Découverte de la (sous-)naine brune la moins massive connue à ce jour !

Depuis une trentaine d'années, des centaines d'objets moins massifs que des étoiles, mais qui flottent librement dans la galaxie sans orbiter autour d'une étoile, ont été découverts. Ces corps, appelés naine brunes, se sont formés de la même façon que les étoiles, c'est-à-dire par l'effondrementeffondrement d'un nuagenuage de gaz sous sa propre gravitégravité. Cependant, les naines brunes ont une massemasse insuffisante pour déclencher la fusionfusion de l'hydrogènehydrogène (protium), d'où le fait qu'elles soient parfois qualifiées d'« étoiles ratées ». Si la plupart des naines brunes connues ont des masses de plusieurs dizaines de fois celle de JupiterJupiter, certains objets qui semblent s'être formés de la même façon ont des masses comparables à celle des plus grosses planètes. Dès lors, quels sont les plus petits objets capables de se former de cette façon ?

Des objets de la masse d'une planète…

Le critère définissant habituellement les naines brunes est la fusion du deutérium, ce qui se produit autour de 13 fois la masse de Jupiter. Cependant, on connaît aussi des objets de seulement quelques fois la masse de Jupiter qui ne sont pas en orbiteorbite autour d'une étoile. Ces objets libres de masse planétaireobjets libres de masse planétaire sont également appelés sous-naines brunes.

Pour essayer de déterminer la masse minimale des objets qui se forment comme une étoile, une équipe internationale menée par Kevin Luhman, de l'université d'État de Pennsylvanie (États-Unis), et Catarina Alves de Oliveira, du Centre européen d'astronomie spatiale (un centre de l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne situé en Espagne), a étudié l'amas stellaire IC 348. Cet amas, situé à environ 1 000 années-lumièreannées-lumière de la Terre dans la région de formation d'étoiles de Persée, est âgé d'environ cinq millions d'années seulement. En conséquence, les naines brunes qui s'y trouvent sont encore relativement brillantes en lumière infrarougeinfrarouge du fait de la chaleurchaleur de leur formation.

En photographiant le centre de l'amas à l'aide de NIRCam, puis en suivant les cibles les plus prometteuses avec NIRSpec, deux des instruments du télescope spatial James-Webbtélescope spatial James-Webb, l'équipe a repéré trois cibles avec une masse comprise entre trois et huit fois celle de Jupiter et des températures de surface allant de 830 à 1 500 degrés Celsiusdegrés Celsius. Selon les modèles informatiques, le plus petit de ces objets est seulement trois à quatre fois plus massif que Jupiter.

L'amas stellaire IC 348 photographié par l'instrument NIRCam du télescope spatial James-Webb. © Nasa, ESA, CSA, STScI, and K. Luhman (Penn State University) et C. Alves de Oliveira (European Space Agency)

… mais formés comme une étoile

Expliquer la formation de (sous-)naines brunes aussi peu massives est un défi. En effet, un nuage de gaz lourd et dense possède suffisamment de gravité pour s'effondrer et former une étoile, mais en raison de sa gravité plus faible, il devrait être plus difficile pour un petit nuage de s'effondrer pour former une naine brune, voire une sous-naine brune.

Catarina Alves de Oliveira, la chercheuse principale du programme d'observation, explique qu'« il est assez facile pour les modèles actuels de créer des planètes géantes dans un disque autour d'une étoile. Mais dans cet amas, il est peu probable que cet objet se soit formé dans un disque, au contraire [il est plus probable qu'il se soit, ndlr] formé comme une étoile ». En effet, même si ce scénario ne peut pas être complètement exclu, une planète géanteplanète géante éjectée est peu probable : d'une part, les planètes aussi massives sont généralement rares par rapport aux planètes de masse plus petite, et d'autre part, les étoiles d'IC 348 sont des étoiles de faible masse, type d'étoiles autour desquelles les planètes géantes sont particulièrement rares. De plus, comme l'amas n'a que cinq millions d'années, les planètes géantes n'ont probablement pas eu le temps de se former puis d'être éjectées de leur système.

La découverte d'autres objets de ce type contribuera à clarifier leur statut. Les théories suggèrent que les planètes vagabondes sont plus susceptibles d'être trouvées à la périphérie d'un amas stellaire. Elargir la zone de recherche pourrait donc aider à les identifier si elles existent dans IC 348.

Une molécule inattendue

Deux des naines brunes identifiées lors de cette étude présentent la signature spectrale d'un hydrocarbure non identifié. La même signature infrarouge a été détectée par la mission Cassini dans les atmosphères de Saturne et de son satellite Titan. On l'a également observée dans le milieu interstellaire, le gaz entre les étoiles, mais comme l'explique Catarina Alves de Oliveira, « c'est la première fois que nous détectons cette moléculemolécule dans l'atmosphèreatmosphère d'un objet extérieur à notre Système solaireSystème solaire. Les modèles d'atmosphères des naines brunes ne prédisent pas son existence. Nous observons des objets plus jeunes et de masses plus faibles que jamais auparavant, et nous voyons quelque chose de nouveau et d'inattendu ».

Les travaux futurs pourraient également inclure des enquêtes plus longues permettant de détecter des objets plus faibles et plus petits. La courte enquête menée par l'équipe devait détecter des objets aussi petits que deux fois la masse de Jupiter. Des relevés plus longs pourraient facilement atteindre la masse de Jupiter.

En plus de fournir des indices sur le processus de formation des étoiles, ces sous-naines brunes aideront les astronomesastronomes à mieux comprendre les exoplanètesexoplanètes. Les naines brunes les moins massives ayant des masses comparables à celle des plus grandes exoplanètes, on s'attend à ce qu'elles aient des propriétés similaires. Cependant, une naine brune flottant librement est plus facile à étudier qu'une exoplanète géante, puisque cette dernière est cachée dans l'éclat de son étoile hôte.