La poussière cosmique bloque une partie du rayonnement électromagnétique, en particulier dans le domaine visible, et l'eau de l'atmosphère peut aussi parasiter en astronomie la recherche des molécules d'H2O dans des disques protoplanétaires. Mais, heureusement, le réseau de radiotélescopes Alma peut percer certains des secrets de ces disques où naissent les planètes. Observant une nouvelle fois la protoétoile HL-Tauri, il vient de découvrir de la vapeur d'eau dans le disque qui l'entoure, dans une région où des planètes pourraient se former.
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Arthur Clarke, le génial auteur de 2001 : L'Odyssée de l'espace, avait l'habitude de dire : « Comme il est inapproprié d'appeler cette planète Terre alors qu'il s'agit clairement d'Océan ! ». GéologuesGéologues, planétologues et exobiologistes aimeraient bien savoir exactement comment non seulement notre Planète bleue s'est formée mais aussi ses océans. Dans sa recherche de ses racines et cosmiques et pour savoir si elle est seule dans l’Univers, la noosphère s'est donc dotée d'yeuxyeux pour étudier la formation des planètes ailleurs.
C'est ainsi qu'en 2013, était inauguré l'Atacama Large Millimeter/Submillimiter Array (le grand réseau millimétrique/submillimétrique de l'Atacama - Alma) sur le haut plateau de Chajnantor, à 5 000 mètres d'altitude, un des plus hauts observatoires astronomiques sur Terre dans les Andes chiliennes. Alma est un réseau de radiotélescopes capable d'observer parmi les objets les plus froids de l'Univers dans les domaines de rayonnement millimétrique et submillimétrique, c'est-à-dire allant de l'infrarouge aux ondes radio.
L'ESOcast 69 présentait il y a quelques années le résultat d'observations d'Alma, qui révélait des détails extraordinairement fins qui n'ont jamais été vus auparavant dans le disque formant une planète autour de la jeune étoile HL-Tauri. Il s'agissait de l'image la plus nette jamais réalisée à des longueurs d'onde submillimétriques. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Cherchez à faire apparaître des sous-titres en anglais et enfin cliquez sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © European Southern Observatory (ESO)
La première cartographie de l'eau dans un disque protoplanétaire
Cela permet à Alma de sonder les mystères de la naissance des planètes dans les disques protoplanétaires où elles se forment selon la théorie cosmogonique standard. Comme l'explique la vidéo ci-dessus, les poussières dans les disques protoplanétaires se collent pour finir par donner des cailloux et des blocs rocheux dépassant le mètre, qui vont s'attirer pour former des petits corps planétaires et des embryonsembryons de planètes - en grossissant, ils vont produire des zones pauvres en gaz et poussière sur leurs orbitesorbites. Ces disques sont produits par l'accrétionaccrétion de gaz et de poussières dans un nuagenuage moléculaire dense et froid qui s'effondre sous sa propre gravitégravité, formant une protoétoileprotoétoile où la pressionpression chauffe la matièrematière pour finir par allumer des réactions de fusion thermonucléaire. On obtient alors une étoileétoile sur la fameuse séquence principaleséquence principale.
Comme l'illustre également la vidéo, les astronomesastronomes étudient depuis des années une de ces protoétoiles avec son disque protoplanétaire dans la constellation du Taureauconstellation du Taureau. Elle se nomme HL-Tauri et se trouve à 450 années-lumièreannées-lumière du SoleilSoleil dans le célèbre nuage moléculaire 1 du Taureau (TMC-1 ou en anglais Taurus Molecular Cloud 1). Elle vient de faire aujourd'hui l'objet d'une nouvelle publication dans la revue Nature Astronomy qu'accompagne un communiqué de l'ESOESO avec des commentaires de plusieurs des chercheurs impliqués dans la découverte exposée.
« Je n'avais jamais imaginé que nous pourrions obtenir une image d'océans de vapeur d'eau dans la région même où une planète est susceptible de se former », déclare Stefano Facchini, astronome à l'université de MilanMilan (Italie), qui a dirigé l'étude publiée. Le communiqué explique en effet que les données d'Alma révèlent la présence d'au moins trois fois plus d'eau que dans tous les océans de la Terre dans le disque interne de HL-Tauri.
