Les chercheurs de la Nasa en charge de l'analyse des données collectées par le rover martien Perseverance sont si excités que moins d'une semaine après avoir prélevé des échantillons d'une roche martienne, et sans attendre une publication à ce sujet avec revue par les pairs, ils ont décidé de publier un communiqué sur leur découverte. Bien qu'incitant à la prudence, car on ne peut encore trancher, certaines des caractéristiques de cette roche encore jamais trouvées sur Mars laissent à penser qu'elles auraient été produites par des formes de vie microbiennes et non par des processus abiotiques naturels imitant des processus du vivant.


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    La nouvelle s'est répandue rapidement sur les réseaux sociauxréseaux sociaux de la noosphère le soir du 25 juillet 2024 et elle a fait l'objet d'un communiqué mesuré de la Nasa mais sans qu'aucun article ne soit encore publié ou n'ait fait l'objet d'une évaluation par les pairs (peer review)). Le rover PerseverancePerseverance a découvert et échantillonné une roche martienne ce mois de juillet 2024 dont les caractéristiques fascinent les exobiologistes et les planétologues, comme Rosaly Lopes, qui se demandent s'ils ne tiennent pas enfin la preuve que Mars abritait une vie microscopique dans un passé lointain.

    Le communiqué de l'équipe scientifique du rover Perseverance met cependant bien en garde qu'en l'état, les traces retrouvées dans la roche qui mesure 1 mètre sur 0,6 mètre et surnommée « Cheyava Falls », en référence sur Terre à une cascade du Grand Canyon, pourraient aussi avoir été produites par des processus abiotiquesabiotiques. On se souvient en 1996 de l'affaire de la météorite martienne ALH84001 qui semblait contenir des traces fossilesfossiles de bactériesbactéries martiennes, mais dont la communauté scientifique considère depuis plus d'une décennie qu'il s'agit en fait plus probablement de contaminationscontaminations terrestres.

    Toujours est-il que cette roche a fourni une carottecarotte le 21 juillet 2024 qui est le 22e échantillon du rover destiné à être un jour prochain ramené sur Terre pour y faire l'objet d'une analyse robuste et complète, ce qui n'est pas possible avec Perseverance et laisse donc l'affaire en suspens. La roche a été découverte sur la bordure nord de la vallée de la Neretva, une ancienne vallée fluviale mesurant 400 mètres de large qui a été creusée par l'eau se précipitant dans le cratère de Jezero il y a des milliards d'années, y formant même un delta (voir la vidéo ci-dessous).

    On sait déjà grâce à l'instrument Sherloc (Scanning Habitable Environments with Raman & Luminescence for Organics & Chemicals) du rover que la roche contient des composés organiques carbonés (ce qui n'est pas forcément une preuve qu'ils proviennent de processus biotiques).

    Le rover martien Perseverance de la Nasa a utilisé son instrument Mastcam-Z pour visualiser cet espace de travail autour de l'échantillon prélevé sur un rocher surnommé « <em>Cheyava Falls</em> ». Un trou de forage est visible (à l'extrême gauche) où un échantillon a été prélevé le 21 juillet 2024. À droite, se trouve un rocher surnommé « <em>Steamboat Mountain</em> ». Une zone d'abrasion blanche circulaire est visible sur chaque rocher ; c'est là que le rover a utilisé un outil d'abrasion pour dégager la surface supérieure, permettant aux instruments d'étudier la composition des roches. Les images qui composent ce composite ont été prises par l'instrument Mastcam-Z du rover le 23 juillet 2024, le 1217<sup>e</sup> jour, ou sol, de la mission. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS
    Le rover martien Perseverance de la Nasa a utilisé son instrument Mastcam-Z pour visualiser cet espace de travail autour de l'échantillon prélevé sur un rocher surnommé « Cheyava Falls ». Un trou de forage est visible (à l'extrême gauche) où un échantillon a été prélevé le 21 juillet 2024. À droite, se trouve un rocher surnommé « Steamboat Mountain ». Une zone d'abrasion blanche circulaire est visible sur chaque rocher ; c'est là que le rover a utilisé un outil d'abrasion pour dégager la surface supérieure, permettant aux instruments d'étudier la composition des roches. Les images qui composent ce composite ont été prises par l'instrument Mastcam-Z du rover le 23 juillet 2024, le 1217e jour, ou sol, de la mission. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS

    La roche la plus déroutante jamais étudiée par Perseverance

    Ken Farley, scientifique du projet Perseverance de Caltech à Pasadena, aux États-Unis, explique à ce sujet que « les chutes de Cheyava (Cheyava Falls en anglais) sont la roche la plus déroutante, la plus complexe et potentiellement la plus importante jamais étudiée par Perseverance. D'un côté, nous avons détecté pour la première fois de la matière organique, des taches colorées caractéristiques indiquant des réactions chimiques que la vie microbienne pourrait utiliser comme source d'énergie et des preuves évidentes que l'eau - nécessaire à la vie - a traversé la roche. D'un autre côté, nous n'avons pas pu déterminer exactement comment la roche s'est formée et dans quelle mesure les roches voisines ont pu chauffer les chutes de Cheyava et contribuer à ces caractéristiques ».


