depuis le retour des échantillons. Les auteurs affirment également que cette eau ne peut provenir d'une pollution par l'hydrogène du vent solaire.
De l'eau dans le manteau lunaire
L'eau était donc bien présente dans les magmas surgis des profondeurs lors d'éruptions volcaniques que l'on date à plus de trois milliards d'années. Selon les auteurs, compte tenu de la quantité d'eau qui se perd dans l'espace au moment où la lave est éjectée, le magma, avant son éruption, devait contenir environ 750 ppm, c'est-à-dire la même teneur que celle des magmas issus du manteau terrestremanteau terrestre au niveau des dorsales médio-océanique.
Voilà, si l'on ose dire, de l'eau apportée au moulin de l'hypothèse désormais classique de la formation du couple Terre-Lune. Selon ce scénario, il y a 4,5 milliards d'années, une planète de la taille de Mars aurait percuté la Terre primitive. Après choc, les parties centrales des deux corps se sont mises à tourner l'une autour de l'autre, entourées des débris arrachés, qui ont fini par retomber pour former la Terre et la Lune. L'eau aurait donc déjà été présente dans le manteau supérieur terrestre dès la formation de notre planète, qui en contiendrait autant que le manteau lunaire.
Toutefois, les auteurs se gardent bien de prédire combien la Lune contient d'eau ni, surtout, si notre satellite pourrait porter quelque part de l'eau sous forme de glace. L'hypothèse est avancée depuis longtemps. La sonde franco-américaine Clementine (1994) et Lunar Prospector (1998) avaient détecté la présence d'hydrogène qui pouvait plaider pour la présence de glace dans les cratères polaires éternellement à l'ombre. Mais en 2006, une analyse radar depuis la Terre avait montré que cet hydrogène résiduel n'est pas confiné dans ces cratères obscurs. Il ne peut donc provenir de glace exposée à la surface puisqu'elle se sublimerait aux premiers rayons de soleil. Les deux prochaines missions lunaires de la Nasa, Lunar Reconnaissance Orbiter et Lunar Crater Observation and Sensing Satellite, qui doivent être lancées l'an prochain, étudieront cette question, entre autres expériences.
Mais qu'il y ait de la glace ou non, on sait maintenant qu'il y a de l'eau sur la Lune ou plutôt dans la Lune...
Ce qu’il faut
retenir
- Il y a dix ans, la sonde Lunar Crater Observation and Sensing Satellite détectait des traces de glace d’eau sur la Lune.
- Selon des chercheurs, dans les cratères du pôle sud de notre satellite se cacheraient en réalité jusqu’à 100 millions de tonnes de glace d’eau.
- De la glace qui pourrait, selon d’autres chercheurs, disparaître en quelques milliers d’années seulement.