« À ce jour, Alma est la seule installation capable de résoudre spatialement la présence d'eau dans un disque froid de formation de planètes », y ajoute le co-auteur Wouter Vlemmings, professeur à l'université technologique de Chalmers en Suède. Elle vient de permettre pour la première fois de cartographier sa répartition dans un disque stable et froid.
Les observations d'Alma concernent en particulier la signature spectrale de la présence de vapeur d'eau dans des sillons du disque protoplanétaire que l'on pense creusés par de jeunes planètes en orbite qui accumulent des poussières et du gaz en se développant. Stefano Facchini explique : « Nos images récentes révèlent une quantité importante de vapeur d'eau à différentes distances de l'étoile, y compris un espace où une planète pourrait potentiellement se former à l'heure actuelle. »
Ce n’est pas seulement une information importante pour tenter de mieux comprendre l’origine de l’eau des océans de la Terre qui est toujours en débat avec de nombreuses théories proposées. Elle a aussi des implications pour les mécanismes même de formation des planètes dans les disques protoplanétaires et c'est ce qui explique pourquoi Elizabeth Humphreys, astronome à l'ESO ayant également participé à l'étude, est enthousiaste quand elle dit : « Il est vraiment passionnant d'assister directement, sur une photo, à la libération de moléculesmolécules d'eau à partir de particules de poussière glacée. ».
De la glace pour catalyser la croissance des agglomérats de poussières
En effet, il n'est pas simple d'expliquer comment les poussières initiales d'un disque protoplanétaire se sont mises à s'agglutiner pour former ensuite des petits cailloux qui eux-mêmes vont au final former des embryons de planètes. Ainsi, on avait découvert par exemple que lorsque des agglomérats de poussières atteignent des tailles comprises entre un millimètre et quelques centimètres, les collisions entre ces particules les conduisaient à rebondir bien plus souvent qu'à se coller dans les simulations et expériences généralement réalisées.
Ce problème, parfois appelé la « barrière du rebond », on a tenté de le résoudre - par exemple en faisant intervenir des forces électrostatiques. Mais dans le cas présent, le communiqué de l'ESO explique que selon certains planétologues, c'est parce que les poussières peuvent s'entourer de glace issue de la condensationcondensation de la vapeur d'eau dans certaines régions du disque qu'elles peuvent plus facilement se coller pour donner un effet boule de neige.
C'est ce qui a fait dire à Stefano Facchini : « Nos résultats montrent comment la présence d'eau peut influencer le développement d'un système planétaire, comme ce fut le cas il y a 4,5 milliards d'années dans notre propre Système solaireSystème solaire. »
Des chercheurs ont découvert de la vapeur d'eau dans le disque autour d'une jeune étoile, à l'endroit précis où des planètes pourraient se former. L'eau est un ingrédient clé de la vie sur Terre et on pense qu'elle joue également un rôle important dans la formation des planètes. Pourtant, jusqu'à présent, nous n'avions jamais pu cartographier la répartition de l'eau dans un disque stable et froid – le type de disque qui offre les conditions les plus favorables à la formation de planètes autour des étoiles. Ces nouvelles découvertes ont été rendues possibles grâce à l'Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (Alma), dont l'Observatoire européen austral (ESO) est partenaire. Cette vidéo résume la découverte. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © ESO
Le communiqué de l'ESO se conclut en expliquant que « grâce aux améliorations apportées à Alma et à l'ELT (Extremely Large TelescopeExtremely Large Telescope) de l'ESO, qui sera mise en service au cours de la décennie, la formation des planètes et le rôle que joue l'eau dans ce processus seront plus clairs que jamais. En particulier, Metis (pour Mid-infrared ELT Imager and Spectrograph), offrira aux astronomes des vues inégalées des régions internes des disques de formation des planètes, où se forment les planètes comme la Terre ».