    Quels secrets pourrions-nous percer en étudiant des échantillons de Mars dans des laboratoires ultramodernes sur Terre ? Les scientifiques du monde entier sont impatients de le découvrir. À la fin de l'automne 2023, le rover Perseverance Mars de la Nasa a collecté 21 échantillons scientifiquement sélectionnés de roches martiennes, qui, selon les scientifiques, pourraient contenir des preuves extraordinaires pour aider à répondre à des questions vieilles de plusieurs siècles telles que : La vie a-t-elle jamais existé sur Mars ? ou Comment la Planète rouge a-t-elle évolué au fil du temps ? Le rover Perseverance a collecté un ensemble diversifié d’échantillons, notamment des roches sédimentaires qui sont efficaces pour préserver des traces de la vie anciennes. Il y a aussi des roches ignées, qui peuvent nous renseigner sur les débuts de l'évolution de Mars. Grâce à une série de futures missions appelées Mars Sample Return, ces échantillons pourraient être amenés sur Terre pour une étude approfondie et pourraient aider les exobiologistes dans leur recherche de signes d’une vie microbienne ancienne sur la Planète rouge. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, JPL-Caltech, ESA, GSFC, MSFC, JSC, MAVEN, Lunar and Planetary Institute

    En ce qui concerne l'aspect « peau de léopardléopard » des chutes de Cheyava, David Flannery, astrobiologiste et membre de l'équipe scientifique de Perseverance de l'université de technologie du Queensland en Australie, déclare dans le communiqué de la Nasa que « ces taches sont une grande surprise. Sur Terre, ces types de caractéristiques dans les roches sont souvent associés aux traces fossilisées de microbesmicrobes vivant dans le sous-sol ».

    Mais le chercheur ajoute : « Nous avons traité cette roche avec des laserslasers et des rayons Xrayons X et l'avons photographiée littéralement jour et nuit sous presque tous les angles imaginables. Scientifiquement, Perseverance n'a rien de plus à offrir. Pour comprendre pleinement ce qui s'est réellement passé dans cette vallée fluviale martienne du cratère Jezero il y a des milliards d'années, nous voudrions rapporter l'échantillon des chutes de Cheyava sur Terre, afin qu'il puisse être étudié avec les puissants instruments disponibles dans les laboratoires. »

    Le rover martien Perseverance de la Nasa a capturé cette image d'un rocher surnommé « <em>Cheyava Falls</em> » découvert dans un ancien lit de rivière dans la région « <em>Bright Angel </em>» du cratère Jezero de Mars. Cette image de la roche a été capturée à l'aide d'une caméra appelée Watson, qui fait partie de la suite d'instruments Sherloc. Sur toute la longueur du rocher se trouvent de grandes veines de sulfate de calcium blanc. Entre ces veines, des bandes de matériau dont la couleur rougeâtre suggère la présence d'hématite, l'un des minéraux qui donnent à Mars sa teinte rouille caractéristique. Les scientifiques s'intéressent particulièrement aux taches claires de la taille d'un millimètre et de forme irrégulière sur la bande rougeâtre centrale (du coin inférieur gauche au coin supérieur droit de l'image) qui sont entourées d'un mince anneau de matériau sombre, semblable à des taches de léopard. Des taches de ce type sur les roches terrestres sédimentaires peuvent se produire lorsque des réactions chimiques impliquant l'hématite font passer la roche du rouge au blanc. Ces réactions peuvent également libérer du fer et du phosphate, provoquant peut-être la formation de halos noirs, et elles peuvent être une source d'énergie pour les microbes, d'où l'association entre ces caractéristiques et les microbes dans un environnement terrestre. Le matériau blanc et bosselé observé de chaque côté des taches est parsemé de quelques cristaux d'olivine verts, qui se forment dans des roches ignées telles que des coulées de lave. On ne sait pas si l'olivine s'est formée en même temps que les taches de léopard ; les scientifiques espèrent établir une chronologie de la formation de l'olivine et des taches. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS
    Le rover martien Perseverance de la Nasa a capturé cette image d'un rocher surnommé « Cheyava Falls » découvert dans un ancien lit de rivière dans la région « Bright Angel » du cratère Jezero de Mars. Cette image de la roche a été capturée à l'aide d'une caméra appelée Watson, qui fait partie de la suite d'instruments Sherloc. Sur toute la longueur du rocher se trouvent de grandes veines de sulfate de calcium blanc. Entre ces veines, des bandes de matériau dont la couleur rougeâtre suggère la présence d'hématite, l'un des minéraux qui donnent à Mars sa teinte rouille caractéristique. Les scientifiques s'intéressent particulièrement aux taches claires de la taille d'un millimètre et de forme irrégulière sur la bande rougeâtre centrale (du coin inférieur gauche au coin supérieur droit de l'image) qui sont entourées d'un mince anneau de matériau sombre, semblable à des taches de léopard. Des taches de ce type sur les roches terrestres sédimentaires peuvent se produire lorsque des réactions chimiques impliquant l'hématite font passer la roche du rouge au blanc. Ces réactions peuvent également libérer du fer et du phosphate, provoquant peut-être la formation de halos noirs, et elles peuvent être une source d'énergie pour les microbes, d'où l'association entre ces caractéristiques et les microbes dans un environnement terrestre. Le matériau blanc et bosselé observé de chaque côté des taches est parsemé de quelques cristaux d'olivine verts, qui se forment dans des roches ignées telles que des coulées de lave. On ne sait pas si l'olivine s'est formée en même temps que les taches de léopard ; les scientifiques espèrent établir une chronologie de la formation de l'olivine et des taches. © Nasa, JPL-Caltech, MSSS

