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Mille. C'est le nombre d'exoplanètes recensées par la très sérieuse Encyclopédie des planètes extrasolairesplanètes extrasolaires (en ligne sur exoplanet.eu). La première découverte d'exoplanète n'a pas eu lieu en 1995 avec 51 Pegasi B grâce Michel Mayor et Didier Queloz, comme on a tous tendance à le penser, mais bien en 1992, avec l'identification d'une première planète autour d'un pulsar. Depuis, les chercheurs en ont découvert 999 autres ! C'est plus que ce qui était attendu, compte tenu de la technologie et des fonds disponibles pour cette recherche : si peu au regard du milliard de planètes supposées être abritées par la galaxie.
Interrogé par Futura-Sciences, Jean Schneider, qui a créé cette encyclopédie en ligne, revient sur la genèse de ce projet et nous livre ses analyses au sujet des planètes extrasolaires. Cet astronomeastronome de l'Observatoire de Paris (campus de Meudon) est un des spécialistes français de la recherche sur les exoplanètes. Il s'y intéresse dès 1988 alors qu'aucun de ces objets n'est encore découvert : leur existence est seulement supposée. Cette année-là, il découvre la méthode dite des transits, sans savoir que William Borucki, un chercheur de la Nasa y avait également pensé. Ce sujet avait déjà été abordé en 1952 et même dans un livre daté du XIXe siècle ! Cette méthode consiste à rechercher les variations de luminositéluminosité d'une étoile, provoquées par le passage régulier d'un objet en orbite autour d'elle.
Ce chercheur a également eu l'idée de se servir du satellite français Corot pour détecter des exoplanètes. À l'origine, il devait seulement être utilisé pour de la physiquephysique stellaire. Bien lui en a pris, une trentaine de planètes ont ainsi été découvertes et d'autres le seront à l'avenir, au fur et à mesure de l'exploitation des données. Jean Schneider a également élaboré des méthodes pour détecter des exolunes, proposé pour la première fois la spectroscopie de transittransit de planète pour étudier les atmosphèresatmosphères de ces mondes lointains, ou encore avancé des techniques pour débusquer des anneaux autour de planètes.
L’Encyclopédie des planètes extrasolaires : une référence
Dans les années 1993 et 1994, il découvre InternetInternet et décide de concevoir un site pour recenser ces planètes. À l'époque, seulement une dizaine de planètes était connue. « J'ai trouvé qu'il serait judicieux de faire un site sur ce sujet », nous explique-t-il. Sont alors apparus deux autres sites similaires, américain et suisse. Or, ils avaient comme défaut de recenser les seules planètes découvertes par leur pays respectif. Du fait de « son exhaustivité », l'Encyclopédie des planètes extrasolaires s'est naturellement imposée face à ces deux autres projets.
Aujourd'hui, avec quelque 2.000 visites par jour, cette encyclopédie est devenue une référence. Elle est utilisée par un public très large comme des journalistes, des amateurs éclairés ou des scientifiques, notamment des théoriciens. Ces chercheurs peuvent « vérifier sur ce site certaines de leurs théories ou prédictions ». Par exemple, il est possible de vérifier s'il y a une relation précise entre la massemasse et le rayon des planètes.
Des exoplanètes d’une très grande variété
Le bilan de ces mille corps célestes « montre une diversité extraordinaire ». On trouve de tout : « absolument de tout », tient-il à préciser. À priori, tous les types de planètes qui sont susceptibles d'exister ont été découverts. Cela dit, il y a une possibilité qu'il « existe des planètes binaires, c'est-à-dire deux planètes qui tournent l'une autour de l'autre ». Contrairement aux étoiles, « on ne peut pas dire qu'il y a une planète typique ».
Si Jean Schneider s’attend à ce que Gaia découvre des centaines d’exoplanètes, il travaille aussi sur une grande mission qui serait capable de faire des images d’une exoplanète avec des spectres, de façon à voir le climat ou les saisons. Compte tenu des difficultés techniques à surmonter et du processus de décision assez long de l’Agence spatiale européenne, cette mission n’est pas envisageable avant les années 2030. © R. Dupke (Eureka Scientific Inc.), Nasa, Esa
Dans tout ce corpus, une bonne dizaine sont « relativement habitables », comprendre situées à une unité astronomiqueunité astronomique de leur étoile. Là où l'on suppose que l'eau peut rester à l'état liquideétat liquide à la surface d'une planète, et que les conditions physiques (température en particulier) sont compatibles avec l'existence de la vie, du moins sous la forme que nous lui connaissons. Seul bémol, la notion d'habitabilité n'est pas très précise pour deux raisons. Il faut savoir que sur des planètes il peut exister un « effet de serreeffet de serre qui augmente fortement les températures » (comme sur VénusVénus), ou que des planètes sont installées sur des orbites fortement elliptiques. Résultat, sur ces planètes, l'hiverhiver dure pendant 11 mois et l'été seulement un mois. Cela dit, en raison de la résistancerésistance des microbesmicrobes au froid, il n'est pas incohérent de dire que ces planètes sont habitables.
Si l'on demande à Jean Schneider si certaines de ces planètes peuvent accueillir la vie, il déclarera : « On ne peut pas répondre par oui ou non. Cette recherche est très difficile. S'il ne fait guère de doute qu'avec de la persévérance nous arriverons éventuellement à trouver de l’eau et de l'oxygèneoxygène par spectroscopie, cela ne sera pas une preuve suffisante mais seulement un indice fort. » Le plus surprenant, c'est qu'une planète habitée pourrait être découverte sans que l'on s'y attende !
Bientôt 1.000 exoplanètes supplémentaires révélées
Sur cette question de la vie extraterrestre, pour Jean Schneider : « Il est absolument sûr qu'elle existe sous la forme de microbes, de lichens et de végétation. Là où je n'ai aucune idée, c'est de savoir s'il y a quelque part des animaux ou de la technologie. Il y a des arguments pour ou contre. »
Enfin, la planète préférée de l'astronome est celle gravitant autour de l'étoile Alpha du Centaure : « Elle me plaît pour la simple raison qu'elle serait la plus proche de nous ! » Pour l'instant, elle sort à peine des données, et des observations sont en cours pour confirmer son existence ou la rejeter.
S'il a fallu vingt ans pour recenser 1.000 exoplanètes, seules quelques semaines seront nécessaires pour atteindre les 2.000. En effet, la Nasa s'apprête à rendre publique la découverte d'un millier de ces objets par le satellite Kepler !