Pour étudier les galaxies et comprendre mieux leur évolution, les effets des champs magnétiques sont à prendre en compte. De nouvelles images à plus haute résolution de la galaxie spirale M51 montrent à quel point ces champs se comportent comme les courants d'un fluide turbulent et chaotique.


au sommaire


    Au début du XIXe siècle, Lagrange, Laplace, Gauss et Hamilton ont développé la mécanique céleste au point de permettre à Le Verrier de faire la découverte de la planète NeptuneNeptune uniquement par le calcul. Cette mécanique sera renouvelée par Poincaré qui sera le premier à y montrer l'existence des instabilités que l'on décrit aujourd'hui avec la théorie du chaos.

    Mais il n'y a pas que les forces de gravitationforces de gravitation qui comptent dans le monde des astres, que ce soit à l'échelle de la Terre, du Système solaire ou des galaxies et c'est pour cette raison que le XXe siècle a vu, lui, le développement d'une véritable électrodynamique cosmique, pour reprendre le nom d'un célèbre ouvrage du prix Nobel de physique Hannes Alfvén. On prendra alors en compte l'existence du quatrième état de la matière qu'est le plasma ainsi que les effets des champs magnétiqueschamps magnétiques sur les fluides chargés au sein, en particulier, de la fameuse théorie de la magnétohydrodynamique.

    Les lignes de champ magnétique détectées par Sofia sont superposées sur une image de fond de la galaxie du Tourbillon, M51, prise avec le télescope spatial Hubble de la Nasa. Pour la première fois, la vue infrarouge de Sofia montre que les champs magnétiques dans les bras extérieurs ne suivent pas la forme en spirale de la galaxie et sont au contraire déformés. L'activité intense de formation d'étoiles dans ces régions, représentée en rouge, peut être à l'origine du chaos. © Nasa, <em>the Sofia science team, A. Borlaff; Nasa, ESA, S. Beckwith (STScI) and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)</em>
    Les lignes de champ magnétique détectées par Sofia sont superposées sur une image de fond de la galaxie du Tourbillon, M51, prise avec le télescope spatial Hubble de la Nasa. Pour la première fois, la vue infrarouge de Sofia montre que les champs magnétiques dans les bras extérieurs ne suivent pas la forme en spirale de la galaxie et sont au contraire déformés. L'activité intense de formation d'étoiles dans ces régions, représentée en rouge, peut être à l'origine du chaos. © Nasa, the Sofia science team, A. Borlaff; Nasa, ESA, S. Beckwith (STScI) and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)

    La mécanique des fluides, chargés ou non, est bien sûr d'une grande importance en astrophysiqueastrophysique et on ne s'est pas privé d'interpréter l'existence des galaxies spiralesgalaxies spirales comme un fossilefossile de l'état turbulent de la matière à la fin du Big BangBig Bang. Toutefois, cette théorie a été abandonnée et l'on sait maintenant que la structure spirale des galaxies est due à des ondes de densité, un peu comme des vaguesvagues à la surface de l'eau, dans le gazgaz d'étoilesétoiles autogravitant, contenu dans les disques des galaxies spirales.

    Des plasmas rendus turbulents par les explosions de supernovae

    Mais là encore, le cosmoscosmos est plein de surprise pour nous car on a montré depuis des décennies que des lignes de champ magnétique s'enroulaient en suivant les bras galactiques. Nul doute que l'étude des plasmas interstellaires et des champs magnétiques dans ces plasmas soit précieuse pour comprendre et modéliser les galaxies. Or, il se trouve que ces plasmas doivent certainement devenir très turbulents du fait du souffle des explosions de supernovaesupernovae dans les bras galactiques, au moins là où l'on observe des formations importantes de jeunes étoiles massives terminant leur courte vie sous la forme de ces catastrophes cosmiques.

