Les trous noirs supermassifs sont des titans cosmiques qui lorsqu'ils accrètent beaucoup de matière se transforment en noyaux actifs de galaxies, quasars et galaxies de Seyfert par exemple. Les réseaux de neurones de l'IA permettent aujourd'hui aux astrophysiciens de mieux comprendre comment ces noyaux actifs s'allument et il semblerait bien que ce ne soit pas possible uniquement quand deux galaxies fusionnent contrairement à ce que l'on a longtemps pensé.


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    L'apprentissage automatique (machine learning, en anglais) est une technologique d’intelligence artificielle qui occupe de plus en plus de place dans nos vies et aussi dans le domaine de la recherche scientifique, par exemple avec le programme Seti. Un groupe d'astrophysiciensastrophysiciens mené par des chercheurs de l'University of Bath (Royaume-Uni) a utilisé une des méthodes de l'apprentissage automatique - celle utilisant des réseaux de neuronesneurones électroniques inspirés des neurones biologiques du cerveaucerveau humain et qui est la base de bien des exploits de l'IAIA depuis une décennie environ - pour s'attaquer à un problème toujours pas complètement résolu, celui de la croissance des trous noirs supermassifstrous noirs supermassifs que l'on sait être au cœur de la majorité des grandes galaxies, par exemple M87.

    Pendant longtemps, en raison notamment des observations du télescope Hubble, on a pensé que ces trous noirs, qui contiennent de un million à plusieurs milliards de masses solaires, croissaient par fusion après une fusion de deux galaxies justement. Le phénomène est cependant encore un peu énigmatique en raison notamment de ce que l'on appelle le problème du parsec final, c'est-à-dire le fait que si l'on arrive à comprendre comment deux trous noirs géants après une fusion galactique vont avoir tendance à chuter vers le centre de la galaxie nouvellement formée, ils devraient s'arrêter plus longtemps que l'âge de l'Univers à plusieurs années-lumière l'un de l'autre au cœur de la galaxie.


    Un communiqué de presse de Hubble de 2008 a dévoilé 59 images d'interactions galactiques. Cependant, chaque image ne capture qu’un instant d’un processus de collision qui s’étale sur un milliard d’années. Cette vidéo montre plusieurs visualisations de simulations de collisions de galaxies par un superordinateur. Elles montrent la séquence complète de collision et comparent les différentes étapes de la collision aux différentes paires de galaxies en interaction observées par Hubble. Les deux galaxies spirales de chaque simulation se déforment, se tordent et fusionnent, faisant correspondre différentes images à différents moments et sous différents angles de vue. Grâce à cette combinaison de simulations de recherche et d’observations à haute résolution, ces accidents titanesques peuvent être mieux illustrés et compris. © Space Telescope Science Institute (STScI), Nasa

    Une IA supérieure aux humains pour identifier les collisions de galaxies

    Depuis plus d'une décennie, un nouveau paradigme a pris le dessus sur l'ancien, celui des filaments de matière noire froide canalisant des courants d’hydrogène et d’hélium vers des galaxies, faisant croître aussi simultanément trous noirs supermassifs et galaxies, comme le suggère d'ailleurs le fait que les masses des deux objets sont presque toujours en accord avec une seule loi de proportionnalité.

    L'équipe de chercheurs vient, peut-être, de donner encore plus de poids à l'hypothèse des courants froids avec une publication dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (MNRAS) d'un article que l'on peut aussi trouver en accès libre sur arXiv. L'article montre en tout cas que l'influence des collisions avec fusion n'est pas simple ni suffisante pour expliquer la croissance des trous noirs géants.

    Les chercheurs expliquent qu'ils ont entraîné un réseau neuronalréseau neuronal sur des fusions de galaxies simulées, puis l'ont appliqué aux galaxies observées dans le cosmoscosmos. Dans le communiqué de l'University of Bath expliquant le travail des astrophysiciens, on apprend que depuis des années, des Homo sapiensHomo sapiens étaient utilisés pour classifier des images montrant ou non des fusions de galaxies prises avec des télescopestélescopes. Mais les humains ont leur limite en tentant d'identifier notamment des queues de maréemarée, des courants d'étoilesétoiles arrachés par les forces de maréeforces de marée à deux galaxies en interaction gravitationnelle, c'est-à-dire en cours de fusion ou de passage transitoire rapproché. En conséquence, les études sur les fusions donnent souvent des résultats contradictoires en prenant les données sélectionnées par des humains.

