On lui doit la découverte de plus de 2.000 astéroïdes et de 2 comètes, l'une en novembre 2011, l'autre le mois dernier. L'astronome amateur française Claudine Rinner explique sa passion à Futura-Sciences. « Dans un monde où tout semble connu et répertorié, l'idée de trouver de nouveaux objets est un peu comme une chasse au trésor. »

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    Lorsqu'on pense aux comètes, on ne peut s'empêcher d'évoquer le nom de Charles MessierCharles Messier, cet astronomeastronome que Louis XV surnommait « le furet des comètes » pour avoir découvert à l'aide de sa lunette astronomique une vingtaine d'astres chevelus au XVIIIe siècle. Aujourd'hui toutes les découvertes sont le fruit de la surveillance automatique du ciel organisée avec des télescopes professionnels. Toutes ? Pas tout à fait, comme le prouve Claudine Rinner, cette Alsacienne qui traque avec succès depuis des années les petits corps perdus dans le Système solaire.  

    Futura-Sciences : Claudine Rinner, pouvez-vous vous présenter ?

    Caudine Rinner : Je suis née en Alsace il y a quarante-sept ans et j'y suis encore. Vers l'âge de 11 ans j'ai commencé à m'intéresser à l'astronomie en regardant la série télévisée CosmosCosmos 1999. Par la suite j'ai lu tout ce que je trouvais dans l'encyclopédie Tout l'Univers concernant la Lune et les planètes. J'ai pu m'offrir une lunette de 5 centimètres de diamètre en économisant mon argentargent de poche et cela m'a permis d'observer Saturne, Jupiter, la LuneLune et ses cratères. À 14 ans j'ai eu l'occasion de m'acheter un télescope de 11,5 centimètres de diamètre puis mes études et le démarrage dans la vie active m'ont éloignée du monde de l'astronomie jusqu'en 1996.

    C'est à ce moment que j'ai découvert dans une revue l'existence des caméras CCD. Du coup je me suis remise à l'observation depuis ma terrasseterrasse avec un télescope de 20 centimètres de diamètre et une caméra CCDCCD. Au fil des années j'ai lentement pu faire évoluer mon matériel et désormais j'observe avec un télescope de 50 centimètres de diamètre installé au Maroc et contrôlé à distance depuis mon domicile alsacien. Ceci a été possible grâce à un partenariat que nous avons pu réaliser entre l'université Cadi Ayyad de Marrakech qui a mis à ma disposition le site de l'Oukaimeden dans l'Atlas marocain, et une association astronomique amateur suisse, la Société astronomique du Jura qui a participé au financement du projet.

    J'ai travaillé pendant vingt-quatre ans en Allemagne dans la conception de circuits intégréscircuits intégrés et je suis actuellement en recherche d'emploi. Je partage ma vie avec Laurent, un passionné de parapente et de chevaux toujours prêt à m'aider dans mes projets astronomiques.

    Claudine Rinner pose devant l'un de ses télescopes à l'observatoire de Dax. © C. Rinner

    Claudine Rinner pose devant l'un de ses télescopes à l'observatoire de Dax. © C. Rinner

    Pourquoi avoir choisi la traque des petits corps du Système solaire ?

    Claudine Rinner : C'est le côté découverte de nouveaux objets qui m'attire le plus. Dans un monde où tout semble connu et répertorié, l'idée de trouver de nouveaux objets (astéroïdes, comètes) était un peu comme une chasse au trésor. Même après plusieurs milliers de découvertes j'ai toujours plaisir à en trouver d'autres.

    Pouvez-vous nous décrire le déroulement typique d'une de vos nuits d'observation à distance ?

    Claudine Rinner : En début de nuit ou même avant je vérifie les prévisions météorologiquesprévisions météorologiques. Grâce aux caméras de surveillance et à la station météo du site de l'Oukaimeden je peux savoir si le ciel est dégagé et si le ventvent n'est pas trop fort. Je fais aussi attention à ce qu'il n'y ait pas trop de neige sur la coupolecoupole (le site est à 2.750 mètres d'altitude). Ensuite, en prenant le contrôle à distance de l'ordinateurordinateur qui se trouve dans la coupole, je peux l'ouvrir et réaliser l'alignement du télescope. Puis je lance un script d'observation automatique, soit une recherche aléatoire dans le ciel en fonction de certains paramètres donnés, soit une vérification concernant un objet détecté dernièrement. L'ordinateur s'occupe de la suite des observations jusqu'à la fermeture de la coupole. Cela me permet de passer une bonne nuit de sommeilsommeil et de traiter les images le lendemain à la recherche de nouveaux objets.

    Le télescope automatisé installé à Dauban a déjà permis à Claudine Rinner de découvrir plus de 1.700 astéroïdes. © C. Rinner

    Le télescope automatisé installé à Dauban a déjà permis à Claudine Rinner de découvrir plus de 1.700 astéroïdes. © C. Rinner

    Quelles sont les découvertes dont vous êtes la plus fière ?

    Claudine Rinner : Mon premier astéroïdeastéroïde (en 2002) me laisse un très bon souvenir et c'est un peu normal car il fallu se battre pour y arriver. Je l'ai découvert avec l'installation qui se trouvait au fond de mon jardin. Et puis il y a bien sûr la découverte de mes deux comètes, P/2011W2 (Rinner) en novembre 2011, une comète périodique qu'on devrait revoir en 2018 et C/2012CH17 (Moss pour Morocco Oukaimeden Sky Survey) le mois dernier.

    Quels sont vos projets astronomiques ?

    Claudine Rinner : Le projet Moss (recherche systématique de petits corps dans le Système solaire) a démarré en octobre 2011. Les premières mesures sont très prometteuses et il semble que beaucoup de découvertes nous attendent. J'ai aussi le projet de remettre en route un télescope automatisé dans le Sud de la France (à Dauban) où j'ai déjà pu réaliser plus de 1.700 découvertes. Il y aurait bien sûr sans doute moyen de faire encore beaucoup plus en améliorant le matériel de détection par exemple mais c'est un projet 100 % amateur avec les limites financières que cela impose.

    Trouvez-vous encore le temps d'observer et de photographier le ciel nocturne ?

    Claudine Rinner : Hélas beaucoup moins que je ne le voudrais. Il y a presque toujours une liste d'objets en attente pour lesquels il faut refaire des observations de contrôle. Lors de la dernière Pleine LunePleine Lune, un moment peu favorable à la recherche d'astéroïdes ou de comètes, j'ai réalisé une photographiephotographie de la célèbre nébuleuse de la Tête de cheval mais je pense que la réalisation de « belles images » est bien plus difficile que mon travail de recherche de petites planètespetites planètes. Pour l'observation visuelle il faut avouer que les belles nuits noires sont de plus en plus rares et cela est bien dommage, mais je ne manque jamais une occasion de lever les yeuxyeux en direction du ciel.