    Superposée au portrait réalisé par Hubble, la galaxie M51 dévisagée dans les rayonnements X par Chandra (en pourpre). Plus de 500 sources apparaissent, parmi lesquelles de nombreuses supernovae échauffant leur environnement à plusieurs millions de degrés. Très prolixes, les deux galaxies en collision abritent également des binaires à rayonnement X où se cachent des trous noirs. © Nasa, STScI, CXC, Wesleyan University, Roy Kilgard
    Superposée au portrait réalisé par Hubble, la galaxie M51 dévisagée dans les rayonnements X par Chandra (en pourpre). Plus de 500 sources apparaissent, parmi lesquelles de nombreuses supernovae échauffant leur environnement à plusieurs millions de degrés. Très prolixes, les deux galaxies en collision abritent également des binaires à rayonnement X où se cachent des trous noirs. © Nasa, STScI, CXC, Wesleyan University, Roy Kilgard

    C'est bien ce que montrent aujourd'hui des observations à plus forte résolutionrésolution des champs magnétiques galactiques, comme l'illustre tout récemment une photographiephotographie révélant les lignes de ces champs dans la célèbre galaxie du Tourbillongalaxie du Tourbillon, alias M51. On peut le constater avec une image produite à partir des campagnes menées avec le télescopetélescope du Stratospheric Observatory for Infrared AstronomyStratospheric Observatory for Infrared Astronomy, Sofia, de la NasaNasa.

    La High-Resolution Airborne Wideband Camera (HAWC+), équipant ce télescope au regard infrarougeinfrarouge à bord d'un avion, permet en effet de mesurer ces champs magnétiques via leur effet sur la polarisation de la lumièrelumière traversant les régions où règnent ces forces électromagnétiques.

    Mais il montre également, maintenant, qu'en dehors des bras spiraux de M51 les champs magnétiques sont encore plus turbulents et chaotiques.


    Débauche de rayonnements X dans la galaxie du Tourbillon

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman publié le 13/06/2014

    La magnifique galaxie du Tourbillon (M51) se livre dans un portrait composite associant des centaines d'heures d'observation des télescopes spatiaux Hubble et ChandraChandra. Les astronomesastronomes ont identifié en son sein quelque 500 sources de rayonnement X. Une débauche d'énergieénergie qui trahit un taux de féconditétaux de fécondité élevé, suscité bien sûr par la collision de deux galaxies.

    À quelque 30 millions d'années-lumièreannées-lumière de nous s'étend, en direction de la constellationconstellation des ChiensChiens de chasse, Messier 51 (désignée aussi NGCNGC 5194), une remarquable galaxie spirale en pleine noce avec l'une de ses paires (NGC 5195), plus modeste. Comme on peut le deviner, elle doit son surnom de galaxie du Tourbillon à sa structure caractéristique qui se présente à nous, observateurs de la Voie lactée, intégralement de face. D'ailleurs, astronomes professionnels et amateurs apprécient beaucoup la photographier et l'étudier dans diverses longueurs d'ondelongueurs d'onde à travers leurs télescopes.

    Les deux protagonistes se confient de plus en plus aux instruments. La collision qui comprime les nuagesnuages de gaz et de poussières augmente en effet le taux de formation des étoiles, comme on peut le constater sur les portraits dépeints par Hubble et SpitzerSpitzer. Les deux galaxies ayant été dévisagées durant une décennie par Chandra, ses données ont été récemment superposées à celles collectées dans le visible par le célèbre télescope spatialtélescope spatial.

