Le disque protoplanétaire autour de l’étoile TW Hydrae devrait être en train de se dissiper pour laisser la place à un disque de débris pauvre en gaz étant donné son âge. Mais contrairement à ce qui était attendu, une nouvelle méthode de mesure de sa masse, utilisée avec les observations fournies par Herschel, vient de révéler qu’il contenait encore de quoi faire 50 géantes gazeuses de la taille de Jupiter.
Représentation d'artiste de l'observatoire spatial Herschel. Les observations avec le satellite Herschel devraient cesser en février ou en mars 2013, soit presque quatre ans après son lancement. © D. Ducros, Esa

Représentation d'artiste de l'observatoire spatial Herschel. Les observations avec le satellite Herschel devraient cesser en février ou en mars 2013, soit presque quatre ans après son lancement. © D. Ducros, Esa

Parmi les étapes conduisant d'un nuage moléculaire froid, comme un globule de Bok, à un système planétaire, il en est une associée à la présence d'un disque protoplanétaire. C'est dans ce disque riche en poussières et en gaz que commence la formation des planètes. Toutefois, on pense généralement que les disques protoplanétaires ont une courte durée de vie, dix millions d'années environ. Il laisse ensuite la place à un disque de débris dans lequel la formation planétaire se poursuit encore pour un temps, mais où il n'existe presque plus de gaz.

Il existe plusieurs modèles de formation et d'évolution des disques protoplanétaires en fonction de leur masse (et bien sûr d'autres paramètres, comme la composition et la viscosité de ces disques). Il est donc important de pouvoir estimer la masse contenue dans ceux que l'on choisit d'étudier avec des télescopes, comme avec Herschel. Un groupe d'astrophysiciens vient d'utiliser une nouvelle méthode basée sur la mesure du rayonnement infrarouge lointain pour estimer la masse d'un vieux disque protoplanétaire.

Une vue d'artiste du disque protoplanétaire autour de TW Hydrae. De nouvelles géantes gazeuses attendent peut-être de s'y former. © Nasa, JPL-Caltech

Une vue d'artiste du disque protoplanétaire autour de TW Hydrae. De nouvelles géantes gazeuses attendent peut-être de s'y former. © Nasa, JPL-Caltech

Du deutérure d'hydrogène pour peser des disques protoplanétaires

La cible était l'étoile TW Hydrae, située à 176 années-lumière du Soleil dans la constellation de l'Hydre. On estime son âge à dix millions d'années, ce qui veut dire que son disque protoplanétaire devrait être sur le point de se dissiper. Le gaz encore contenu dans ce disque contient des molécules de dihydrogène (H2) en grande majorité. Une petite fraction de ce gaz est en fait constitué de molécules de deutérure d'hydrogène, de formule HD, c'est-à-dire qu'elles contiennent un atome d'un isotope de l'hydrogène, le deutérium (D), ainsi qu'un atome d'hydrogène.

Les molécules d'H2 n'émettent pas de radiations facilement détectables, contrairement à l'atome d'hydrogène neutre dont on sait retracer la distribution dans la Voie lactée grâce à la fameuse raie à 21 cm. C'est pourquoi on utilise surtout les radiations émises par la molécule de monoxyde de carbone (CO) sous l'effet d'un choc avec les molécules d'H2 pour mesurer leur répartition dans des nuages. Les molécules d'HD peuvent jouer un rôle similaire, et elles permettent une détermination plus précise de la masse d'hydrogène moléculaire présent dans un disque protoplanétaire, si l'on s'y prend bien.

Un futur système de géantes gazeuses ?

Dans le cas de TW Hydrae, les résultats ont été surprenants. Malgré son âge, le disque protoplanétaire contient encore de quoi créer de nombreuses exoplanètes gazeuses. Selon les estimations, l'équivalent de 50 fois la masse de Jupiter est encore présent sous forme de gaz dans le disque de TW Hydrae, ce qui voudrait dire qu'une fois le processus de formation planétaire achevé, l'étoile sera entourée d'un cortège planétaire bien plus important que celui du Système solaire.

 « Ces nouveaux résultats sont une autre étape importante dans la compréhension de la diversité des systèmes planétaires dans l'univers », explique l'un des auteurs de cette découverte, Edwin Bergin. « Nous observons aujourd'hui des systèmes formés de Jupiters massives, de superterres et d'équivalents de Neptune. En pesant ces systèmes à leur naissance, nous pouvons mieux comprendre comment notre Système solaire s'est formé et comment d'autres systèmes planétaires sont possibles. »