Infatigable vulgarisateur, astronome, aéronaute, découvreur de Janus et de l'oxyde de fer martien, Audouin Dollfus s'en est allé, laissant une moisson de découvertes et l'exemple d'un homme tout entier voué à la science.

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Audouin Dollfus, pour le photographe, s'installe dans la capsule qui l'a, un jour de 1959, amené dans la stratosphère, armé d'un télescope pour étudier le spectre de la lumière de Vénus sans être trop gêné par l'humidité de l'atmosphère terrestre. Photo museeairespace.fr © P-F. Mouriaux - Tous droits réservés

Audouin Dollfus, pour le photographe, s'installe dans la capsule qui l'a, un jour de 1959, amené dans la stratosphère, armé d'un télescope pour étudier le spectre de la lumière de Vénus sans être trop gêné par l'humidité de l'atmosphère terrestre. Photo museeairespace.fr © P-F. Mouriaux - Tous droits réservés

Pendant longtemps, les habitants de Meudon, près de Paris, ont pris l'habitude de voir sa frêle silhouette. En général chargé de dossiers, il allait ou il revenait de l'observatoire. On le suivait de l'œil et on disait « c'est un astronome ». « Quand il y a du vent, j'ai peur qu'il s'envole » disait cette femme qui avait l'habitude de le croiser. C'est vrai, la silhouette était celle d'un homme de maigre corpulence mais quelle énergie ! Il ne marchait pas, il courait. Audouin Dollfus courait toujours. Et toujours pour la science.

Ces dernières années, cet homme, né en 1924, donnait une partie de son temps à l'association des Amis de Camille Flammarion. Cette équipe d'utopistes s'est un jour mis en tête de redonner vie à l'observatoire privé de Camille Flammarion, construit à la fin du XIXe siècle à Juvisy-sur-Orge, au sud de Paris. Mission réussie : à force de ténacité et de coups médiatiques, le délabrement inexorable du bâtiment, qui était voué à la destruction, est enrayé. La lunette est restaurée et la coupole commence à renaître. Toujours actif, Audouin Dolfus était aussi jusqu'en 2005 directeur de l'observatoire de Triel-sur-Seine, dans les Yvelines.

Un spécialiste du Système solaire

Au cours de sa vie, ce grand astronome a signé de belles découvertes. Ses observations au Pic du Midi, avec Bernard Lyot, et ses recherches sur l'analyse de la polarisation de la lumière ont fait progresser la planétologie. Dès la fin des années 1940, Audouin Dollfus met en évidence l'oxyde de fer sur le sol martien. Plus tard, il révèle l'existence d'une atmosphère sur Mercure. Deux résultats surprenants pour l'époque.

La même technique dévoilera la fine couche de poussière flottant au-dessus de la surface lunaire. La Nasa utilisera ses travaux pour mettre au point la technique d'alunissage des missions Apollo. En 1966, il découvre un nouveau satellite de Saturne, Janus, puis ajoutera un anneau supplémentaire à la liste de ceux déjà connus.

À l'image d'un Auguste ou d'un Jacques Piccard, Audouin Dollfus était aussi un « savanturier ». Pour mieux étudier les atmosphères de Mars et de Vénus, il grimpe en 1954 puis en 1959 dans une capsule portée par un ballon qui l'emporte jusque dans la stratosphère, en compagnie d'un télescope. L'expédition de 1959 le hissera jusqu'à 14.000 mètres d'altitude, record de l'époque. L'engin est constitué de 105 ballons formant une structure haute de 450 mètres (à ne pas manquer : le récit complet de ce vol stratosphérique par Dolfus lui-même).

Ce n'était pas là le premier envol d'Audouin : son père était Charles Dollfus, qui fut aéronaute et conservateur du musée de l'Air français. En sa compagnie, Audouin a volé pour la première fois à l'âge de 8 ans. Ce premier octobre 2010, il s'est envolé pour l'ultime fois.