    Des astronomes ont compilé plus de 900.000 secondes d’observation, échelonnées sur une décennie, de la galaxie du Tourbillon (M51) distante de seulement 30 millions d’années-lumière. Au lieu de la centaine de sources de rayonnement X débusquées auparavant, le nouveau sondage des entrailles flamboyantes des deux galaxies en a révélé plus de 500. © Nasa, STScI, CXC, <em>Wesleyan University</em>, Roy KilgardHyperactivité X au cœur du maelstrom de la galaxie M51Sensible au rayonnement X, le télescope spatial Chandra a donc fait parler les sources d’activité les plus intenses qui jalonnent les deux galaxies. Le dernier recensement en a relevé environ 500 (contre 100 précédemment) au travers de sondages totalisant plus de 900.000 secondes d’observation. La plupart de ces sources sont liées à des supernovae situées dans ou à proximité des innombrables nuages moléculaires qu’elles arborent.Rappelons que le rapprochement des deux galaxies a considérablement décuplé la fécondité des nébuleuses. En témoigne le nombre élevé d’étoiles binaires à rayonnement X (<em>X-ray binaries</em> ou XRB) qui y figurent. Ce sont des paires d’astres généralement constituées d’une étoile à neutrons (très compacte) et d’une étoile plus ordinaire, laquelle voit inexorablement sa matière arrachée par la première. Les gaz capturés sont échauffés à plusieurs millions de degrés et provoquent d’intenses flambées aussitôt (avec 30 millions d’années de retard, ici, pour nous), remarquées par <a title="M51: Chandra Captures Galaxy Sparkling in X-rays" target="_blank" href="http://chandra.harvard.edu/photo/2014/m51/">Chandra</a>. Pour les astronomes, une dizaine de cas cachent un trou noir et huit d’entre eux lapent la matière d’une étoile plus massive que notre Soleil.Actuellement beaucoup plus tranquille, la Voie lactée connaîtra (et a connu plusieurs fois) un sort comparable lors de sa <a title="Voie lactée et Andromède : collision dans 4 milliards d'années..." href="//www.futura-sciences.com/magazines/espace/infos/actu/d/astronomie-voie-lactee-andromede-collision-4-milliards-annees-39102/">rencontre</a> à venir avec notre grande voisine, la <a title="Les galaxies naines d'Andromède défient la matière noire" href="//www.futura-sciences.com/magazines/espace/infos/actu/d/astronomie-galaxies-naines-andromede-defient-matiere-noire-48706/">galaxie d’Andromède</a> (M31).
    Des astronomes ont compilé plus de 900.000 secondes d’observation, échelonnées sur une décennie, de la galaxie du Tourbillon (M51) distante de seulement 30 millions d’années-lumière. Au lieu de la centaine de sources de rayonnement X débusquées auparavant, le nouveau sondage des entrailles flamboyantes des deux galaxies en a révélé plus de 500. © Nasa, STScI, CXC, Wesleyan University, Roy KilgardHyperactivité X au cœur du maelstrom de la galaxie M51Sensible au rayonnement X, le télescope spatial Chandra a donc fait parler les sources d’activité les plus intenses qui jalonnent les deux galaxies. Le dernier recensement en a relevé environ 500 (contre 100 précédemment) au travers de sondages totalisant plus de 900.000 secondes d’observation. La plupart de ces sources sont liées à des supernovae situées dans ou à proximité des innombrables nuages moléculaires qu’elles arborent.Rappelons que le rapprochement des deux galaxies a considérablement décuplé la fécondité des nébuleuses. En témoigne le nombre élevé d’étoiles binaires à rayonnement X (X-ray binaries ou XRB) qui y figurent. Ce sont des paires d’astres généralement constituées d’une étoile à neutrons (très compacte) et d’une étoile plus ordinaire, laquelle voit inexorablement sa matière arrachée par la première. Les gaz capturés sont échauffés à plusieurs millions de degrés et provoquent d’intenses flambées aussitôt (avec 30 millions d’années de retard, ici, pour nous), remarquées par Chandra. Pour les astronomes, une dizaine de cas cachent un trou noir et huit d’entre eux lapent la matière d’une étoile plus massive que notre Soleil.Actuellement beaucoup plus tranquille, la Voie lactée connaîtra (et a connu plusieurs fois) un sort comparable lors de sa rencontre à venir avec notre grande voisine, la galaxie d’Andromède (M31).