Comment étudier la formation des exoplanètes telluriques ? En partant à la recherche des débris d’astéroïdes autour des étoiles mortes ! C’est ce que vient de faire un groupe d’astrophysiciens à l'aide du télescope spatial Spitzer.
Les minéraux silicatés sont détectés autour de l'étoile GD 40 par leur spectre infrarouge. Crédit : Nasa/JPL-Caltech/Ucla

Les minéraux silicatés sont détectés autour de l'étoile GD 40 par leur spectre infrarouge. Crédit : Nasa/JPL-Caltech/Ucla

L' Humanité connaît aujourd'hui plus de 300 exoplanètes mais il s'agit pour l'essentiel de géantes gazeuses. Pour un planétologue, et encore plus un exobiologiste, c'est la détection et l'estimation de la probabilité de formation de planètes rocheuses semblables à la Terre qui est le plus excitant. C'est aussi ce qui est le plus difficile à réaliser même si l'on dispose aujourd'hui d'outils en orbite comme Spitzer et surtout Corot.

Michael Jura est un astrophysicien membre du département d'astronomie et d'astrophysique de l'UCLA à Los Angeles en Californie. C'est un collègue de Benjamin Zuckerman et il a récemment eu une brillante idée...

Lorsqu'un astre, comme une comète, s'approche de trop près d'un autre plus massif et plus grand que lui, il existe une distance limite en dessous de laquelle les forces de marée de l'astre le plus important mettent en pièces le corps céleste le plus petit et le moins massif. Cette limite porte un nom connu : c'est la célèbre limite de Roche.

Pour une planète, comme pour n'importe quel corps céleste, il existe une sphère d'influence délimitée par la limite de Roche à l'intérieur de laquelle un satellite rocheux ne peut exister. Crédit : Pierre Thomas
Pour une planète, comme pour n'importe quel corps céleste, il existe une sphère d'influence délimitée par la limite de Roche à l'intérieur de laquelle un satellite rocheux ne peut exister. Crédit : Pierre Thomas

Lorsqu'une étoile de quelques masses solaires tout au plus termine sa vie, elle devient un astre hyperdense exerçant donc des forces de marée importantes. Il s'agit d'une naine blanche. Or, si un système solaire possédant à l'origine des planètes telluriques semblables à la Terre ou à Mercure existait autour d'une naine blanche, il doit rester autour d'elle des vestiges datant de la formation des planètes telluriques, c'est-à-dire des astéroïdes.

Avant de devenir une naine blanche, l'étoile hôte a dû nécessairement passer par le stade de géante rouge, perdant de la masse avec une enveloppe gazeuse dilatée. En plus de détruire une partie des planètes rocheuses présentes, les orbites des astéroïdes seront suffisamment perturbées pour qu'un jour certains pénètrent à l'intérieur de la limite de Roche de la naine blanche.

Cliquez pour agrandir. Une vue d'artiste d'un astéroïde brisé par les forces de marée d'une naine blanche. Crédit : Nasa/JPL-Caltech

Cliquez pour agrandir. Une vue d'artiste d'un astéroïde brisé par les forces de marée d'une naine blanche. Crédit : Nasa/JPL-Caltech

Huit naines blanches ont sans doute déjà avoué l'existence d'anciennes planètes telluriques...

Les forces de marée détruiront alors ces astéroïdes à la façon dont Jupiter a brisé la comète Shoemaker Levy 9 en 1994.

Parce qu'elles sont peu lumineuses, les naines blanches ne s'opposeront guère à la détection et à l'analyse de la poussière et des débris qui résulteront de ces destructions. En évaluant combien de naines blanches sont entourées par de tels restes et en analysant leurs compositions, on pourra alors avoir des informations sur l'occurrence des planètes telluriques autour des étoiles et leur processus de formation.

Ce programme d'études est en cours de réalisation. A l'aide du télescope en infrarouge Spitzer, Michael Jura et ses collègues ont d'ores et déjà découvert huit naines blanches entourées de poussières et de débris résultant très probablement de la destruction d'astéroïdes. D'après les estimations des chercheurs, dans chacun de ces cas, il s'agirait du résultat de la destruction d'un seul astéroïde depuis quelques millions d'années tout au plus. Dans un cas, ils pensent même connaître la taille de l'objet, de l'ordre de 200 km.

Fait intéressant, l'analyse spectroscopique indique que dans les poussières se trouvent des minéraux analogues à l'olivine, un silicate figurant parmi les composants majeurs du manteau de la Terre, et assez peu de carbone. Or, il s'agit précisément de ce à quoi on doit s'attendre lorsque, notre Soleil devenu une naine blanche, les mêmes phénomènes se produiront parmi les planètes rocheuses et les astéroïdes du système solaire.