    « Lorsque les humains recherchent des fusions de galaxies, ils ne savent pas toujours ce qu'ils regardent et ils utilisent beaucoup d'intuition pour décider si une fusion a eu lieu. En entraînant une machine à classer les fusions, vous obtenez une lecture beaucoup plus véridique de ce que font réellement les galaxies. Déterminer le rôle des trous noirs supermassifs dans l'évolution des galaxies est crucial dans nos études de l'Univers », explique dans le communiqué Mathilda Avirett-Mackenzie, doctorante au Département de physiquephysique de l'université de Bath et premier auteur de l'article de MNRAS.

    Des collisions galactiques qui poussent des nuages de gaz froids

    Elle et ses collègues y ont en effet montré que les capacités de classifications de l'IA qu'ils ont entraînée étaient supérieures à celles des humains et donnaient de manière bien plus fiable des identifications de fusions de galaxies, et bien sûr plus rapidement. Au final, les astrophysiciens ont pu montrer que les fusions en tant que telles ne sont pas fortement associées à la croissance d'un trou noir et qu'un réservoir de gazgaz froid à l'intérieur et au centre la galaxie hôte est également nécessaire. Ce serait lors d'une collision avec une galaxie contenant un tel réservoir que la matièrematière du gaz du réservoir pourrait alimenter un trou noir et ainsi produire un noyau actif de galaxiesnoyau actif de galaxies, comme le sont par exemple les galaxies de Seyfert.

    C'est important pour comprendre quand une galaxie devient un quasar, c'est-à-dire quand pour une raison ou un autre, beaucoup de matière se retrouve à tomber en direction d'un trou noir supermassif y formant un disque d'accrétiondisque d'accrétion pouvant être de la taille du Système solaireSystème solaire.

    En relation avec la rotation d'un tel astreastre compact il se produit alors une libération d'énergieénergie fabuleuse qui rend la région contenant le trou noir et son disque d'accrétion aussi lumineuse que des centaines de milliards d'étoiles. Cette énergie peut affecter le contenu en gaz d'une galaxie, or ce contenu est celui qui permet la formation d'étoiles. En vidant de son gaz une galaxie, le souffle et la chaleurchaleur du rayonnement et des ventsvents de matière générés par un trou noir supermassif peuvent donc « tuer » une galaxie en rendant la formation de nouvelles étoiles impossibles tant qu'un nouvel apport de gaz n'est pas injecté dans la galaxie.

    C'est ce qu'explique Avirett-Mackenzie quand elle déclare : « Pour que les galaxies forment des étoiles, elles doivent contenir des nuagesnuages de gaz froids capables de s'effondrer en étoiles. Des processus hautement énergétiques comme l'accrétion de trous noirs supermassifs réchauffent ce gaz, le rendant soit trop énergétique pour s'effondrer, soit l'expulsant de la galaxie. »

    Sa directrice de thèse, Carolin Villforth, ajoute : « Jusqu'à présent, tout le monde étudiait les fusions de la même manière : par la classification visuelle. Avec cette méthode, en utilisant des classificateurs experts capables de détecter des caractéristiques plus subtiles, nous n'avons pu observer que quelques centaines de galaxies, pas plus. L'utilisation de l'apprentissage automatique ouvre plutôt un champ entièrement nouveau et très passionnant dans lequel vous pouvez analyser des milliers de galaxies à la fois. Vous obtenez des résultats cohérents sur de très grands échantillons et, à tout moment, vous pouvez examiner de nombreuses propriétés différentes d'un trou noir. »

    Ce travail est le fruit d'une collaboration entre les partenaires de BiD4BEST (Big Data Applications for Black Hole Evolution Studies), dont le réseau de formation innovant propose une formation doctorale sur la formation de trous noirs supermassifs, précise le communiqué de l'université de Bath.