    Le rover Perseverance de la Nasa a fait des observations très convaincantes dans une roche martienne qui, avec une étude plus approfondie, pourraient prouver que la vie était présente sur Mars dans un passé lointain – mais comment pouvons-nous le déterminer à partir d'une roche, et que devons-nous faire pour le confirmer ? Morgan Cable, scientifique de l'équipe Perseverance, y regarde de plus près. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, JPL

    Des traces fossilisées de microbes vivant dans le sous-sol ?

    Encore une fois, la prudence s'impose dans l'interprétation des données actuelles qui laissent au moins penser que les roches échantillonnées par Perseverance, ont d'abord été déposées sous forme de boues, par des écoulements d'eau, avec des composés organiques mélangés qui ont fini par se cimenter. Plus tard, un deuxième épisode d'écoulement de fluide a pénétré dans les fissures de la roche, permettant des dépôts minérauxminéraux qui ont créé les grandes veines blanches de sulfate de calciumsulfate de calcium visibles aujourd'hui.


    La Nasa et l’ESA élaborent des plans pour l’une des campagnes les plus ambitieuses jamais entreprises dans l’espace : ramener en toute sécurité sur Terre les premiers échantillons de matériaux martiens pour une étude détaillée. L’ensemble diversifié d’échantillons scientifiquement sélectionnés actuellement collectés par le rover martien Perseverance pourrait aider les scientifiques à répondre à la question de savoir si une vie ancienne est apparue sur la Planète rouge. Le rapatriement d’échantillons de Mars sur Terre pour une étude future se déroulerait en plusieurs étapes avec plusieurs engins spatiaux et, d’une certaine manière, de manière synchronisée. Cette courte animation présente les moments clés de la campagne de retour d’échantillons de Mars : de l’atterrissage sur Mars et de la fixation des tubes d’échantillons à leur lancement depuis la surface et leur transport vers la Terre. © Nasa, ESA, JPL-Caltech, GSFC, MSFC

    Or, ces veines sont remplies de cristaux de la taille d'un millimètre d'olivineolivine, un minéralminéral qui se forme à partir du magmamagma, et les lois de la géochimie autorisent aussi à penser que l'olivine et le sulfate auraient pu être introduits dans la roche à des températures inhospitalières pour la vie, créant une réaction chimique abiotique qui aurait donné naissance aux taches de léopard.

    On ne peut trancher en l'état d'où l'importance d'un retour sur Terre des échantillons de Perseverance, une opération qui n’est prévue qu’à l’horizon 2033.


    Après 1000 jours d’exploration martiens, le rover Perseverance de la Nasa étudie des roches qui témoignent de plusieurs époques de l’histoire d’un delta fluvial vieux de plusieurs milliards d’années. Les scientifiques étudient cette région de Mars, connue sous le nom de cratère Jezero, pour voir s'ils peuvent trouver des preuves d'une vie ancienne enregistrée dans les roches. Ken Farley, scientifique du projet Perseverance, propose une visite guidée d’un panorama richement détaillé de l’emplacement du rover en novembre 2023, pris par l’instrument Mastcam-Z. Composée de 993 images individuelles et de 2,38 milliards de pixels, cette mosaïque à 360 degrés regarde dans toutes les directions depuis un endroit que l'équipe scientifique du rover appelle « Airey Hill ». Des parties du rover lui-même sont visibles dans la scène, apparaissant plus déformées vers les bords en raison du traitement de l'image. Une amélioration des couleurs appliquée à l’image augmente le contraste et accentue les différences de couleurs. En se rapprochant de ce à quoi ressemblerait la scène dans des conditions d'éclairage similaires à celles de la Terre, cet ajustement permet aux scientifiques de la mission d'utiliser leur expérience quotidienne pour interpréter le paysage. La vue sur Mars serait plus sombre et plus rougeâtre. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa, JPL-Caltech, ASU, MSSS ; ESA, DLR, FU-Berlin